Le Premier ministre Abdoul Mbaye a déclaré samedi qu’il préférait le maintien de l’article 80 du Code pénal sénégalais à sa suppression, estimant qu’”on ne peut pas laisser n’importe qui traiter n’importe comment les institutions de la République, en particulier le président de la République”.
“Ce n’est pas possible. On ne peut pas […] se mettre à injurier une institution, à plus forte raison une personne physique. Je suis pour le maintien de l’article 80?, a dit M. Mbaye à l’émission “Questions d’actualité” de Radio Sénégal.
Le Premier ministre se prononçait sur l’affaire Bara Gaye, un jeune militant du Parti démocratique sénégalais (PDS, opposition) placé sous mandat de dépôt pour offense au chef de l’Etat, depuis le 28 mai dernier.
Gaye, proche de l’ancien ministre d’Etat Karim Wade, est poursuivi pour des propos considérés comme une offense à l’égard du chef de l’Etat, Macky Sall.
Il aurait tenu de tels propos lors d’un meeting du PDS dans la ville de Mbacké (centre).
La Ligue sénégalaise des droits humains (LSDH) a relancé mardi le débat sur l’article 80 du Code pénal, en préconisant dans un communiqué son “abrogation, dans les meilleurs délais […] conformément aux engagements souscrits par l’Etat du Sénégal en 2008 devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies”.
Cet article du Code pénal sénégalais est souvent qualifié de “liberticide” par les juristes et les organisations de défense des droits de l’homme.
Ils reprochent au législateur de n’avoir pas clairement défini “les troubles politiques graves” et “les actes de nature à compromettre la sécurité publique”, qui sont punis par cet article d’une peine de prison allant de trois ans à cinq ans. Une peine assortie d’une amende pouvant varier entre 100 mille et 1,5 million de francs CFA.
Dans une interview publiée samedi par le quotidien Enquête, le professeur de droit constitutionnel Babacar Guèye a préconisé la suppression de cet article, tout en estimant qu’”il ne faut pas donner une licence à tous ceux qui veulent injurier les institutions”.
En raison du “niveau de développement de notre démocratie, il faut aller vers l’abrogation de cet article. Encore qu’il ne faut pas donner une licence à tous ceux qui veulent injurier les institutions”, a affirmé M. Guèye.
“Il faut trouver un juste équilibre entre la liberté d’expression et la nécessité de ne pas laisser quelqu’un offenser les institutions”, a-t-il recommandé.