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Une nouvelle vague de start-up débarque au Sénégal

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Pour financer la prise de risques et obtenir les précieuses liquidités que les banques locales, trop timorées, refusent de leur consentir, les jeunes start-up sénégalaises pourront demain compter sur un nouvel allié. Il s’agit de Teranga Capital, le premier fonds d’amorçage sénégalais qui vient de lever 3 milliards de francs CFA pour soutenir les entrepreneurs.
Le fonds réalisera ses premiers investissements à partir de la rentrée de septembre. Sur le front de l’accompagnement, la création de nouvelles structures visant à épauler les entrepreneurs sénégalais dans leur parcours du combattant est en vogue.
Inaugurée à Dakar en juin dernier, un nouvel incubateur, la Cofina Startup House, commencera à accompagner plusieurs jeunes start-up sur 12 mois à partir de la rentrée de septembre. Son initiateur, la Compagnie financière africaine, apportera son expertise en financement aux porteurs de projets sélectionnés.

Pour les acteurs historiques de la scène tech sénégalaise, l’heure est aussi à la croissance. Espace de coworking pionnier au Sénégal et en Afrique, Jokkolabs, fondé en octobre 2010, élargit progressivement sa communauté de coworkers à l’ensemble du continent. Après Cotonou au printemps 2015, Jokkolabs posera bientôt ses valises à Casablanca où il s’apprête à dévoiler son plus grand espace africain.
Des centaines de mètres carrées dédiées à la cocréation, nichées au cœur des immeubles modernes du Casablanca Technopark. Quatre années après avoir vu le jour en 2011, l’incubateur numérique CTIC Dakar prépare sereinement son passage à l’échelle, avec la bénédiction de l’Etat sénégalais et le soutien d’entreprises privées.
A l’étroit dans ses locaux vieillots situés deux pas de la bruyante place de l’Indépendance, le CTIC Dakar triplera de taille dès l’automne 2015. Mis à disposition par la puissance publique, plusieurs immeubles administratifs alentours seront rénovés dans les prochains mois pour accueillir comme il se doit plusieurs dizaines de nouvelles start-up ainsi qu’un pôle d’innovation dédié à l’entrepreneuriat culturel, en partenariat avec la Gaîté lyrique, un espace de création et de cultures numériques parisien.

Enfin, c’est avec le soutien financier décisif de la Banque mondiale que le CTIC lancera dans quelques semaines un nouveau programme d’accélération numérique visant à former à Dakar plusieurs promotions successives de développeurs sénégalais et africains, en partenariat avec plusieurs incubateurs technologiques du continent.
Plongée en immersion dans la scène tech locale, en posant notre regard sur trois nouvelles start-up sénégalaises rencontrées récemment à Dakar et qui ont été fondées au début de l’année 2015.

DrLinkup se rêve en Facebook de la santé

Etudiante en 7e année de médecine aux Etats-Unis, Caamo Kane y a contracté le virus de l’entrepreneuriat. De retour au Sénégal, à Dakar, elle décide de lancer DrLinkup, le premier réseau social privé sénégalais et africain exclusivement réservé aux médecins.
« DrLinkup donne la possibilité aux médecins de discuter entre eux et d’échanger sur les sujets brûlants de l’actualité médicale. Par exemple en organisant des débats sur les dernières innovations, les dernières applications mobiles pour se prémunir du virus Ebola. Ou en réalisant des revues de presse tirée de la littérature médicale internationale, pas forcément accessible à tous. »
Lire aussi : BRCK, une petite boîte pour être connecté sur toute la planète (11/14)
En ligne depuis seulement deux mois, la plate-forme a déjà attiré près de 150 professionnels de santé. Un début de traction que Caamo Kane entend amplifier, à condition toutefois qu’elle puisse obtenir le bon accompagnement : DrLinkup vise au moins dix fois plus d’inscrits d’ici 2016.
« Nous voulons faire participer jusqu’à 3 000 médecins africains à nos débats en ligne, et ainsi les aider à mieux prendre en charge leurs patients ».
C’est pour atteindre cette croissance que la jeune start-up de l’e-santé a poussé la porte de l’incubateur CTIC Dakar, notamment pour profiter à plein du pool de talents gravitant autour de l’incubateur technologique :
« Nous avons rencontré et travaillons aujourd’hui en partenariat avec une start-up également incubée au sein CTIC Dakar qui nous aide dans l’exécution du projet. Elle possède des compétences que je n’ai pas le temps d’acquérir. Cela me permet de gagner énormément de temps et de rester concentré sur l’acquisition et la rétention de nouveaux utilisateurs ».
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Consciente du potentiel et face à un marché qui ne demande qu’à être stimulé, Caamo Kane confiera qu’en complément de la plate-forme DrLinkup, un MOOC est déjà en chantier… ainsi qu’une websérie médicale pour viraliser sur les réseaux sociaux.
Cross Dakar City, un jeu video mobile « made in Sénégal »

