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Enquête sur le combustible souillé de la Senelec: les vraies raisons des délestages

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Les explications de la Senelec allèguent que les longs et récurrents délestages sont dus à la mauvaise qualité du fuel. Les fournisseurs dégagent toute responsabilité et imputent celle-ci à la politique interne de la Senelec. D’après nos informations, à toutes les étapes de la procédure d’approvisionnement de combustibles, des contrôles réguliers sont effectués par des experts désignés par la Senelec pour garantir la sécurité de l’exploitation. La Senelec au courant des anomalies depuis le 25 juin dernier avec son partenaire fournisseur se sont déjà expliqués sur ces perturbations. La Gazette vous livre ici les vraies raisons des délestages.

La gazette a appris, de source digne de foi, que c’est le 25 juin 2010 que la Senelec a constaté une perturbation majeure sur l’ensemble des moteurs Diesel de son réseau. Ces graves perturbations ont entrainé des pertes de puissance progressive jusqu’à un arrêt total et complet des centrales A en croire nos sources, les premières manifestations se sont signalées à la société et à ses techniciens par des écarts de perturbation très élevés et une évolution très croissante de crans de combustibles qui se retrouvent souvent bloqués dans les machines alors que les charges étaient très faibles. Ces signes analysent, les experts sont caractéristiques, selon les techniciens de la Senelec, de la consommation du fuel de mauvaise qualité qui sont inadaptés aux machines de mauvaise qualité. Les constats faits ont été alarmants selon les indications de la Direction générale de la Senelec. Aussi bien à Bel Air (centrale 6) qu’à Cap des Biches (centrale 4) de tels phénomènes ont été observés. Ils se sont produits par un écart de température défavorable, une perte d’injecteurs (ressorts abimés), une perte de pression et un encrassement des vis des pompes d’injecteurs, un encrassement des filtres combustibles, une présence importante des boues au niveau des épurateurs, un stockage massif des particules solides dans les turbo compresseurs, une coloration jaune soufre dans tous les parois des chemins des gaz qui alimentent les chaudières et les parois de récupération et enfin un décapage de l’intérieur des parois des cuves qui ont été attaqués par un produit de type acide.

La centrale de Kahone qui n’a jamais présenté d’anomalies et qui avait un meilleur comportement présente actuellement les mêmes symptômes quand on a procédé sur la centrale à des injecteurs notamment sur les groupes 702 et 704. Cette situation explique les nombreux délestages, car elle a causé des pertes sèches de 100 méga watt. Selon nos sources, la Senelec a saisi dès le constat, le fournisseur du carburant en l’occurrence la société Itoc (International Trading Oil and commodities). La société nationale s’est plainte à elle et a relevé que la que la situation est non seulement préjudiciable pour la disponibilité de son parc et sa production mais a conduit, à postériori, à des dommages incalculables sur la tenue de la puissance des moteurs et sur l’ensemble des matériels.

INCOHERENCES

La Senelec avait invité son partenaire fournisseur à trouver avec elle les explications à ce phénomène, et surtout de l’aider à remédier à cette grave crise. Elle se réserve, faisait elle comprendre, de prendre toutes les dispositions pour garantir la sécurité de l’exploitation. Le fournisseur Itoc, selon des sources de la Direction générale de la Senelec n’a pas manqué de relever les incohérences dans la démarche de la Senelec et dégage toute responsabilité dans cette crise qui selon elle ne serait que la résultante d’une politique et d’une démarche propre à la Senelec elle-même.

