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Face au projet monarchique du pouvoir : Les garde-fous Bleus se positionnent

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Ce n’est pas seulement au sein de l’opposition et de certains segments de la société civile que le projet de dévolution dynastique du pouvoir fait pousser des hoquets rageurs. Les vannes contestataires s’ouvrent aussi de plus en plus au sein du Parti démocratique sénégalais (Pds) où des Libéraux de souche poussent des urticaires

Ce n’est pas seulement au sein de l’opposition et de certains segments de la société civile que le projet de dévolution dynastique du pouvoir fait pousser des hoquets rageurs. Les vannes contestataires s’ouvrent aussi de plus en plus au sein du Parti démocratique sénégalais (Pds) où des Libéraux de souche poussent des urticaires et refusent, face à la volonté du Président Wade de céder le promontoire présidentiel à son fils Karim, d’être confinés à jouer en playback la musique enregistrée par la Génération du concret.

En contrepoids au projet de dévolution dynastique du pouvoir en marche feutrée mais maintenant difficilement masquée, on n’entendait de manière audible que les échos ef­farouchés de l’opposition et de certains segments de la société civile. Toutefois, comme en lame de fond, la mouvance présidentielle bruit de frêles esquifs contestataires et ré­fractaires – dont les contours se font de plus en plus précis – au projet que nourrit le Président Wade de se faire succéder par son fils Karim. La fronde silencieuse, mais agissante, est portée à l’intérieur même du Pds par des Libéraux de souche qui dé­ploient une stratégie objective à mê­me d’indiquer la ligne Maginot que Wade ne doit pas franchir, sauf à fai­re voler en éclats le Pds, en coa­chant sa succession par son propre fils. Des Libéraux pure laine, à l’instar de Idrissa Seck, Pape Diop, Aminata Tall, Ousmane Masseck Ndiaye, Oumar Sarr et, dans une moindre mesure, Pape Samba Mboup et Ousmane Ngom, adossés à une incontestable légitimité, eux qui ont traversé avec Me Wade, plus de deux décennies de souffrances et de privations dans l’opposition, n’entendent plus être des supplétifs réduits à applaudir les actes objectifs que le Président pose pour mettre en selle son fils. Ils se parlent, selon plusieurs confidences de Libéraux. Il n’est pas exclu d’ail­leurs que certains «légitimistes», si Wade s’obstine à céder la formation libérale à Karim, quittent ce parti pour se retrouver dans un Pds au­thentique, révèle un cacique du Pds.  «Nous ne pouvons quand même pas croiser les bras sans rien faire face à l’intrusion manifeste et parfois arrogante de la Génération du concret dans la vie et l’organisation du parti, alors que ni le règlement ni les statuts ne le leur autorisent», fait-il remarquer. C’est dire que la volonté, de plus en plus de phagocyter les structures du Pds au profit de Karim Wade et de ses amis de la Gc, rencontre une forte mais subtile résistance dans le camp même du pouvoir libéral.

CEUX A QUI LA «GC» DONNE LA NAUSEE
La farouche opposition de l’ancien Premier ministre Idrissa Seck au projet de dévolution monarchique du pouvoir ne souffre d’aucun doute. Il serait superflu de relater ici les tracasseries, les brimades puis l’incarcération accompagnée d’une mobilisation sans pareille de l’appareil d’Etat, des forces de l’ordre et de la Justice contre l’ancien n°2 du Pds, dans une fumeuse affaire des chantiers de Thiès, en vérité un baobab judiciaire qui cachait une tentative de mise à mort politique de l’un des plus sérieux prétendants à la succession de Wade. L’ambition présidentielle de ce dernier, malgré les vicissitudes, parfois stupéfiantes, dans ses relations avec Wade, n’a subi au­cu­ne ride. Idrissa Seck n’entend pas enterrer son ambition au profit de Karim Wade, même s’il a pu me­su­rer dans l’épreuve carcérale le prix qu’il en a payé et qu’il lui faudra en payer encore, au besoin.
Pape Diop, l’actuel président du Sénat, le potentiel dauphin transitoire et/ou temporaire du Président Wade, ainsi que le lui confère la Constitution, à moins d’une modification encore de la Loi fondamentale, a presque fermé la plaie née de l’uppercut électoral qu’il a subi lors des Locales de 2009 à Dakar. A lui, certains Libéraux, pas pure laine ceux-là, ont voulu faire porter le bonnet de l’échec du Pds à Dakar. Pis, ses frères ennemis auront tout tenté pour lui découper un linceul politique. En relais de Me Wade qui a voulu rejouer avec lui un scénario à la Mbaye-Jacques Diop, alors président du Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales?? Pourtant, dans l’entourage de Pape Diop, généralement sous le sceau de l’anonymat, la défaite aux Locales à Dakar a été plutôt imputée à la candidature de Karim et au malheureux projet du maire à l’époque de travailler à dégager le boulevard municipal pour Wade fils. Toujours est-il que Pape Diop a entrepris une «opération de reconquête de la ville de Dakar», avec des tournées de remobilisation de ses militants. Certes, ce libéral pur jus entonne souvent dans ses meetings l’exigence de réélire en 2012 la seule constante du Pds, le Président Wade. Cependant, dans son Quartier général à la Gueule Tapée où un Comité de relance de ses activités politiques bat le rappel des troupes, Karim Wade s’invite rarement dans les discours. Il n’y est question que du bi­lan de l’ex-maire de Dakar, de la réélection de Wade et de l’élargissement des bases du Pds. On n’y chaus­se pas des lunettes de la Génération du concret.

