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Francophilie : nous avons honte pour vous, président Diouf…

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Il y a quelques années les militants du Rassemblement national démocratique (RND) aimaient plaisanter entre eux en se référant à « la question ». La voici, reproduite in extenso : « Les citoyens sénégalais ont le droit de savoir si l’homme qui assure la magistrature suprême a pris sa retraite de la fonction publique française à l’âge de 65 ans, alors qu’il est Président de la République du Sénégal, et s’il en est ainsi à quel titre il a pu le faire. Autrement dit, Senghor a-t’il conservé, implicitement ou explicitement, la nationalité française jusqu’à présent ? »

Cette vigoureuse interpellation retentit encore dans les oreilles de tous les patriotes qui avaient le privilège, dans les années 80, de prendre connaissance, périodiquement, du contenu des parutions de « TAXAW », l’organe officiel du Rassemblement National Démocratique. Les plus jeunes l’auront deviné : la question, fondamentale entre toutes, était celle régulièrement posée par le professeur Cheikh Anta Diop à son aîné, le président Léopold Sédar Senghor qui, on le sait, s’en est allé plus tard sans y avoir répondu.

Rappelons avant d’aller plus loin un fait souvent oublié de nos jours : tous ceux qui, au Sénégal comme dans les autres pays anciennement sous domination française, sont nés avant l’indépendance, disposaient au lendemain de l’accession de nos Etats à la souveraineté internationale, de la possibilité de garder la nationalité de l’ancien colonisateur.

Si Cheikh Anta Diop prit un malin plaisir à seriner LA QUESTION au Président Senghor, c’est bien parce qu’il était en mesure de se prévaloir exclusivement de la nationalité sénégalaise alors que le second ne pouvait, de toute évidence, en faire autant.

Plus tard, le mérite intellectuel de Senghor, universellement reconnu et sa francophilie, également de notoriété universelle, seront récompensés par sa promotion au statut d’’’Immortel’’, aux côtés de ses pairs de l’Académie Française, cette assemblée où ne sont admis que des citoyens français, de grand prestige.

Après Senghor, aucun de ses deux successeurs immédiats n’a été publiquement accusé d’avoir troqué sa nationalité sénégalaise contre celle de l’ancien colonisateur.

Les rumeurs n’ont toutefois pas manqué dans les milieux politiques, notamment lors des scrutins présidentiels, faisant allusion à leur éventuelle double nationalité. Cela, alors même que la Loi fondamentale de notre pays prohibait et prohibe toujours un tel état de fait.

Et comme pour se moquer encore plus de nous, voici que le Président Abdou Diouf, subitement pris par on ne sait quel besoin de se confier, nous apprend, en toute tranquillité, avec le sang-froid qui le caractérise, qu’il se définit lui-même comme étant… un « français du Sénégal ». Vous avez bien lu : c’est bien un ancien chef d’Etat d’un pays souverain (le Sénégal) qui ose s’exprimer de la sorte, selon un journal de la place (cf. l’ AS du 19 mars 2013, en page 2). Et le journal de conclure : »Dommage ».

Le simple fait que cette « pique » de l’AS soit passée totalement inaperçue en dit long sur ce qu’il faut bien appeler notre régression mentale. Si nous n’avons pas honte de ces propos, de quoi pouvons-nous bien avoir honte ?

Il y a de quoi se demander si le moment n’est pas venu de s’intéresser de plus près à la nationalité de nos hommes politiques. Dans un passé récent, d’éminentes personnalités de l’opposition, aujourd’hui aux affaires (Moustapha Niasse ? Ousmane Tanor Dieng ? ) ont été montrées du doigt par la rumeur publique. En outre, selon des articles de presse, Idrissa Seck fit, au moins une fois, accoucher son épouse aux Etats Unis d’Amérique pour faire acquérir à son enfant la nationalité américaine. L’intéressé n’a jamais daigné éclairer notre lanterne sur ce sujet sensible.