Ainsi, à en croire nos sources, la Direction générale de la compagnie Itoc a fait observer de façon ferme que le pétrole vendu à la Senelec a été chargé à Houston aux Etats-Unis. Au moment du chargement, précisent nos sources, une inspection de qualité et de quantité a été effectuée avec la délivrance d’un certificat de qualité et de quantité et enfin d’un certificat d’origine. Toute cette procédure a été faite devant un représentant légal et certifié par elle-même. Une deuxième opération a eu lieu au port de déchargement de Dakar. Ce sont les inspecteurs nommés par la Senelec elle-même, en l’occurrence Sgs (Société générale de surveillance) qui ont procédé au contrôle technique. Il s’y ajoute que des prélèvements d’échantillons ont été effectués par des agents de la Sar désignés par la Senelec. Ces analyses techniques ont eu lieu dans le laboratoire de la raffinerie de Mbao. Les agents qui ont suivi ce dossier nous ont clairement indiqué que les résultats de leurs analyses sont entre les mains de la Direction générale de la Senelec.

Mieux, précisent nos sources, un tableau comparatif des analyses effectuées aux Etats-Unis et au Sénégal a été dressé pour le compte des autorités de la Senelec. Il a ainsi été constaté que le cabinet Caleb Brett, le cabinet américain qui a analysé le produit au moment du chargement et la Sgs ont abouti au même résultat qui confirme la qualité irréprochable du brut importé et livré à la Senelec. Le fournisseur décline d’autant plus sa responsabilité qu’il est précisé dans le contrat qui le lie à la Senelec que les qualités précisées et le produit déclaré confirmés par l’inspecteur indépendant au déchargement délitent le vendeur de toute responsabilité quant au stockage et à l’utilisation du produit.

Toutefois, l’acheteur dispose d’un délai de trois mois après le déchargement du produit pétrolier mais uniquement sur la base des échantillons prélevés et mis sous-scellés par l’inspecteur au déchargement. Autrement dit, elle ne peut contester la qualité du fuel importé que sur la base des échantillons qui ont été contrôlés et mis sous-scellés. Selon des experts pétroliers, les problèmes des centrales de la Senelec sont liés certainement aux périodes de tolérance admissible à l’entretien des moteurs dans ses centrales. Les experts fondent leur raisonnement sur le fait que la même quantité de fuel a toujours été livrée à la société d’électricité depuis le début de la mise en exécution du contrat qui le lie à Itoc.

Nos sources manifestent des craintes réelles au regard de la tournure de la crise actuelle quant à la sécurisation de l’approvisionnement du pays en fuel. Leurs inquiétudes procèdent d’un constat : les clauses contractuelles de livraison de fuel signées entre Itoc et la Senelec prévoient qu’avant chaque déchargement de bateau des traites avalisées servant de moyens de paiement des cargaisons livrées doivent être remises aux fournisseurs. Or depuis le 18 juin 2010, sur environ 10 milliards de paiement exigés, la Senelec n’a donné à son fournisseur que 4,8 milliards Cfa. Pourtant, cette défaillance n’a pas empêché un déchargement additionnel de 6000 tonnes de brut par Itoc qui sont consignées à la Sar.

OU SONT PASSES LES 21 MILLIARDS

Au regard du contrat qui lie Itoc à la Senelec, d’après des explications fournies par des cadres de la société, six cargaisons ont déjà été livrées à la Senelec. Pourtant, la facture de la première cargaison débarquée qui remonte en mars 2010 n’a été réglée qu’en juillet. Dans ces conditions, on peut se demander, où sont passés les 21 milliards qui ont été débloqués pendant la Coupe du monde.

La Senelec ne respecte pas ses engagements contractuels et de nombreuses distorsions financières sont souvent constatées dans le paiement des cargaisons livrées par ses fournisseurs. Même certains d’entre eux (fournisseurs) lui accordent des crédits fournisseurs qu’elle peine à rembourser souvent. C’est le cas d’un crédit de 8,5 milliards Cfa qui lui a été octroyé par Itoc pour une période de deux ans remboursable en 8 (huit) trimestrialités.

Si toute la politique de la Senelec n’est pas révisée et encadrée dans une cohérence d’ensemble, le pays risque de ne plus recevoir de carburant d’aucun fournisseur. Si une telle situation devait se présenter, il ya fort à parier expliquent de nombreux experts interrogés, « que le pays s’embraserait ».

Aliou NIANE et Alioune Badara COULIBALY
lagazette.sn

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