LA PREUVE PAR AMINATA TALL
Du point de vue de la revendication d’une part de l’hérita­ge politique de Wade, Aminata Tall n’a pas le regard fixé au sol. Elle peut relever la tête, elle qui a été de tous les grands combats du Pds. La «Dame de fer» libérale n’a jamais adopté, face au clan familial la posture de béni-oui-oui qui avale tout, du plus ridicule au plus désopilant. La preuve la plus récente que la Secrétaire générale de la présidence de la République n’est pas prête à se laisser usurper la légitimité à succéder à l’actuel locataire du Palais Léo­pold Sédar Senghor est la mise en orbite du mouvement dénommé And jappalé rewmi ak Aminata Tall (Ajra), dont l’objectif est de barrer la «route vers le sommet» à Karim Wa­de. A notre confrère de L’Ob­ser­va­teur paru le 30 juillet 2010, le coordonnateur de ce mouvement de sou­­tien, mis en place en 2009, con­fiait?: «A­près Wade, Aminata Tall doit se positionner pour diriger le pays.» Dans le même article, L’Observateur rappelait des propos éloquents de Mme Tall en septembre 2009, propos qui illustraient son aversion pour la transmission dynastique du pouvoir. Elle disait clairement ceci?: «Si l’histoire récente du Sénégal et l’expérience du changement intervenu en 2000 doivent nous apporter une leçon politique, elle serait : la carte d’électeur du citoyen sénégalais est devenue l’arme fatale et l’outil incontournable de toutes formes de succession du pouvoir au Sé­négal. L’hérédité est complètement différente de la légitimité politique. Karim a le droit de vouloir diriger le pays, mais qu’il fasse ses preuves et commence à la base comme l’a fait son père. Notre pays et sa démocratie ne peuvent plus être manipulés par des lobbyistes, fréquentant les lambris du pouvoir à l’Elysée ou à Matignon, avec de solides relations dans les médias dits africains basés à Paris, faiseurs de Présidents. Ces mercenaires d’un genre nouveau menacent la démocratie en Afrique. La période de la monarchie est révolue et si nous de­vons la rétablir, je doute que Me Wa­de ou Karim soient les mieux placés.»

ÇA SENT LA NAUSEE !
A quelques nuances près, beaucoup d’anciens Libéraux éprouvent un sentiment de nausée à l’idée de voir le parti pour lequel ils ont sué eau et sang être confisqué par des militants de la Génération du con­cret, à travers une opération de re­nouvellements, pilotée, pour reprendre l’expression d’un responsable Pds de souche, «par Farba Senghor, un agent de la Gc». Il l’accuse d’ailleurs, «dans le placement des cartes, de privilégier des proches de Karim à qui ils distribuent des lots importants, alors qu’à d’autres il dit que les cartes sont terminées». Une opération de placement de cartes dont d’ailleurs Pape Samba Mboup, qui a usé de ses entregents pour faire revenir d’anciens Libéraux, a suggéré récemment l’arrêt par crainte qu’elle n’accentue les divisions au sein du Pds en période électorale.
Face au projet de dévolution mo­narchique du pouvoir, il y a donc au sein même du Pds un flot contestataire qui monte. Il y a quelques res­ponsables et militants qui refusent de sacrifier tout esprit critique pour une allégeance aveugle qui mène à l’autodestruction. Pourquoi donc les Libéraux sensés succomberaient-ils à une telle perspective par la faute d’un clan familial qui usurpe leur légitimité ? Abdou Latif Coulibaly, dans un entretien paru dans Le Quotidien du samedi-dimanche 17-18 juillet 2010, n’avait pas sans doute tort en soutenant que «les vrais adversaires du projet dynastique sont à l’intérieur du Pds», car «si ce projet arrive à terme et marche, ils seront tous liquidés».

lequotidien.sn

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