Il y a quelques mois, Amsatou Sow Sidibé, encore ministre-conseiller du président de la République, se plaignait à haute voix de l’impossibilité qu’elle avait à accéder à celui qu’elle était censée conseiller. Cette sortie fracassante, suivie de son limogeage, avait remis sur la table la question de l’utilité même de certains personnels rattachés au président de la République. Zoom sur une cour et une arrière-cour chèrement entretenues par la cagnotte publique.
Comme dans une ruche d’abeilles, ils sont nombreux à arpenter les couloirs du Palais présidentiel ou de ses dépendances. Avec titres et qualités divers, ils émargent au budget de l’Etat et bénéficient d’une carte de visite, sorte de sésame-ouvre toi. Eux, ce sont les ministres d’Etat auprès du président de la République, ministres-conseillers, conseillers spéciaux, conseillers techniques, ambassadeurs itinérants, chargés de missions. Qui sont-ils ? Quelles sont leurs compétences ? Visite guidée dans l’univers feutré de la présidence de la République.
Ministres d’Etat : Ils sont ainsi nommés parce que, dans le protocole d’Etat, ils sont un cran plus haut placés que les autres et dépendent directement du président de la République à qui ils rendent compte. Ils ne disposent pas de budget propre, ne sont pas membres du gouvernement mais ont un poids politique et/ou une influence qui fait qu’ils ont un cabinet et un niveau de traitement (véhicule, salaire, téléphone, carburant, etc.) théoriquement supérieur à celui des simples ministres. Même si, relativise un ancien ministre d’Etat, «ministres simples et d’Etat jouissent des mêmes privilèges». Autre avantage : ils siègent, comme leurs autres collègues, en conseil des ministres. Depuis le départ de Bathily, Macky en compte trois connus : Amath Dansokho, Marième Badiane et Mbaye Ndiaye. Ousmane Tanor Dieng que d’aucuns rangent dans la catégorie des ministres d’Etat de Macky Sall n’a jamais confirmé. «Je suis plutôt son conseiller officieux. A sa demande ou à la mienne, je lui donne mes points de vue sur la marche de certains dossiers», répond-il invariablement.
Ministres-conseillers : C’est une création de l’ancien président de la République, Abdoulaye Wade. Arrivé au pouvoir, Macky Sall a perpétué cette tradition qui permet de «recaser» des ministres sortis du gouvernement, anciens directeurs généraux ou autres alliés à qui on n’a pas encore trouvé chaussure à leur pointure. A l’origine, il s’agissait d’un titre exclusivement réservé aux fonctionnaires du cadre des Affaires étrangères.
Rattachés au cabinet du président de la République, ils bénéficient d’avantages et autres privilèges qui font que c’est une fonction désormais très courue. Il se dit que Macky Sall en dispose d’un important contingent dont la plupart n’ont même pas de bureau dans le domaine présidentiel. Qu’à cela ne tienne ! La carte de visite et le traitement royal suffisent au bonheur des nommés. Les plus en vue sont : Baba Diaw d’Itoc, Mamadou Diagna Ndiaye, Ismaïla Madior Fall, Youssou Ndour. Pour les deux premiers, il se dit qu’ils n’ont ni bureau, ni salaire ni voiture à la présidence de la République. Quelle est alors la contrepartie des services qu’ils rendent à la République ? Mystère et boule de gomme.
Conseillers spéciaux : Ce sont des membres du cabinet chargés de missions bien précises pour et uniquement le président de la République. Ces missions comprennent la communication du président de la République, la gestion de ses affaires politiques. Mais, certains de ces conseillers sont également chargés de dossiers auxquels le président de la République accorde une importance particulière (sports, culture, fiscalité…).
Conseillers techniques : Ils sont nommés par arrêté du président de la République et dépendent du Secrétaire général de la Présidence de la République. Via ce dernier, ils émettent des notes et fiches techniques sur certains sujets à l’endroit du président de la République. Au tout début de l’avènement de Macky Sall, la plupart de ces conseillers qui se plaignaient d’un traitement modique avaient fini par déserter les rangs et retourner dans le privé ou reprendre leur business.
Chargés de mission : C’est la mission fourre-tout. La rumeur raconte qu’il y en a même qui s’occupent de représenter le président de la République dans les…cérémonies familiales (funérailles, par exemple) où ce dernier n’a pas le temps ou ne voit pas l’opportunité de mettre les pieds. Récemment, des jeunes chargés de mission à la Présidence s’étaient donné comme mission de déballer contre les jeunes de Y en a marre, coupables d’avoir appelé à voter «Non» au référendum.
Ambassadeurs itinérants : Comme leur titre l’indique, ils jouent le rôle d’ambassadeurs itinérants pour certaines missions à eux confiées par le président de la République hors des cercles traditionnels de la diplomatie. Très mal perçus par les diplomates professionnels, on les voit souvent se bousculer dans l’avion de commandement du président de la République. Pour quelles missions ? Allez savoir !
Ibrahima ANNE
walf.net