*La Raddho et Amnesty parlent de réaction «disproportionnée»
*Le Conseil de la jeunesse va constituer un pool d’avocats pour la famille Sarr
Suite au malheureux incident, qui s’est déroulé lundi dernier à Soumbédioune, l’Etat du Sénégal a envoyé hier une délégation auprès de la famille éplorée. Ces autorités, venues présenter des condoléances au nom du président de la République, ont promis à la famille de faire toute la lumière sur cette affaire dans les plus brefs délais.
Une délégation du gouvernement sénégalais s’est rendue, ce mercredi, chez la famille du défunt Moustapha Sarr, tué lors des incidents entre les agents du parc des îles de la Madeleine et les pêcheurs de Soumbédioune. La délégation était composée du Premier ministre, Souleymane Ndéné Ndiaye, du président du Sénat, Pape Diop, du sénateur Ahmet Bachir Kounta et du président des agents des Eaux et Forêts, Mame Balla Ngom.
C’est vers 11h 30 que le chef du gouvernement et ses compagnons sont arrivés sur les lieux devant une population venue nombreuse présenter ses condoléances. Bien accueillis par la famille du défunt, le sénateur Ahmet Bachir Kounta s’est prononcé en premier lieu : ‘Rendons grâce au bon Dieu. Nous regrettons ce qui s’est passé. Nous sommes venus au nom du président de la République présenter nos condoléances et condamner l’acte. Seulement, il faut toujours se soumettre à la volonté de Dieu, il est le tout puissant et c’est à lui de décider’.
Après avoir entendu ces propos, le Premier ministre a pris la parole pour présenter ses condoléances à la famille éplorée. Abondant dans le même sens, Souleymane Ndéné Ndiaye, d’un ton timide et regrettable, lance : ’Le président nous a envoyé pour vous dire qu’il est très touché par cet incident. Il ne l’a pas voulu ainsi. Il condamne fermement l’acte et demande au ministre de la Justice de faire très rapidement la lumière sur cette affaire et de prendre des mesures idoines pour que ces genres incidents ne se reproduisent plus’. Et selon Souleymane Ndéné Ndiaye, l’Etat a voulu dès le premier jour envoyer une délégation, mais c’est par mesure de sécurité qu’il a été décidé de laisser le temps aux jeunes pêcheurs de retrouver leur sérénité.
Prenant la parole, le président du Sénat soutient qu’il fait partie de la famille. ’A chaque fois que je faisais un appel politique, Moustapha Sarr faisait partie des personnes qui répondaient en premier lieu. C’est pour dire donc que je partage avec vous ses moments de douleur’, avoue Pape Diop qui ajoute : ‘J’avais entamé bien avant cet incident des démarches pour que ces agents du parc puissent libérer les matériels des pêcheurs qu’ils avaient déjà confisqués. Je compte poursuivre ces démarches et apporter une solution à ce problème’.
Après avoir bien écouté ses autorités, l’aîné de la famille éplorée, Doudou Sarr, rétorque : ’Nous saluons votre présence et nous remercions aussi le président de la République d’avoir pris des décisions pour que justice soit faite. A votre retour, dites au président que nous n’avons que la mer pour survivre et que nos enfants ne peuvent pas laisser l’île. Ils ont préféré rester au Sénégal pour travailler au lieu d’aller immigrer. Nous demandons de raisonner ces agents du parc afin qu’on puisse pêcher dans la tranquillité’. Le frère du défunt, Maguette Sarr et le président de l’association de la baie de Soumbédioune, Assane Diop, s’inscrivent dans la même logique et réclament justice. Ils demandent à l’Etat du Sénégal de ‘régler ce problème avant qu’il ne soit trop tard’.
Ndéné BITEYE (Stagiaire)
WALF.SN
La Raddho et Amnesty International – Sénégal condamnent : ‘La réaction des agents est très disproportionnée par rapport à l’acte’
La Raddho et la branche sénégalaise d’Amnesty International s’indignent de la mort de Moustapha Sarr, pêcheur de 25 ans, suite à un accrochage avec les agents des Eaux et forêts. Les organismes de défense des droits de l’homme jugent la réaction des agents ‘disproportionnée’.
La Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Raddho) et la branche sénégalaise d’Amnesty International ont exprimé leurs indignations, hier, à la suite de la mort par balles du jeune pêcheur, Moustapha Sarr, survenue le 5 juillet dernier aux larges de Soumbédioune. Dans un communiqué diffusé hier, les deux structures condamnent vigoureusement cet acte, jugé ‘irresponsable de l’agent des Eaux et forêts’.
S’appuyant sur les informations recueillies par une équipe de la Raddho, ils considèrent que ‘la réaction des agents est très disproportionnée par rapport à l’acte consistant à pêcher dans une zone interdite’. Les organismes pour la défense des droits de l’homme, basés au Sénégal, estiment que ‘les agents disposent d’autres moyens pour sanctionner les pêcheurs qui s’adonnent à des activités dans cette zone’.
Les deux structures ne se sont pas limitées à décrier le comportement des agents des Eaux et forêts. Elles ont désapprouvé le saccage des locaux de la direction des parcs nationaux. ‘Nous invitons les populations de Soumbédioune et de la Gueule Tapée à faire preuve de tolérance et de dépassement pour éviter d’envenimer la situation’, lit-on dans le communiqué transmis mercredi.
Pour un retour à la paix, La Raddho et Amnesty exigent l’ouverture d’une enquête judiciaire en vue de situer les responsabilités et de sanctionner les auteurs. Elles invitent les autorités étatiques à trouver une solution définitive à cette relation conflictuelle qui a toujours existé entre les gardes côtiers et les pêcheurs.
Le lundi 5 juillet dernier, des échauffourées ont éclaté entre forces de l’ordre et pêcheurs de Soumbédioune, suite à la mort d’un des leurs, le jeune Moustapha Sarr, 25 ans. L’incident a eu lieu en mer aux alentours des îles de la Madeleine (sur la Corniche ouest de Dakar), où Moustapha Sarr et ses camarades s’étaient rendus pour chercher des fruits de mer. Sur place, ils auraient été interpellés par les gardes côtiers qui voulaient confisquer leur matériel de pêche au motif qu’ils exerçaient dans une zone interdite. A la suite des discussions, un agent aurait tiré à bout portant sur Sarr, capitaine de la pirogue.
Selon la Raddho et Amnesty Sénégal, cette bavure rappelle l’affaire Dominique Lopy, le jeune Koldois décédé dans les locaux du commissariat central de Kolda durant sa garde-à-vue le 14 avril 2007.
Pour défendre les intérêts de la famille : Le Conseil national de la jeunesse va constituer un pool d’avocats
‘L’Etat doit faire la lumière sur l’affaire du meurtre du jeune pécheur, Moustapha Sarr. Car, nous ne pouvons tolérer que ce genre d’acte reste impuni’, lance d’emblée le président du Conseil national de la jeunesse, Me Aliou Sow. Pour ce dernier, qui faisait face à la presse hier, les autorités doivent tout mettre en œuvre pour gérer cette situation qui risque de déboucher sur une bombe sociale.
‘Il est inconcevable qu’un jeune soit tué dans l’exercice de sa profession avec une arme à feu. A notre avis, quel que soit le différend, qui l’opposait à l’agent forestier, les moyens de défense utilisés n’étaient pas les mêmes, car le jeune pêcheur ne détenait pas d’arme à feu’, se désole le président du Conseil national de la jeunesse.
Ainsi, Me Aliou Sow déclare que sa structure, qui œuvre pour la protection et la défense des jeunes, n’est pas en mesure de tolérer ce genre d’acte qu’il qualifie d’’irresponsable’. ‘Nous allons soutenir la famille du défunt, en mettant à sa disposition une équipe d’avocats chargés de défendre ses intérêts’, annonce-t-il.
Paule Kadja TRAORE
Walf.sn