Serigne Mbacké Ndiaye voit dans la sortie du Ps contre le nouveau président du Conseil constitutionnel, Cheikh Tidiane Diakhaté, (voir notre édition de ce week-end) une manière de préparer l’opinion à la défaite de l’opposition en 2012. Aussi, le porte-parole de Wade revient dans cette interview sur le débat controversé sur la candidature de son patron.Entretien !
Wal Fadjri : Comment avez-vous accueilli les arguments de juristes, disqualifiant Wade pour la présidentielle de 2010 ?
Serigne Mbacké NDIAYE : C’est l’année dernière, il y a déjà un an que le président Wade a déclaré sa candidature à l’élection présidentielle de 2012. Mais depuis lors, personne n’en a parlé. C’est seulement maintenant que certains commencent à disserter sur la question, sous prétexte que la Constitution ne lui permet pas une nouvelle candidature. Sur ce plan, les choses sont assez claires, la Constitution a été votée au moment où le président Wade exerçait son premier mandat. Or, il y a un principe universel qui est qu’une loi n’est jamais rétroactive. Ceux qui agitent cette question le font pour des raisons politiciennes. Ils savent que quel que soit le cas de figure, ils seront battus par le président Wade en 2012. Ils savent qu’ils n’auront pas de candidat à l’élection présidentielle comme ils l’avaient promis aux Sénégalais.
Ces derniers ont bâti leur coalition autour de Bennoo. Ils ont travaillé autour de la candidature unique et disent d’ailleurs que s’ils ont gagné certaines localités le 22 mars, c’est parce qu’ils étaient dans le Bennoo. Cela veut dire que sans candidat unique, ils perdent l’élection de 2012. Mais même s’ils avaient un candidat unique, ils seront battus à plate couture. Ils feraient mieux de chercher à régler leur propre problème dans leur propre camp que de s’attaquer à la candidature de Wade. Si, comme ils le disent, ils sont majoritaires dans ce pays et que les Sénégalais ne veulent plus du président Wade, le fait que ce dernier soit candidat ne doit pas leur poser un problème. Qu’ils choisissent leur candidat et le battent en 2012.
Mais sachant qu’ils ne peuvent pas le battre parce que n’ayant pas de candidat capable de s’opposer à lui, ils agitent cette question (soutenant que Wade ne peut pas se présenter en 2012) pensant qu’elle va nous perturber ou poser un problème au niveau de l’opinion. Mais cela ne nous dérange pas du tout et nous n’allons jamais parler de cette question. C’est seulement par respect aux journalistes et aux Sénégalais que nous répondons à ces interrogations. Le plus important pour nous, c’est d’avoir un candidat qui rassure tout le monde, qui a un bilan que nous pouvons défendre partout (…).
Pensez-vous vraiment que le chef de l’Etat pourra briguer, à son âge, un troisième mandat ?
Il faut que le débat soit plus sain. Parce que ceux qui en parlent, évoquent également l’âge du président mais (ils) n’osent pas aller jusqu’au bout de leur raisonnement. Il faut que les gens soient courageux. On ne peut pas disserter sur la santé, sur la vie des gens. On a vu des bébés, des jeunes de vingt ans mourir tout comme on a vu des personnes âgées, comme par exemple un grand homme religieux de ce pays, qui nous a quittés, alors qu’il avait 118 ans. Malgré cet âge, cet homme vaquait à ses occupations quotidiennes. Nous qui travaillons avec le président Wade et ceux qui le rencontrent assez souvent savent qu’il est en forme.
J’ai la cinquantaine, mais je ne peux ni lire ni écrire sans correcteur. Mais le président, malgré son âge, lit et écrit sans porter de lunettes. Lors de l’élection présidentielle de 2007, certains candidats de l’opposition disaient que, compte tenu de son âge, il ne pourra pas battre campagne. Mais avant la fin de la campagne, c’était eux qui ne pouvaient plus poursuivre la tournée dans le pays.
Quelle appréciation faites-vous de la sortie du Ps qui accuse le chef de l’Etat de vouloir tirer profit de la nomination de Cheikh Tidiane Diakhaté à la tête du Conseil constitutionnel ?
C’est dommage que ce soit le Parti socialiste qui parle de la nomination du magistrat Cheikh Tidiane Diakhaté. Le Ps a dirigé ce pays pendant quarante ans, il est donc sensé savoir que nous avons une magistrature indépendante. L’autre chose, c’est que nous devons respect à la justice de notre pays, car sans la justice il n’y a pas de démocratie. On ne peut passer notre temps à nous attaquer de manière injuste à la justice et vouloir renforcer la démocratie dans notre pays. Les observateurs savent qu’à chaque fois qu’une décision est rendue et que cela va dans le sens des intérêts de l’opposition, elle crie à l’indépendance de la justice. Si ce n’est pas le cas, l’opposition se met à critiquer la justice. La preuve, quand en dernier ressort, la justice lui (opposition) a donné raison dans l’affaire de la communauté rurale de Mbane, l’opposition a appelé pour dire que la justice sénégalaise est indépendante. Je regrette que pour des raisons politiciennes, des hommes qui ont eu à diriger ce pays se comportent de cette manière.
