Vingt-quatre ans. Une éternité. L’Allemagne aura dû ronger son frein pendant deux décennies jusqu’à l’obtention de son quatrième titre en Coupe du monde, dimanche 13 juillet, en finale du Mondial 2014. Une consécration qui récompense une profonde remise en question entreprise depuis les années 2000.
Sortie en quarts de finale du Mondial 1998, la Mannschaft avait surtout sombré deux ans plus tard, éliminée abrutement dès les phases de poules de l’Euro 2000. Deux défaites et un match nul en trois matchs. Une infamie pour le triple champion d’Europe (1972, 1980, 1996) Au pied du mur, les responsables du football allemand ont pris les choses en mains à partir de ces piètres résultats.
« A ce moment-là, nous avions envoyé tous les entraîneurs de la fédération en observation à l’étranger pour repérer ce qui fonctionnait bien et ce dont on pourrait à notre tour tirer profit », explique au Monde Helmut Sandrock, le secrétaire général de la DFB, toute-puissante organisation qui compte plus de 2 millions de licenciés.
Parmi les pays visités, l’exemple des Pays-Bas et de la France marque les esprits. « En 2000, lorsque nous avions touché le fond, nous avons pris pour modèle la France et également les Pays-Bas pour relancer notre politique de formation. Nous avons compris que chaque club devait se doter d’un centre de formation pour favoriser le développement de nos jeunes joueurs », indique Erich Rutemöller, formateur au sein de la Fédération allemande de football (DFB).
« INVINCIBLE PENDANT DES ANNÉES ! »
Alors à la tête du centre de formation de Stuttgart, Peter Zeidler se rappelle : « Quand les gens de la DFB sont allés en France, ils ont compris l’importance de la formation. Ils voyaient que dès l’âge de 15 ans, les Français s’entraînaient sept à huit fois par semaine, deux fois plus que les Allemands du même âge. Du coup, nous aussi, on s’est entraîné plus, on a doublé le travail. » Pour le technicien allemand, cette prise de conscience de de la préformation à la française a participé à l’amélioration du niveau technique des jeunes joueurs outre-Rhin.
« Avec huit séances par semaine, forcément, vous avez plus le temps de travailler vos gammes », poursuit l’entraîneur qui a vu passer Stuttgart Sami Khedira, joueur cadre de l’Allemagne, forfait pour la finale en raison d’une blessure à l’échauffement. « Cette expérience nous a permis de comprendre que le mental ne suffisait plus. Il faut également une bonne technique et bien sûr, une vraie réflexion tactique. On ne peut plus se contenter de jouer avec un libéro et deux stoppeurs en marquage individuel », poursuit Zeidler.
Champion du monde sur le banc de la Mannschaft en 1990, Franz Beckenbauer s’exclamait à l’époque : « L’Allemagne sera invincible pendant des années ! » L’optimisme du Kaiser, aussi champion du monde comme joueur en 1974, s’expliquait par l’arrivée imminente des joueurs issus de l’ex-RDA. Finalement, un seul joueur originaire d’Allemagne de l’Est figure aujourd’hui dans l’effectif champion du monde.
Il s’agit de Toni Kroos. Comme ses jeunes coéquipiers – l’équipe a 26 ans de moyenne d’âge – le milieu de terrain formé à Rostock puis au Bayern Munich, né en 1990, a tiré profit de la révolution observée dans le football allemand.
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