Banjul (Gambie), 22 juil 2015 (AFP) – Le président gambien Yahya Jammeh a gracié mercredi de nombreux condamnés, y compris à la peine capitale ou à perpétuité pour trahison, lors du 21e anniversaire de sa prise de pouvoir, à l’exception notable des participants à une tentative de coup d’Etat en décembre.
« Tous ceux qui ont été condamnés pour trahison entre 2013 et 1994 et sont dans le couloir de la mort ou purgent une peine à perpétuité sont à présent graciés », a-t-il déclaré dans un discours sur la place du 22 juillet, date du putsch sans effusion de sang qui l’a porté au pouvoir en 1994.
Parmi les condamnés graciés devraient figurer un ancien chef d’état-major du pays, le général Lang Tombong Tama, reconnu coupable avec sept autres personnes de trahison en 2010, quatre capitaines de l’armée condamnés pour tentative de renverser Yahya Jammeh en 2006, ainsi qu’un garde du corps du président, condamné en 2000 à 16 ans d’emprisonnement pour les mêmes motifs.
Cette mesure de clémence, que le chef de l’Etat, dans ce discours retransmis par la radio et la télévision a ordonné aux services pénitentiaires d’appliquer avant la prière musulmane du vendredi, ne bénéficiera en revanche pas aux suspects dans la tentative de coup d’Etat déjouée en décembre.
Le 30 décembre 2014, la garde présidentielle a repoussé un assaut d’hommes armés contre le palais présidentiel à Banjul, dirigés par des opposants gambiens établis notamment aux Etats-Unis, alors que Yahya Jammeh était en voyage à Dubaï.
Trois soldats ont été condamnés à mort et trois autres à perpétuité le 30 mars par un tribunal militaire lors d’un procès à huis clos pour cette tentative de coup d’Etat, selon Amnesty International et des sources militaires gambiennes.
« A compter d’aujourd’hui tous les citoyens convaincus de meurtre qui ont purgé au moins dix ans de prison sont graciés », a poursuivi M. Jammeh, excluant néanmoins les auteurs de certains faits divers particulièrement atroces, d’infanticide et de viol d’enfants.
« Tous les condamnés pour trafic de drogue douce ou de cannabis qui ont purgé au moins trois ans de prison sont graciés, à l’exception des récidivistes. Tous les condamnés pour trafic de drogues dures qui ont purgé au moins cinq ans sont pardonnés », a-t-il ajouté.
Dans un communiqué publié à l’occasion de cet anniversaire, Amnesty International affirme que « le climat de peur dans lequel vivent les Gambiens depuis plus de 20 ans s’est aggravé au cours des 12 derniers mois ».
« Des journalistes, des lesbiennes ou gays présumés et des personnes considérées comme des opposants au régime, ainsi que leurs familles, sont de plus en plus pris pour cibles par les autorités », selon l’ONG.
« La réaction violente qui a fait suite à la tentative de coup d’État de décembre 2014 s’est traduite par une forte hausse des arrestations arbitraires et des disparitions forcées », souligne-t-elle.
En outre, « le 17 juillet, le président Jammeh a annoncé la reprise des exécutions », trois ans après avoir décrété un « moratoire conditionnel » sur l’application de la peine capitale, s’inquiète Amnesty.
« En raison de la situation politique et économique on constate une nette hausse » du nombre d’émigrants, selon le texte, rappelant qu’un rapport européen cite le pays en 2014 parmi les six premiers d’émigration illégale vers l’Europe par mer, malgré une des populations les moins nombreuses de la région.
Yahya Jammeh dirige depuis 21 ans d’une main de fer la Gambie, petit Etat anglophone d’Afrique de l’Ouest enclavé dans le territoire du Sénégal, hormis sa façade atlantique.