A l’image de la réussite allemande en Ligue des Champions, le football outre-Rhin est en plein essor. Les raisons sont nombreuses.
Un pays de football
La ferveur. Un mot un seul définit l’ambiance qui règne en Allemagne autour et dans les stades de football. Souvent cité en exemple pour l’atmosphère délirante lors des matchs de Bundesliga, l’Allemagne est un pays de football. Un vrai. Celui des amoureux, des abonnés, des stades pleins, des chants, des kops et pas seulement celui de la bière. Une atmosphère familiale où chacun vient avec la tenue complète et n’hésite pas à dépenser en plus de son billet (ndlr : là où le supporter allemand dépense 10 euros en moyenne en plus de son ticket, le Français ne lâche qu’1,5 euro, selon un rapport publié par le think-tank Terra Nova), une présence policière quasi-invisible et un spectacle de qualité sur la pelouse sont autant d’atouts qui font de ce championnat l’un des plus attractifs. Longtemps porté par une équipe nationale brillante dans les compétitions internationales, le football allemand a baissé pavillon dans les années 2000 pour laisser place à l’hégémonie de la France, puis de l’Espagne.
Mais ce manque de résultats n’a pas altéré l’amour que portent les Allemands à la National Mannschaft. Bien au contraire, partout où l’équipe nationale se déplace, des foules entières viennent en masse pour les encourager à se surpasser. Il serait presque indécent de comparer la ferveur allemande à celle qui règne en France par exemple. Il y a peu, Michel Bastos est passé de Lyon à Schalke 04, et le Brésilien a vite compris la différence : « J’ai eu la chance de jouer, de marquer devant 65 000 personnes dans un stade exceptionnel. Les infrastructures sont impressionnantes. Je n’avais jamais vu ça. Le foot en Allemagne, c’est super. » Et il n’est pas le seul à le dire. Franck Ribéry, le plus Allemand des Français, ne cache plus son admiration pour le football dans son pays d’adoption. En Allemagne, les gens supportent le club de leur ville, peu importe leur niveau. En France, Marseille et le PSG se partagent le gros des « supporters ». Lyon, Saint-Etienne, Lens et les autres le reste.
Un championnat spectaculaire
Les stades sont pleins mais on comprend pourquoi. Quand on voit le spectacle affiché, on ne peut qu’avoir envie d’aller voir un match allemand. Le jeu des équipes allemandes est, en général, basé sur une prise de risques maximum. Si le 4-4-2 est encore assez utilisé en Allemagne, certains entraîneurs emblématiques comme Jürgen Klopp (Dortmund), Jupp Heynckes (Bayern Munich) ou Thomas Schaaf (Werder Brême) tentent d’autres expériences pour faire oublier les historiques Felix Magath et Louis Van Gaal, grands adeptes du 4-4-2. Au contraire du football espagnol, les coachs allemands font preuve de beaucoup plus de créativité dans leur recherche de la bonne formule tactique. Et cela paie puisque, depuis plusieurs années, c’est la Bundesliga qui est le plus offensif des cinq grands championnats étrangers.
L’an passé, avec 2,87 buts/match, le championnat allemand devançait la Liga et la Premier League. C’est aussi là que le plus de dribbles sont tentés (12,6/match en 2012). Les joueurs offensifs, notamment sur les ailes, y sont percutants. Ils profitent aussi de la faiblesse individuelle et du manque de vivacité de certains défenseurs. Et l’Allemagne possède une spécificité bien ancrée dans les traditions : la frappe lointaine. Dans les résumés de fin de saison, on retrouve souvent des « kartoffeln » (littéralement « patates ») de joueurs évoluant en Bundesliga. Et si la domination du Bayern Munich cette saison, et du Borussia Dortmund l’an passé, peut faire croire à un scénario écrit à l’avance, c’est un trompe-l’œil. En 1994, 1995, 1998, 2000, 2001, 2002, 2007, 2009 et 2010, le « Meisterschale » a été décerné lors de l’ultime journée. Peu de championnats peuvent se targuer d’allier spectacle et suspense haletant…
Des infrastructures au top
Là où la France a échoué en 1998, l’Allemagne a profité du Mondial 2006 pour bâtir de nouvelles enceintes et faire fructifier l’organisation d’une telle compétition. Les nouveaux stades allemands ont été construits pour durer avec des capacités accrues, plus de sièges VIP et des boutiques tout autour pour assurer le merchandising, indispensable à la santé économique d’un club. On a d’ailleurs compris en France que le modèle allemand n’était pas viable qu’en politique. Pour l’Euro 2016, Nice, Lyon et Bordeaux vont se doter d’un nouveau stade. Lille a déjà créé le sien et Marseille est en train de moderniser le Vélodrome. Le PSG a annoncé aussi son intention de rendre le Parc des Princes plus attrayant. Bref, pour en revenir à l’Allemagne, il n’y a pas en Europe un championnat avec autant de stades de qualité. Et le prix des places, qui reste modéré, incite les supporters à s’y rendre. Avec 40 000 spectateurs en moyenne, la Bundesliga affiche la plus forte affluence des championnats européens. Et la plus forte croissance (autour de 10%). A titre d’exemple, il est possible de voir jouer le Bayern Munich pour 15€ quand il faut en dépenser au minimum 35 pour le PSG.
Un financement équilibré
Pendant que certains clubs européens se font racheter par des oligarques ou de richissimes chefs d’Etat, à l’image du PSG, de Malaga ou de Manchester City, le foot allemand se protège. La Bundesliga a ainsi voté une règle interdisant à un investisseur seul de détenir plus de 49% d’un club. Du coup, les supporters et les membres actifs de l’association sont très impliqués dans les décisions du club et ont leur mot à dire. Pas de transfert indécent, si l’on excepte celui de Javi Martinez (ndlr : 40M€ de Bilbao au Bayern l’été dernier), les chiffres ne dépassent que rarement les 20 millions (Neuer, Ribéry, Gomez et maintenant Götze font figure d’exception). Et les salaires des joueurs restent plus mesurés que dans les autres grands championnats européens.
Non pas que les pensionnaires de Bundesliga ne gagnent pas bien leur vie, mais les clubs ont choisi de ne pas suivre l’inflation pour garantir une santé économique indispensable à leur survie. Ainsi, la masse salariale des clubs allemands ne représente que 51% de leur budget, contrairement au 65% en Angleterre et au 69% en France. Enfin, le financement des clubs ne dépend pas essentiellement des droits TV comme en Ligue 1 où ils représentent plus de la moitié des revenus. Et là aussi, sur ce point, l’Allemagne a un coup d’avance. Son indépendance face aux aléas économiques met ses clubs à l’abri.
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