Nous devons respect à la justice qui est un maillon important de la démocratie sénégalaise. Nous ne devons pas, pour des raisons opportunistes, critiquer la magistrature sans aucun fondement. Il faudrait que chacun reste à sa place et fait le travail qu’il a à faire. Nous sommes des hommes politiques, battons nous sur le terrain politique et laissons à la justice le soin de faire son travail. Personne ne peut contester l’indépendance de la magistrature dans notre pays. Les magistrats ont une indépendance totale pour faire leur travail. Et, jamais vous n’entendrez un juriste qui se respecte critiquer ou attaquer des arrêts rendus par le Conseil constitutionnel. Tous ceux qui le font sont des gens qui ne connaissent en général rien de la justice ou des gens qui, même s’ils s’y connaissent, pour des raisons politiciennes se mettent à tirer sur la justice. Or, si nous voulons que notre démocratie soit de plus en plus forte, nous devons arrêter pour des raisons politiciennes de s’attaquer à notre justice.
Le Ps n’est-il pas dans son rôle d’opposant ?
Tel que je conçois le rôle d’opposant, c’est de dire quand ça ne va pas, que rien ne marche. Mais quand ça marche, c’est d’avoir l’honnêteté de le dire. Parce qu’on ne peut passer tout son temps à dire que ça marche ; tout comme on ne peut pas tout le temps dire que c’est mauvais. Le rôle de l’opposition, c’est de travailler à renforcer la démocratie ; et renforcer la démocratie ne veut pas dire affaiblir la justice. Son rôle, c’est aussi d’aider au développement économique et social de notre pays. Ce n’est pas en 2000 que Cheikh Tidiane Diakhaté a été nommé magistrat. Il a assumé des responsabilités depuis que le Parti socialiste était encore au pouvoir. Alors, pourquoi ils attendent maintenant pour s’attaquer à lui ? Encore une fois, ils essayent de justifier une défaite qui est déjà claire. L’opposition prépare déjà l’opinion à sa défaite prochaine.
Pourtant les socialistes renvoient pour convaincre à l’arrêt rendu par la Cour d’appel (Cheikh Tidiane Diakhaté président de cette Cour) dans l’affaire Ndindy et Ndoulo …
Mais peut-on se baser sur une ou deux affaires pour juger quelqu’un surtout qu’ils n’ont pas eu raison sur ces affaires. J’aurais bien voulu, sur les deux affaires, qu’ils évoquent des arguments qui peuvent convaincre. Quand on s’attaque à un magistrat ou à un arrêt rendu par un magistrat, il faut le faire avec des arguments juridiques. Ils ignorent sur quoi ce magistrat s’est fondé pour rendre cet arrêt-là. Sur la base de simples soupçons, le Parti socialiste se permet de sortir un communiqué pour attaquer de manière frontale, les gens. Il faut qu’ils soient un peu plus responsables. Ils (les socialistes) ne se fondent sur rien du tout pour justifier leur accusation ; d’autant plus qu’au niveau du Conseil constitutionnel, il n’y a pas que le président. Ils sont cinq magistrats au niveau de ce Conseil.
Le président du Conseil constitutionnel, même s’il avait cette volonté d’aider un parti, ne peut pas se lever un beau matin et dire que tel a tort tel autre a raison sans tenir compte de l’avis de ses collègues. C’est pourquoi, ils doivent arrêter ce débat et arrêter de s’attaquer à la justice de notre pays. Tout le monde sait que nous avons une justice indépendante et des magistrats courageux et compétents. Maintenant si le Parti socialiste, par expérience, a pu savoir qu’on peut corrompre un magistrat ou lui faire faire un certain nombre de choses, qu’il le dise. Il rendrait en ce moment un grand service aux Sénégalais.
Il y aurait eu ces derniers temps, à la présidence, des pressions sur Samuel Sarr pour le pousser à la démission. Qu’en est-il exactement ?
Il n’y a jamais eu de pression au niveau de la présidence de la République pour demander au ministre Samuel Sarr de démissionner. J’apprenais beaucoup de choses quand je n’étais pas encore dans le cercle présidentiel. Mais maintenant que j’y suis, je me rends compte qu’il y a beaucoup de choses qui se disent et qui ne sont pas conformes à la réalité. Nous servons un homme et un seul : le président Wade. Il peut y avoir des incompréhensions entre des ministres ou des collaborateurs, ce qui est normal.
Des ministres ont été nommément cités dans cette affaire…
Effectivement, des ministres ont été nommément cités. Ce sont des ministres d’Etat avec qui je travaille au quotidien et qui n’ont jamais eu à prononcer les propos qu’on leur prête. Par exemple, quelqu’un a dit que le ministre d’Etat Habib Sy voulait le départ du ministre Samuel Sarr. Cette question a été évoquée en ma présence, mais jamais le ministre d’Etat Habib Sy n’a eu à tenir ses propos sur Samuel Sarr. Ce ne sont que des rumeurs et je ne sais pas d’où est-ce qu’elles viennent.
Qu’est-ce qui a opposé l’ancien Premier ministre Idrissa Seck à Habib Sy lors de l’audience accordée au premier par Wade ?
A ce niveau, je n’ai absolument rien à dire. Idrissa Seck est souvent reçu par le président que vous le sachez ou pas. D’ailleurs il ne s’en cache pas, le président non plus. Je n’étais personnellement pas à l’audience, je n’ai pas eu également d’information par rapport à ce que vous venez de dire. Je ne sais pas ce qui s’est passé à l’audience pour qu’on puisse dire qu’entre Idrissa Seck et Habib Sy, il y a eu des problèmes. Ce que je peux dire, c’est que quand Idrissa Seck a besoin du président, il vient le voir et ce qu’ils se disent n’est pas des choses à porter à la place publique.
Propos recueillis par Yakhya MASSALY
walf.sn