Chacun se souvient enfin de la polémique d’il y a deux ans à propos de la nationalité de Karim Wade, fils de l’ex président, alors tout-puissant ministre d’Etat aux ambitions politiques clairement affichées. Ce sont là autant de faits qui incitent à se demander pourquoi, dans un pays aussi démocratique que le Sénégal, les pouvoirs publics ne se montrent pas plus regardants sur le sujet. Et pourquoi l’opinion elle-même n’exige pas que soit appliquée dans toute sa rigueur les dispositions de notre Constitution stipulant que les candidats à la présidentielle doivent être exclusivement sénégalais.

Pour rappel, l’article 28 de notre Loi fondamentale stipule : « Tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, jouir de ses droits civils et politiques, être âgé de 35 ans au moins le jour du scrutin. Il doit savoir écrire, lire et parler couramment la langue officielle ».

Cela est, on ne peut plus clair ! On remarquera par ailleurs, que l’exclusivité ne concerne pas seulement la nationalité, mais également la langue de rigueur, en l’occurrence… le Français, que le Législateur nomme ici, pudiquement, « la langue officielle ».

Le mal est en fait bien plus profond et banal qu’on ne se l’imagine. Au lendemain de la deuxième alternance en mars 2012, le Sénégal a eu le « privilège » insolite de compter plusieurs bi-nationaux parmi les ministres de la République (dont, semble t-il, le premier d’entre eux) et même un parfait étranger, en la personne de l’Allemand, Monsieur Abdou Lo…

Il a fallu le nationalisme (que d’aucuns ont qualifié d’ombrageux) et la pugnacité de l’Honorable Député Abdoulaye Makhtar Diop pour que ce scandale soit au moins évoqué au Parlement.

Pour remédier à une telle incongruité, le chef de l’Etat saisit l’occasion d’un remaniement ministériel, pour décréter… la rétrogradation du ministre allemand, devenu directeur général d’une prestigieuse agence nationale. Quant aux ministres franco-sénégalais du gouvernement sénégalais… rien à signaler, ils sont bien tranquilles. Circulez !

Mais ce n’est pas tout : un député, donc un représentant du peuple en principe démocratiquement élu, en la personne de Monsieur Barthélémy Diaz, n’a pas hésité à faire état, apparemment avec une immense fierté, de sa nationalité… américaine. Il ne manquera pas, pour décourager tout reproche, de se dédouaner en désignant du doigt nos anciens présidents de la République qui seraient tous, à l’en croire, des Français !

Le président Abdou Diouf ne vient-il pas, du reste, de donner raison, en ce qui le concerne tout au moins, à son jeune camarade socialiste ? Toutefois, si sa récente déclaration a été un coup de massue, le coup de grâce, lui, nous a été assené par … « le petit peuple ». En effet, il y a quelques jours, les Sénégalais ont suivi, sidérés, un micro-trottoir plutôt surréaliste de la télévision nationale : des enseignants, des parents d’élèves, des élèves, s’interrogeant (à juste raison) sur la baisse générale du niveau d’enseignement, s’offusquaient, très innocemment, de ce qu’on ne parle plus le français, ni dans la cour de récréation, ni dans les classes, ni encore moins… dans les maisons !

Ce spectacle désolant et l’aveu du président Diouf m’ont tellement choqué que j’ai demandé par texto à un ami : « Qu’avons-nous donc fait au Bon Dieu pour mériter cela ? » Réponse laconique de cet ami : « C’est ta faute, Ouzin. C’est la mienne. Tous coupables ».

Tous coupables ?

Tous coupables, malgré l’œuvre culturelle et spirituelle immense de Cheikh Ahmadou Bamba ? De Kocc Barma Fall ? De Serigne Moussa Ka ? Tous coupables, malgré le formidable travail « d’endiguement » de Cheikh Anta Diop, face aux assauts tantôt fulgurants, tantôt sournois, de la francophonie triomphante et de la « Françafrique » souterraine ? Il est plus que temps de remettre sur le tapis, en l’élargissant, la fameuse « QUESTION » du grand savant sénégalais à Senghor : quelle est la nationalité des Sénégalais, y compris de ceux qui sont nés après l’indépendance comme, par exemple, notre quatrième président, Monsieur Macky Sall ?

