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Pauvreté dans les familles. Quand les choix politiques faussent la prise en charge

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« Famille et pauvreté au Sénégal ». C’était le thème autour duquel l’Association Atlantik Turkie/Sénégal pour le Dialogue culturel des Civilisations (Atsa) avait convié la réflexion. Cette première conférence de cette association coprésidée par l’ambassadeur de la Turkie à Dakar, M. Ali Kaya Savut, les directeurs de cabinets des ministres de la famille et celui de la solidarité nationale, et des membres de l’instance dirigeante de l’Atsa, s’est tenue le samedi 8 mai dans un hôtel de la place.

L’instabilité institutionnelle avec les remaniements et réaménagements à n’en plus finir du gouvernement ne sont pas le seul hic qui retarde la mise en œuvre de plusieurs programmes notamment ceux de lutte contre la pauvreté. A cela s’ajoutent les écarts qui caractérisent même le choix politique avec l’érection de départements ministériels qui font doublon. C’est le cas du ministère de la famille et celui de la solidarité nationale. Le bémol a été soulevé par la sociologue Fatou Sow Sarr qui a animé la première conférence de l’Association Atlantik Turkie/Sénégal pour le Dialogue culturel des Civilisations (Atsa) qui s’est tenue le samedi 8 mai 2010 dans un hôtel de la place.

Interpellé par la presse, en marge de la conférence sur « Famille et pauvreté au Sénégal », Mme Fatou Sow Sarr a reconnu les efforts consentis par les pouvoirs publics dans le traitement de la question de la pauvreté au Sénégal. Selon elle, « l’Etat fait des choses mais la critique qu’on peut faire c’est qu’il y a un morcellement des actions ». La sociologue dans sa logique a fait allusion à l’existence et d’un ministère de la famille et d’un ministère de la solidarité nationale. Pour elle, « ceci est une aberration du point de vue du professionnel du travail social ». Parce que, a-t-elle précisé, « nous disons que c’est l’évolution conceptuelle sur un même champ. Ça n’a absolument pas de pertinence. Ça renvoie à une dispersion des moyens parfois sur des mêmes cibles ». A son avis, « les cibles du ministère de la solidarité nationale et ceux du ministère de la famille, sont exactement les mêmes ».

Brandissant des chiffres de l’Agence nationale de la statistique et de la démocratie (Ansd), Fatou Sow Sarr a souligné qu’il y a à peu près 58 % des familles en deçà du seuil de pauvreté aujourd’hui. Et de rappeler : « cela c’est aggravée parce qu’on avait connu un recul de la pauvreté mais n’oublions pas que ces dernières années, nous avons eu des chocs qui ont fait qu’au niveau des indicateurs macroéconomiques, le taux de croissance avait baissé jusqu’à 2 % au Sénégal notamment en 2006. Ce qui avait engendrait, d’ailleurs, le départ massif des jeunes par les pirogues. Donc la pauvreté, elle est bien là ».

En plus de la pauvreté, l’exclusion sociale

Selon Mme Fatou Sow Sarr, ce n’est pas la pauvreté qui est simplement le problème, mais l’exclusion sociale. « Autant dans le passé, si on parcourt les archives avant les guerres mondiales, on voit que le Sénégal a connu des situations d’extrême pauvreté mais qui n’ont pas entraîné une déstabilisation sociale au point que nous connaissons aujourd’hui ». La sociologue considère ainsi que « l’enjeu c’est plutôt la répartition des richesses qui permet à chacun de garder sa dignité ». Or, a-t-elle poursuivi, « quant on regarde les 20 % les plus pauvres et les 20 % les plus riches, on se rend compte que l’essentiel de la richesse est concentré au niveau de ces derniers 20 % ».

Son cheminement consistait à voir comment les autorités publiques puissent prendre conscience de la situation actuelle pour bâtir des politiques en fonction de la vision que certains penseurs ont de l’avenir de la famille sénégalaise « parce qu’elle demeure le pilier essentiel ». La sociologue considère que « malgré tous les chocs que nous avons connus sur le plan économique, c’est parce que la famille sénégalaise est solide que jusqu’à présent, nous n’avons pas de déchirures aussi profondes ». Sur ce point elle a fait la comparaison avec les pays d’Afrique Centrale qui, au-delà des questions de guerre, avaient le socle de leur société qui avait déjà connu un pourrissement assai avancé. « Nous avons la chance au Sénégal d’avoir cette famille qui est encore solide mais la question c’est jusqu’à quand elle pourra continuer à subir les coups et les contres coups », s’est-elle interrogée. A son avis, « une fois que les autorités en auront plus conscience, l’essentiel des politiques se feront en tenant compte de cela ». Cette défenseuse de la question genre pense que « si aujourd’hui, les pays nordiques acceptent de payer deux ans d’allocation de maternité aux femmes qui ont des enfants, ils estiment que la maternité est une fonction importante pour leur projet de société ». Donc, a-t-elle poursuivi, « si nous réfléchissons pour chaque segment et chaque secteur, nous verrons que nos politiques économique, éducative et de santé doivent se faire en partant de cela et en tournant autour de cette question centrale : Quelle famille nous voulons ? Et quel est ce model de famille ? Une fois que ce soit clair dans nos têtes, je pense que le reste pourra se construire aisément ».

Liberté du Sénégal dans ses choix économiques

La sociologue Fatou Sow Sarr pense que la réponse de la pauvreté est économique. Dans son développement, elle croit que c’est des politiques publiques qui doivent être mises en place. Ce qui, à son avis, renvoie à l’analyse qu’elle a fait à la fois des politiques au niveau interne mais aussi des rapports que le pays entretient avec l’extérieur. Fatou Sow Sarr a fait remarquer que « le Sénégal, comme la plupart des pays sous-développés, est dans une situation où elle n’a pas la liberté de s’inscrire dans les trajectoires qui sont les siennes en matière de choix économiques parce que nous sommes dépendant des institutions financières internationales qui nous obligent aujourd’hui à, par exemple, ouvrir nos marchés et à subir la concurrence asiatique ». Ce qui, pour elle, « est une concurrence déloyale qui met notre artisanat et nos secteurs de productions par terre ». Devant cet état de fait, la sociologue considère que la question fondamentale c’est l’indépendance de nos pays par rapport à l’extérieur et par rapport à ces grandes puissances et les institutions internationales.

Ce qui amène Fatou Sow Sarr a avancé que la réponse de la pauvreté n’est pas aussi aisée que cela mais, a-t-elle avancée, « ça demande tout un travail et beaucoup de courage politique qui n’est pas simplement la question d’un Etat ». Selon elle, « la vérité est qu’aucun de nos pays africains ne peut s’en sortir si nous ne prenons pas conscience de notre commun destin. D’où toutes ces réflexions sur pourquoi pas un gouvernement continental parce qu’au moment où l’Europe se met ensemble, l’Amérique aussi, l’Afrique continue à être dans la logique de la balkanisation ». « Dans ce contexte, il est illusoire de penser qu’on va s’en sortir aussitôt », a-t-elle averti.

sudonline.sn

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