Le triste spectacle se répète jour et nuit. Sur la Corniche, lorsque le feu passe au rouge, il n’est pas rare de voir des petits groupes de jeunes enfants s’agglutiner autour des voitures pour mendier quelques centaines de francs CFA en prenant des risques inconsidérés.
A Dakar, ils seraient entre 30 000 et 50 000 « talibés », ces enfants des rues inscrits dans les écoles coraniques, soumis à la mendicité forcée et livrés à eux-mêmes. Ce sont souvent aussi les premiers à se faire faucher sur la route : il y a quelques jours à peine, le 14 juillet, deux jeunes talibés ont ainsi perdu la vie dans la région de Saint-Louis, au nord de Dakar, renversés par un véhicule.
C’est pour alerter ses compatriotes sur l’étendue de ce gâchis humain que le jeune entrepreneur sénégalais Ousseynou Khadim Bèye a conçu Cross Dakar City, un jeu vidéo pour smartphone à mi-chemin entre le serious game et le jeu d’arcade.

Cross Dakar City met en scène Mamadou, un très jeune talibé qui décide de briser les chaînes de la mendicité et de fuir son maître pour retrouver ses parents biologiques. Le jeune aventurier devra traverser tous les quartiers de Dakar en slalomant du mieux qu’il peut entre les célèbres taxis jaunes et noirs sénégalais et autres « cars rapides », ces mini-bus conduits par de fervents mourides.
A peine développé et mis en ligne, Cross Dakar City va bénéficier d’un bouche à oreille fulgurant au Sénégal mais aussi parmi la diaspora : en quelques jours, l’application sera téléchargée plus de 8 000 fois sur Android et iOS. Mais pour Ousseynou Khadim Bèye, ce succès doit d’abord permettre d’ouvrir les yeux sur le calvaire que vivent les talibés.
« Derrière le parcours ludique du jeune héros Mamadou, il ne faut pas oublier qu’il y a des milliers de jeunes talibés qui, au quotidien, risquent leur vie sur les routes sénégalaises. Cross Dakar City veut faire prendre conscience au plus grand nombre des dangers encourus par les talibés et nous obliger à changer notre regard sur ce phénomène ».
Tekci.co, le futur Ebay africain ?

Droit comme un i dans son grand boubou bleu pâle du vendredi, Alassane Sarr pose sur ses interlocuteurs le regard vif et brillant de ces entrepreneurs à la fois insouciants et optimistes. Car Alassane voit l’avenir en grand pour Tekci, la nouvelle plate-forme d’enchères en ligne qu’il s’apprête à lancer avec le soutien du CTIC Dakar, dont il vient d’intégrer le programme d’accélération. « Avec Tekci, nous digitalisons la pratique africaine du « waxalé », une forme de marchandage où ce sont les acheteurs qui fixent le prix. Nous avons donc construit une plate-forme de vente aux enchères qui relooke Ebay avec nos traditions, et où ce sont les utilisateurs qui proposent le prix qu’ils souhaitent payer. ».
Lire aussi : « Ubongo Kids », un dessin animé tanzanien à la conquête de l’Afrique
La « mission statement » de Tekci, pour employer le jargon de la méthodologie « Business Model Canvas » dont raffole Alassane, est de permettre aux Sénégalais d’acheter les derniers gadgets électroniques aux prix les plus bas, qu’il s’agisse de smartphones Samsung, de tablettes Apple et même des bracelets connectés.
« Dès qu’un produit est mis en ligne sur la plate-forme, les acheteurs doivent d’abord acheter un ticket d’entrée sous la forme de jetons, que nous vendons par SMS. Cette petite barrière à l’entrée permet d’écarter les utilisateurs fantaisistes au profit de ceux qui sont déterminés à acheter nos produits. Ensuite, à chaque fois qu’un acheteur veut enchérir sur une tablette iPad par exemple, il devra dépenser 4 jetons. Il définit ensuite lui-même le prix qu’il est prêt à payer pour cet iPad, le vendeur n’impose rien. A la fin de la vente, la plus forte mise l’emporte automatiquement, la livraison est gratuite et le paiement se fait en cash, à la réception comme cela se fait très souvent en Afrique ».
Encore en période de test, le premier prototype de Tekci a déjà permis d’organiser plusieurs ventes avec succès. Tandis que la communauté, qui compte déjà près de 200 vendeurs et acheteurs, continue de grossir chaque semaine. Une affaire à suivre…
Samir Abdelkrim
lemonde.fr

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