Et si nous étions encore, tous ou presque, des Français… dans l’âme, notre âme remodelée avec soin par l’ancien colonisateur ? Ce serait plus que dommage. Ce serait tout simplement… malheureux ! Mais peut-être ne faut-il pas désespérer ? Garder intact l’espoir que notre pays donne naissance un jour pas trop lointain à d’autres Cheikh Anta Diop !…

Ousseynou BEYE [email protected]

7 Commentaires

      • Ndiaye je n’insulte pas Diouf, je le qualifie c’est simple. Vous savez qu’un homme n’est ni dénigré ni loué; il est tout simplement jugé par rapport a ses actions. Ce pays a tout donné à Diouf. Il n’a pas menti quand il dit qu’il est le plus français des Sénégalais car Sénégalais qu’il est,il n’a pas juger utile d’avoir un chez au Sénégal. Pourtant il a une maison en France. Des hommes et des femmes qui se sont battus pour lui sont aujourd’hui des moins que rien à ses yeux. Dans un documentaire sur sa petite personne, présentant ses amis, Diouf n’a cité aucun Sénégalais . Donc Ndiaye traitrise est le mot juste pour qualifier Diouf.

  1. Pour qui connait Abdou Diouf, je vous rappelle qu’il est né avant les indépendances et au vue de son parcours scolaire, à la fin de ces études supérieures en France, il leur était proposé de soit ; intégrer la haute administration française ou de rentrer dans leurs pays nouvellement indépendant.
    Le président Diouf avait choisi, contrairement à bcp de nos compatriotes de l’époque, mais aussi à ceux d’aujourd’hui devant un tel choix, de rentrer au Sénégal pour intégrer la fonction publique.
    Pour ceux qui est de la Francophonie, je tiens à préciser que depuis l’arrivée du Président Diouf à sa tête comme Secrétaire général, elle consacre 90% de ces activités à promouvoir la coopération Nord-Sud mais aussi Sud-Sud, à la prévention des conflits et au maintien de la paix.
    Les 10% qui concerne la langue française ont elles aussi étaient revues, désormais, et sous l’égide du Président Diouf, la Francophonie est partenaire des langues nationales africaines en soutenant financièrement leur développement. Par exemple, vous avez un programme intitulé Élan-Afrique (éducation langue nationale Afrique) qui consiste à intégrer les langues nationales dès le primaire dans les pays d’Afrique subsaharienne francophone.
    De plus, au Sénégal, l’un des plus grands et rares contributeurs de la Direction des langues nationales n’est autre que l’Organisation internationale de la Francophonie (Oif).
    Aussi, aujourd’hui, le 1er partenaire de la Francophonie est le Commonwealth et les deux Secrétaire généraux se voient régulièrement pour harmoniser leurs positions et aller défendre ensemble leurs pays membres les moins avancés auprès de leurs autres membres plus fortunés. C’était le cas lors du dernier Sommet du G8 où ils se sont rendus ensemble pour plaider la cause des pays africains et de leur dette.
    D’ailleurs aujourd’hui, sous l’impulsion du Président Diouf on ne parle plus de défendre la langue française à l’Oif, et ceci au grand dam des québécois mais plutôt de favoriser le multilinguisme.
    Ce dernier est définie par le Président Diouf, comme étant la nécessité pour chacun d’entre nous de maîtriser d’abord sa langue nationale, puis pour s’ouvrir au monde, parler une ou deux langues de communication internationale.
    Donc vous voyez que la Francophonie a changé sous les 3 mandats d’Abdou Diouf et aujourd’hui nous pouvons nous y retrouver sans aucune amertume.
    Maintenant je comprends votre réaction dûe aux à priori historique que nous avons tous sur la Francophonie.
    Au Sénégal, il a été extrêmement difficile de communiquer pour faire connaître ces actions là, car le pouvoir précédent tenait à ce que toutes les actions du Président Diouf ne soit pas connues du grand public.
    Et force est de constater, que là-dessus au moins, ils n’ont pas failli.
    Légui nak, comme lii douf tchi naak bii yeupp khadioul tchii tchinn lii, on va s’en arrêter là.

