Les quelque 6,8 millions de Maliens déclarés inscrits sur les listes électorales par les autorités de Bamako se rendent aux urnes dimanche pour départager Ibrahim Boubacar Keïta et Soumaïlé Cissé, les deux candidats du deuxième tour de l’élection présidentielle dont les pronostics annoncent une issue favorable au premier, après sa large avance le 28 juillet sur son rival.
Au premier tour qui mettait en compétition 27 candidats au total, 48,98% de ce corps électoral avaient exprimé leur choix, selon les chiffres officiels. Le décompte des résultats confirmés par la Cour constitutionnelle après les premières indications du ministère de l’Administration territoriale avait classé en tête Ibrahim Boubacar Keïta avec 39,7% des suffrages, suivi de Soumaïla Cissé, 19,7%.
Deux personnalités aux tempéraments et aux styles différents, le premier se montrant plus modéré que le second qui affiche des allures d’un « va-t-en guerre » et d’un harangueur de foules, ces deux personnalités se connaissent bien pour avoir tout d’abord milité ensemble au sein de l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (Adema-PASJ), et ensuite collaboré dans un même gouvernement dirigé par Keïta de 1994 à 2000, avec Cissé dans les fonctions de ministre des Finances.
Soutenu par une coalition regroupant la quasi-totalité des recalés du premier tour, à commencer par le troisième Dramane Dembelé (9,7% des voix) qui s’est rétracté au dernier moment après avoir annoncé son soutien dans un premier temps à Cissé, Ibrahim Boubacar Keïta, affectueusement appelé « IBK » par ses partisans, passe pour avoir un vivier électoral plus important que son adversaire.
A la lumière de ses slogans de campagne, l’ex-Premier ministre et ex-président de l’Assemblée nationale malienne âgé de 68 ans promet de construire « un Mali, solidaire et uni », « pour le bonheur des Maliens » et se positionne comme un candidat du changement, ce que revendique lui aussi Soumaïla Cissé qui s’est pour sa part donné pour devise « tout pour le Mali ».
A 63 ans, l’ancien président de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), affirme vouloir assurer au peuple malien, las de la grave crise sociopolitique déclenchée par le coup d’Etat militaire du capitaine Amadou Sanogo en mars 2012 qui a eu pour conséquence l’occupation du Nord du pays par des groupes rebelles et terroristes.
Dans un pays en quête de reconstruction eu égard à ses souffrances des derniers mois donc, les deux candidats ne sont cependant pas parvenus à se distinguer chacun au cours de la campagne électorale qui a pris fin vendredi conformément à la loi électorale, par un projet de société précis et un programme économique convaincant.
De fait, aux yeux des observateurs, le futur président malien pour les cinq prochaines années sera élu sur une base essentiellement sentimentale. Pour les 16 millions de Maliens parmi lesquels sont dénombrés 6,8 millions d’électeurs inscrits, l’événement n’est pas pour autant moins important.
En plus des 50 observateurs de l’UA, des 100 de l’UE et des 150 de la CEDEAO pour ne citer que ces trois organisations, sans oublier les délégations plus réduites de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), de l’Organisation de la Conférence islamique (OCI) ou encore de la Communauté des Etats sahélo-sahariens, le Pôle d’observation électorale qui regroupe en son sein 60 organisations de la société civile malienne déploie 2.100 observateurs à l’occasion de ce scrutin.
Cette entité se définit comme « une plateforme d’information entre les organisations de la société travaillant sur les élections pour renforcer la collaboration, le plaidoyer et rendre possible une réponse rapide et collégiale aux dysfonctionnements de la gestion du processus électoral ».
De son côté, l’ONG internationale Caritas a financé la confection des affiches aux messages qui encouragent à voter et prônent l’apaisement tels que « respecter les résultats de l’élection, c’est respecter le choix du peuple malien » et « faisons de l’élection présidentielle un moment fort de réconciliation nationale ».
A l’initiative du ministère de la Famille, de la Promotion de la femme et de l’enfant, en partenariat avec l’Union européenne, la Grande-Bretagne, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et l’ONU-Femmes, une « campagne d’éducation civique pour une participation accrue des femmes aux élections générales » a été organisée samedi dans les communes du district de Bamako dont la commune II où se sont rassemblées près de 200 femmes au stade communal.
Sur 21 000 bureaux de vote, 2 163 se trouvent dans la capitale qui se distingue comme la ville la plus peuplée du Mali et donc la plus grande circonscription électorale avec 1.049.728 électeurs inscrits et appelés à voter dans un total de 130 centres de vote, a rapporté à Xinhua Oumou Touré, un des coordinateurs de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) dans cette circonscription.
Pour exercer son droit de vote, la loi électorale de décembre 2011 impose à un électeur d’être inscrit sur une liste électorale et avoir une carte d’électeur biométrique baptisée NINA. A cause des difficultés à remplir ces deux conditions, peu de réfugiés maliens installés dans des pays voisins participent à l’élection.
Au Burkina Faso par exemple, sur environ 50 000 réfugiés recensés, seuls 88 avaient pu voter le 28 juillet, sur 930 noms retenus en dernier ressort sur la base des données du ministère de l’Intérieur parmi 3 500 électeurs initialement recensés par l’ambassade du Mali à Ouagadougou et représentant 20% de la population des réfugiés en âge de voter, a révélé Stéphane Jaquemet, représentant du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) joint par Xinhua.
Pour le second tour, 40 inscrits supplémentaires sont annoncés après que « quelques réfugiés ont réussi par eux-mêmes à avoir des cartes d’électeur », a précisé le responsable onusien.
La situation est semblable au Niger où à peine 300 réfugiés s’étaient aussi déplacés dans les bureaux de vote, sur 900 comptabilisés sur les listes, contre quelque 4 000 personnes recensées après avoir manifesté leur désir de voter parmi également une population d’ environ 50 000 réfugiés dont 7 000 dans la capitale Niamey, a renseigné à son tour Karl Steinecker, le représentant du HCR dans ce pays.
« Ce sera la même chose cette fois-ci », a prédit celui-ci.
Comme au premier tour, les bureaux de vote sur le territoire malien vont s’ouvrir officiellement à 8 heures locales jusqu’à 18 heures le soir, soit dix heures d’opération. Soumaïla Cissé a prévu de voter à 8h30 au bureau de vote de l’école fondamentale Mamadou Gondo du quartier Badalabougou de Bamako. Ibrahim Boubacar Keïta se rendra quant à lui à 10h au lycée Mamadou Sarr à Lafiabougou.
Xinhua