En cette période du mois béni de Ramadan, les gargotes au marché Bou bess à Guédiawaye ne désemplissent pas. Les clients, en toute discrétion, prennent d’assaut ces « mbar » (gargotes, ndlr) pour prendre leur petit déjeuner. Toutes les explications sont valables pour justifier le non accomplissement de ce pilier de l’Islam. Les vendeuses tirent leur épingle du jeu. Toutefois, elles s’insurgent contre la cherté des prix de denrées de premières nécessités.
Guédiawaye, marché Bou bess, à quelques encablures des eaux, les gargotes (mbar, en wolof)) côte à côte, se sont installées tout aux long de cette route et servent le petit déjeuner pour les clients. Chaque gargote montre une réelle discrétion avec des toiles aux alentours. De l’extérieur, on peut observer les pieds des clients.
En cette période du mois de Ramadan, il est difficile de distinguer, dans ces lieux, les musulmans et les adeptes des autres religions. Adultes, jeunes et enfants se faufilent avec retenue et font leur commande pour le petit déjeuner. Au menu, Pains omelette, « nambé » (haricot), spaghetti, macaroni, beurre et chocolat accompagnés d’une bonne tasse de café « touba » ou quinquéliba. Tout est servi en fonction des moyens dont dispose le client.
Autour de la table, une vendeuse s’occupe soigneusement de sa clientèle. Des cafetières et autres marmites s’échappent des odeurs qui ne laissent personnes indifférent. C’est ainsi que toutes les raisons deviennent valables pour ne pas remplir ce pilier de l’Islam.
La trentaine bien sonnée, Ibou, trouvé sur place comme bon nombre de jeunes qui sont venus s’approvisionner, brandit sa maladie comme explication. « Je ne peux pas jeûner parce que je suis ulcéreux, c’est pourquoi tu m’as trouvé ici en train de prendre mon « ndéki » (petit déjeuner, ndlr) », a laissé entendre ce jeune chauffeur.
Si certains avancent les maladies comme c’est le cas de Ibou, d’autres fondent leur argumentation sur les difficiles conditions qu’exige leur travail. Selon eux, « travail rime pas avec jeûne ». « Si j’ai faim, je ne pourrais pas fonctionner normalement. Je parcours la ville toute la journée à la recherche d’une tâche à exécuter pour espérer gagner de l’argent. Je fais entre autres de la maçonnerie, charretier et tout ce qui peut être comme source de revenue. Franchement je ne peux pas cumuler mon travail et le jeûne car je ne supporte pas la faim », confie le jeune, Cheikh, l’homme aux douze métiers.
Ne se souciant pas du jeûne ou pas de leurs clients, ces vendeuses n’ont pas senti cette période de Ramadan. Chaque matin, elles s’installent en attendant l’arrivée des clients désireux prendre le petit déjeuner.
« Moi, je ne sens pas tellement le mois de Ramadan. Les clients, de toutes les religions, viennent le matin pour prendre le petit déjeuner surtout les musulmans, mais je ne leur demande pas pourquoi ils ne jeûnent pas. Cela ne m’intéresse parce que je ne suis là que pour écouler mes aliments », souligne Ndak Faye, vendeuse
Embouchant la même trompette, Fatou Kane confirme que leurs gargotes sont fréquentés le plus pendant les matinées. « Nous vendons petit à petit. Les clients entrent en toute discrétion pour prendre leur petit déjeuner. La majeure partie de nos clients sont des musulmanes de tous les âges. D’ailleurs, nous vendons plus le matin que le soir. Dans ce cas, on peut considérer qu’il y a des gens qui ont déjà célébré la korité », ironise-t-elle.
Les vendeuses visitées ont souligné que leur chiffre d’affaires qui reste intact n’a pas souffert du mois de Ramadan qui devrait voir les gens fréquenter de moins en moins les gargotes. Toutefois, elles s’insurgent contre la cherté des prix des denrées qu’elles utilisent dans leur commerce. « Notre problème, c’est seulement la cherté des marchandises comme le lait, le café et autres », regrette Yaram Fall, vendeuse.
Ces genres de milieux communément appelés gargotes sont considérés par certains observateurs comme des lieux de refuge pour les « mauvais jeûneurs ».
sudonline.sn