Directeur de l’Institut national supérieur de l’Éducation populaire et du Sport (Inseps), le Professeur Djibril Seck donne son avis sur le dopage dans l’arène. Le spécialiste des sports de combat, accroché en marge du Congrès international (voir ci-dessous), dégage des pistes pour lutter contre ce mal qui gangrène le monde la lutte.
Professeur, le dopage dans l’arène prend de l’ampleur. Il y a lieu de s’inquiéter…
Mais il y a moins de 10 ans, une Dame, qui s’appelait Khar Niang, avait fait une thèse en Pharmacie sur ce qu’on trouve dans les produits que les lutteurs prennent dans l’arène. Il y a des produits qui sont prohibés au niveau olympique, au niveau du sport moderne. Maintenant ce qui semble faire l’actualité, c’est que les lutteurs de plus en plus sortent, vont en dehors du Sénégal pour se préparer. Ils ne se limitent plus à la préparation mystique traditionnelle qu’on fait à travers le tour du Sénégal pour voir les marabouts. Mais maintenant les lutteurs partent à l’étranger et quand ils reviennent les gens les voient se transformer. Quand ils partent à l’étranger, il y a du tout ce qu’on leur donne en protéines. Quand ils rentrent et qu’ils descendent dans l’arène ils étouffent au bout de dix minutes. Alors ça pose problème.
Justement, que faut-il faire pour endiguer ce mal qui gangrène le monde de la lutte ?
C’est à l’autorité de moraliser. C’est tout un cadrage avec des acteurs et par rapport à un système. On a parmi les lutteurs, ceux qui ne font que la lutte simple Cedeao, ceux qui font de la lutte olympique et il y a la lutte avec frappe ou sport de chez nous. Mais comme je vous l’ai dit, il y a un cadrage à faire. Et c’est à la structure en charge de gérer la lutte de prendre ses responsabilités en trouvant les bonnes approches.
Il y a pourtant le Comité national de lutte contre le dopage…
Pour une telle structure, il y a des composantes : les cadres, administratif, technique, juridique et les ressources. Il faut savoir qu’un contrôle anti-dopage correct c’est beaucoup d’argent. Les laboratoires d’analyses, il n’y en a pas un au Sénégal. Le plus proche est en Tunisie. C’est donc un long processus qui demande beaucoup de moyens…
En clair, on risque d’attendre longtemps pour que le Comité anti-dopage puisse être fonctionnel ?
Toutes ces formes de dopage, surtout les formes qu’on voit et qui semblent les plus élémentaires, entraînent immédiatement à très court terme des effets secondaires qu’on peut déceler très vite.
Le Comité peut prendre des raccourcis par la mise en place très vite des éléments qui détectent des indicateurs qui permettent d’interpeller les acteurs. D’autant plus que, n’oubliez pas : les structures autorisées à faire la visite médicale sont accréditées par le Cng. Il y a donc déjà deux ou trois premiers verrous, qui permettent de faire du tri là-dedans. Maintenant c’est la lourdeur du processus qui pose problème. Je pense que l’autorité peut tout de suite énoncer deux ou trois règles qui permettent en cas de suspicion de voir ce qu’il en est et faire des enquêtes. Quand on voit un lutteur prendre 15 à 20 kg, gonfler en mois de deux ou trois mois ça n’existe pas. Même dans le gavage des oies et des vaches, ça n’existe pas ! Et tout de suite, il y a des effets secondaires. C’est tout un problème d’organisation et de méthode.
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