    Amadou Falilou Tall
    [email protected]

    • Bien dit Monsieur Tall. Mr Beye peut-il nous dire où il à fait ses études supérieures? Est-ce une tare d’être francophile? Le français est une langue fédératrice, il ne faut jamais l’oublier. je pense pas que la nationalité des nos dirigeants soit une priorité pour le Sénégalais lambda. Comme dirait l’autre: « pour philosopher il faut avoir le ventre plein »

  2. Si tu avais écrit ton texte dans une langue africaine et pas en français, tu aurais eu un peu de crédibilité. Tu es encore plus français que ceux que tu dénonces.

    Que proposes tu ? le français etant notre langue d’enseignement et d’administration , il est normal qu’on cherche à la maitriser. la médiocrité n’est bonne nulle part ?

    maintenant si tu penses qu’on doit se passer des langues étrangères n je te demande si il faut expulser l’arabe aussi ?

    tu n’es pas obligé d’apprendre une langue internationale, contentes toi de ton wolof, de ton serigne touba et de ton serigne moussa ka. Tu comprends mal cheikh anta diop, lui parlait de revaloriser la culture africaine (pas arabe), c’est pour ça d’ailleurs qu’il n’est pas trés aimé par les milieux religieux. arretez avec ce soit disant nationalisme de pacotille, le senegal est une creation coloniale, du à faidherbe, il y’a aucune gloire à sentir fier d’être senegalais ou malien ou ivoirien. plutot se sentir fier de son ethnie, qui existait bien avant la colonisation. Moi je ne me sens pas su tout senegalais, d’ailleurs je ne comprends pas ce que renferme ce mot comme valeurs ? à part la carte d’identité et les documents administratifs , pour senegalais ne veut rien dire: diola, wolof, peulh par contre signifie quelque chose pour moi. D’ailleurs le senegal n’est même pas une nation (en devenir peut être), pour que l’on puisse parler de nationalité: c’est juste du papier, mais pas une réalité profonde. les gesn volent plus facilement l’argent de l’Etat du senegal que l’argent des associations villageoises, ethniques. Pourquoi ?

  3. Article interessant.
    Je pense cependant que les propos du Président Abdou Diouf ont été sortis de leurs contextes par l’auteur. Un « fançais du Sénégal » ne signifie pas selon moi que le Président Diouf se définit comme un Français et non un sénégalais: Je m’explique;
    Nos langues nationales ne sont pas des langues internationales. Et personnellement j’en ai pris conscience quand en Europe, au cours d’un entretien d’embauche, le monsieur m’a dit: vous avez comme langue maternelle le Français (C’était en Italie). Je lui ai répondu non Monsieur, je viens du Sénégal. Il m’a alors répondu, c’est donc le sénégalais votre langue maternelle? Mais est-ce une langue internationale? J’ai alors compris qu’il avait raison, car le sénégalais n’existe pas en tant que langue, et aussi bien le wolof, pulaar, serere, soninké et autres ne sont pas connus à l’Etranger.
    Donc pour vous dire que nous ne sommes pas des français certes, mais c’est notre langue internationale. Maintenant, on se rend compte qu’il y a un Français du Sénégal, du Quebec, de la Cote d’Ivoire, de France, de la Suisse…etc.
    Par contre, je suis d’accord avec l’auteur sur le cas de nos élites, nos pseudo-intellectuels, nos hommes politiques et meme nos religieux qui amènent leurs épouses, alors enceintes, pour qu’elles accouchent en Europe, ou aux Etats Unis. Je trouve cela inadmissible.

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