Exclusif. Le président de la transition guinéenne, le général Sékouba Konaté, a livré à jeuneafrique.com ses impressions et sa vision du scrutin présidentiel du 27 juin, quelques heures à peine après avoir lui-même voté.
Dimanche, après avoir glissé son bulletin dans l’urne, le général Sékouba Konaté est resté une partie de l’après-midi devant son écran de télévision, dans sa résidence privée de Taouyah, en compagnie de quelques proches. Alors que des milliers de Guinéens faisaient encore la queue devant les centres de vote (plus de 8 000 à travers le pays), il zappait entre les chaînes d’information.
Attentif à tous les commentaires des journalistes, des candidats et surtout des populations, c’est à peine s’il se laissait distraire par les apparitions de soldats enthousiastes venus le remercier de leur avoir permis de voter en exhibant un index taché d’encre noire indélébile, preuve de leur devoir accompli. « Général, tout ça, c’est grâce à vous. Vous resterez dans l’histoire ! »
« Vous avez tenu parole : nous sommes fiers et heureux d’avoir voté aujourd’hui. » Bénédictions et compliments fusent. Le « Tigre » (surnom provenant de son ardeur au combat) est plutôt détendu. Lui-même a voté, à midi, au palais Sékoutoureya, en même temps que plusieurs autres officiers.
Jeuneafrique.com : Ce 27 juin, comme beaucoup de vos compatriotes, vous avez voté. Que représente ce geste pour vous ?
Sékouba Konaté : Ce geste est celui d’un citoyen et d’un patriote. Je n’avais jamais voté auparavant. C’est une élection libre. C’était donc important que je vote.
Les militaires se sont massivement rendus aux urnes. Comment expliquez-vous leur engouement ?
Ils ont compris le sens de la démocratie. C’est aussi une garantie de leur engagement à respecter les futures institutions. Ils savent que la Guinée doit passer à autre chose.
Les résultats tomberont dans les prochains jours. Quel comportement attendez-vous des populations et des candidats ?
Je leur demande de respecter le verdit des urnes et de veiller à préserver la paix dans notre pays qui a déjà connu trop de martyrs.
Lors de la rencontre du 26 juin avec les 24 candidats à la présidentielle, vous avez dit que vous ne vouliez pas de guerre fratricide. Ce risque est-il réel ?
Les leaders se sont battus pour la démocratie. Nous sommes tous des Guinéens. Nous sommes ensemble. La paix est essentielle.
Lorsque vous vous êtes engagé, le 15 janvier 2010 à Ouagadougou, à organiser des élections, beaucoup n’y ont pas cru. Vous venez donc de remporter une victoire…
À Ouagadougou, je considère qu’on m’a confié une mission, mais c’est la Ceni (Commission nationale électorale indépendante) qui a proposé la date et organisé ces élections. Moi, je n’ai fait que suivre. C’est donc une victoire pour la Ceni, pour le gouvernement de transition, et pour moi-même. C’est une victoire collective.
Vous n’en tirez aucune gloire personnelle ?
Je suis fier, mais je suis quelqu’un de modeste. C’est mon éducation. Et je suis musulman croyant et pratiquant. C’est ce que ma religion m’enseigne. En plus, quand on ne fait pas ce qu’on dit, Dieu n’aime pas ça.
Mais vous avez quand même un sentiment de devoir accompli ?
C’est comme au combat. Quand je suis à trente kilomètres d’une position et qu’on me donne pour mission de me diriger vers cette position, quand j’y arrive, c’est que j’ai réussi. C’est la même chose. J’ai agi en soldat.
Que ferez-vous après l’investiture du nouveau président ?
L’homme propose, Dieu dispose.
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