Usain Bolt porte un nom prédestiné. Oublions que le patronyme du sextuple champion du monde du 100 mètres sacré dimanche à Moscou peut signifier en anglais « boulon » ou « verrou » : ça ne fera jamais une manchette de Libé ni même la « une » de L’Equipe. Passons encore sur le fait que le verbe bolt signifie « déguerpir » et désigne un « départ précipité » (même si on ne peut s’empêcher de repenser au cataclysme qu’avait constitué le faux départ du champion aux mondiaux de Daegu il y a deux ans).
La traduction qui a retenu l’attention des journalistes en mal de jeux de mots, c’est celle de « bolt of lightning« , autrement dit « l’éclair ». L’homme le plus rapide du monde courant à la vitesse de la lumière : la métaphore a nourri des dizaines de titres de presse ces dernières années. Mais personne n’avait encore réussi à la fixer en image. C’est désormais chose faite.
Olivier Morin, photographe à l’AFP, est l’auteur du cliché qui restera comme la photo des Mondiaux d’athlétisme de Moscou : Usain Bolt, embarqué par sa foulée quelques mètres après la ligne d’arrivée, fend la nuit pluvieuse du stade Loujniki quand un éclair salue sa victoire et déchire un nuage noir.
Regardez la photo et visez haut, à droite où apparaît l’éclair
L’image est instantanément devenue virale sur les réseaux sociaux :
Déjà la photo de ces Mondiaux d’athlétisme ? Usain Bolt fait parler la foudre sur le 100 m à Moscou
Rue89 s’enflamme (« Que retenir du 100 m remporté par Bolt « l’Eclair » ? une photo sublime« ). Libération (par mégarde, pour se distinguer de la concurrence ou pour éviter de tomber dans la facilité ?) a choisi une autre photo et titré « Bolt l’éponge », en référence à la pluie qui a arrosé la course. Sur Twitter, certains rabat-joie ont aussitôt imaginé un vulgaire trucage :
Ni coup de génie ni photomontage. Olivier Morin a raconté à Dalyrelay.com l’histoire de ce cliché : un monumental « coup de bolt ». Comme à son habitude, le photographe, qui travaille pour l’AFP depuis vingt-quatre ans, a pris sa place habituelle dans le premier rang de la tribune réservée au photographes. C’est de là qu’il prend ses photos et déclenche à distance les cinq appareils disposés aux abords de la ligne d’arrivée (« remote camera »). « Il ignorait alors que mère nature lui enverrait de la lumière au moment opportun, lui permettant de prendre la photo de sa vie : le double éclair », écrit ce site consacré à l’actualité sportive.
Quand Bolt franchit la ligne, à 21 h 50, et établit le chrono le plus rapide de l’histoire sous la pluie en 9 s 77, Olivier Morin déclenche ses appareils à distance. Tandis que l’athlète fête sa victoire autour du stade en s’amusant avec la foule, le photographe fait défiler ses clichés sur son écran d’ordinateur. « J’avais édité toutes les photos de mes appareils à distance avant d’attaquer les dernières, celles du cinquième appareil. Je n’ai tout d’abord rien remarqué sur les vignettes. Je voyais seulement Bolt, car la taille d’affichage était trop petite. Je me suis dit : ‘OK, Bolt y est et il a l’air net.’ C’est seulement à ce moment que j’ai ouvert la photo et que j’ai fait ‘Waou. Il y a de la foudre ici !' », raconte-t-il.
« Il est difficile pour moi de parler de cette image, parce que c’est de la chance à 99 %. Je n’aurais pas pu l’anticiper. La seule chose dont je suis responsable, c’est le cadre et le moment du déclenchement. Le reste m’échappe totalement. Le dieu du climat était avec moi la nuit dernière », résume-t-il, en toute humilité.
Si l’on comprend bien, c’est Usain « Thunder » BOLT ??