Le débat sur la demande de renvoi du procès fait feu. A cause de l’indisponibilité de leur client, les avocats de Bibo Bourgi ont introduit la requête auprès de la cour, espérant obtenir gain de cause. Pour les avocats de l’Etat, l’absence du prévenu ne constitue nullement une entrave à la poursuite du procès. Reste à savoir ce qu’en pense la Cour qui doit se prononcer sur la question aujourd’hui.
La non-comparution de Ibrahima Khalil Bourgi pour raisons médicales est en train de donner un nouvel élan au procès de Karim Wade. Le présumé complice se confirme en effet, comme l’élément clé du puzzle qui devra permettre de faire émerger la vérité dans cette affaire d’enrichissement illicite. Les avocats de Bibo, par la voix de Me Pape Leyti Ndiaye, ont enclenché ce débat sur la demande de report du procès, en formulant leur recours. Ainsi, Me Ndiaye argumente : «Cette demande de report est un hymne à la vie. Et j’apprends avec une certaine émotion que Bourgi est considéré comme un malade imaginaire par l’opinion. A vrai dire, les rapports du 3 et 4 août derniers établissent clairement l’impossibilité pour mon client de comparaître devant la Cour et la nécessité de le transférer en France pour se faire soigner», souligne l’avocat.
Depuis cette date, aucun autre examen n’a pu contredire les précédents rapports médicaux et on peut difficilement trouver une situation plus urgente que celle-ci, selon Leyti Ndiaye. Et de poursuivre : «Bibo doit respecter deux rendez-vous. L’un avec la justice et auquel il ne veut pas se soustraire. Et l’autre rendez-vous est celui de la vie qui prime sur tout».
Me Baboucar Cissé, un autre avocat de Bibo, est revenu sur l’article 398 du Code de procédure pénale. Il estime qu’il y a une mauvaise lecture de cet article, qui permet au prévenu pour une infraction passible d’une peine d’amende ou d’une peine d’emprisonnement inférieure à un an, par lettre adressée au président, de demander à être jugé en son absence. Et puis Me Cissé explique que son client n’a jamais demandé à être représenté. Il rapporte les propos de l’intéressé Bibo Bourgi lors de l’audition de la cour dans sa chambre de clinique. Ce dernier disait, d’après l’avocat : «On m’a tout dit dans la presse alors que vous-même pouvez constater que je suis malade.»
Pour sa part, le procureur spécial près la Crei s’est aussi prononcé sur la demande de renvoi. Mais en empruntant le revers de l’argumentaire des avocats de la défense. Il a notamment évoqué l’article 403 pour justifier l’audition effectuée par la Cour à la clinique pour interroger le présumé complice de Wade-fils. Cet article permet en effet à la Cour d’entendre un prévenu en dehors du Tribunal, selon les dispositions de la loi. Pour lui, «toutes les formalités requises de la part de la Cour, aux fins de respecter l’article 403 du Code de procédure pénale ont été remplies.» Par conséquent, le procureur spécial juge l’attitude de la Cour conforme au droit et il n’estime point l’absence de Bourgi comme une entrave à la poursuite du procès.
Par ailleurs, la partie civile et les avocats du principal mis en cause ont rivalisé en éloquence et dans l’argumentation pour justifier leurs positions respectives. Et lorsque Me Yérim Thiam prend la parole pour manifester son approbation par rapport au propos du procureur spécial, les avocats de Karim Wade, en l’occurrence Me Amadou Sall, Me Souleymane Ndéné Ndiaye et compagnie se sont livrés à une critique acerbe de la cour. Ils dénoncent l’attitude de cette dernière qui selon eux, semble tergiverser sur les moyens à mettre en œuvre pour la tenue d’un procès équitable et transparent. Parmi les conditions essentielles, les avocats de Wade-fils évoquent la nécessité de renvoyer le procès pour que le sieur Bourgi aille recouvrer sa santé pour revenir dans de meilleures dispositions.
De toute façon, la Cour s’est réservé le privilège de suspendre la séance. Tout en promettant de donner son verdict sur la question du renvoi de ce procès aujourd’hui même.
Le Quotidien