En ces fêtes de fin d’année, le chanteur sénégalais établi au Canada veut offrir un cadeau de Noël à ses fans. C’est ainsi qu’il est venu présenter son nouvel album ‘’Back to Jolof’’ à son public. Elage Diouf a organisé, dans ce sens, une séance d’écoute jeudi soir avant la grande soirée de présentation en live le 30 décembre au Théâtre national Daniel Sorano. Dans cet entretien accordé à ‘’EnQuête’’, il revient sur son désir de rentrer au bercail, après avoir décortiqué le contenu de son nouvel album de 5 titres.
Vous venez de sortir un nouvel album ‘’Back to Jolof’’. Qu’est-ce qui explique ce besoin de revenir à vos sources ?
En entamant ce projet, on n’avait pas décidé de le baptiser ‘’Back to Jolof’’. L’idée de départ était d’enregistrer des chansons avec des enregistrements à la sauce sénégalaise, donc au rythme de Jolof. C’est pour cela que, finalement, on l’a intitulé ainsi. Il y a tout de même une coïncidence heureuse avec mon retour, le temps des fêtes de fin d’année. On ne pouvait, je crois, trouver un autre meilleur titre. Le contenu de cet album et les thèmes qui y sont développés sont un retour aux sources pour moi. Et cela veut dire pour moi retour à nos valeurs, à ce Sénégal dont on était tous fier.
‘’Sunugaal’’ est le premier de cet album que le grand public a découvert. Pourquoi le choix de sortir ce single parmi les 5 que compte votre nouvel album ?
Rien que le titre de cette chanson dit tout. Son nom est assez évocateur. Sénégal Sunugaal, c’est notre pays. Quand on vit à l’étranger, on ne veut avoir que de bonnes nouvelles venant de notre terre de naissance. Dans cette chanson donc, j’exprime tout l’amour que j’ai pour mon pays. Je lance également des messages à l’endroit de tous les Sénégalais, car j’aimerais qu’ils changent d’attitude. Ce pays a son identité, la ‘’téranga’’ qui est en train d’être dénaturée par certains. Ce pays est celui de Khadimou Rassoul, Mame Baye, Mame Limamoulaye, etc. Il faut que chrétiens ou musulmans, qu’on s’unisse tous pour faire avancer notre pays. Que ceux qui peuvent nous aider dans cette entreprise viennent nous rejoindre. Ceux qui ne partagent pas cet idéal avec nous n’ont qu’à nous laisser tranquille. Pour nous de la diaspora, les nouvelles qui nous parviennent tous les jours ne sont pas celles qu’on voudrait recevoir. Ce sont des nouvelles qui nous mettent hors de nous et nous déçoivent. On veut retrouver notre Sénégal.
Quelles sont ces choses qui vous déçoivent ?
C’est tout ce qui est contraire aux bonnes valeurs. Il y a certaines choses qui se passent, se répètent et que la presse relate qui nous font mal. Il y a les viols par exemple. Mais également ceux qui passent leur temps à raconter des ragots sur les gens à travers la presse, surtout sur Internet. Souvent sur fond de mensonges, ils salissent la réputation d’honorables citoyens. C’est écœurant cela, surtout quand je vois que certains s’en réjouissent.
Ce n’est pas bien. Le Sénégal était un pays de ‘’suturë’’. Aujourd’hui, les gens étalent leur vie sur la place publique sans aucune vergogne. Il faut qu’on revienne à nos bonnes valeurs. On doit être fier de nous, fier d’être sénégalais. Quand on rencontre un athlète sénégalais qui fait des performances à l’étranger, par exemple, on est fier de lui. Il faut que l’on soit conscient que tout ce qu’on fait se saura tout au tard. Donc, essayons de faire beaucoup de bien. De petites choses peuvent faire la différence. C’est le message que je tente de lancer et de faire comprendre à ceux qui m’écoutent. C’est ma contribution à la construction de l’édifice qu’est le Sénégal. Je n’ai que ma voix, ma musique pour sensibiliser. J’en profite en espérant que cela va changer quelque chose.
Revenons à ‘’Back to Jolof’’. De quoi parlez-vous dans les autres titres ?
Vous trouverez ‘’Melokaan’’. Les Sénégalais aiment cette chanson. Il y a un message qu’ils aiment entendre. Pour cette chanson, tout a été fait ici. J’y ai rajouté une bonne dose de mon pays. Quand je venais ici, dans le cadre de la tournée ‘’Melokaan’’ (Ndlr : Titre du dernier album international d’Elage Diouf), on l’a fait pour le public sénégalais qui voulait entendre d’autres choses de moi. Il y a aussi ‘’Badola’’. Au début de ce morceau, on a essayé de faire un peu d’acoustique pour changer un peu, en gardant tout de même l’arrangement initial. ‘’Back to Jolof’’ on a dit, et on ne peut parler de Jolof sans pouvoir toucher les Sénégalais. On a voulu faire un mix de tel sorte que ceux qui aiment l’acoustique vont se retrouver dans ces sons. En tout cas, moi, je me suis fait plaisir ainsi que mes musiciens. J’espère qu’il en sera de même pour les mélomanes.
Comment s’est fait le choix des titres qui sont dans ‘’Back to Jolof’’ ?
Alors, à chaque fois que je venais au Sénégal, quand je jouais, j’adaptais les morceaux au public sénégalais. J’ai un public assez diversifié et avec mes musiciens, on essayait de faire plaisir à tout le monde. Les versions que vous avez dans cet album ne sont pas celles que connaissent ceux qui me suivent et viennent me voir lors de mes soirées ici. Quand on a commencé à les tester, on s’est dit qu’on va les mettre sous Cd et les faire connaître au public. C’est pour cela qu’on voulait le faire en deux jours, mais finalement cela nous a pris trois mois. Car, plus on avançait dans le travail, plus on se rendait compte que le projet pouvait avoir plus d’ampleur. C’est ce qui explique ce choix très restreint de morceaux.
Pourquoi ceux-là et pas d’autres ? Franchement, on y est au feeling. Avec Bouba Kirikou et d’autres, on se disait : oui ce titre est bon, celui-ci également, etc. On s’en est tenu à 5 bonnes chansons en se disant c’est bon. Mais on va avoir une suite, Inch’Allah. Tout dépendra, en fait, de l’accueil qui sera réservé à ‘’Back to Jolof’’.
Tous les titres sont assez rythmés, c’est plus du ‘’mbalax’’ que ce que vous faisiez avant…
(Il coupe) Non, je dirai à tous ceux qui pensent comme vous qu’Elage a fait du ‘’mbalax’’ avant de quitter le Sénégal. Et si j’ai envie, demain, de faire un album en musique traditionnelle, je ne vais pas me priver, je vais le faire. Je vais trouver les musiciens avec qui collaborer pour le réaliser. Je disais déjà que je voudrais que 80 % de mon prochain album international soit réalisé au Sénégal. On a fait ‘’Back to Jolof’’ sans grande préparation. Mais pour le prochain on veut y mettre en valeur nos instruments traditionnels. A l’extérieur, les gens ont du respect pour qui je suis, mais surtout pour l’Africain que je suis. Je ne peux pas venir ici et dire que je suis un ‘’Toubab’’ (sic). Je suis l’Africain là-bas et j’en suis très fier. Je suis juste un Sénégalais qui vit au Canada, mais c’est ici où je suis né, où j’ai reçu mes premières influences et surtout où j’étais été formé. Maintenant, je m’ouvre à d’autres sonorités que je mélange avec celles que j’ai rencontrées le long de mon parcours. Ce qui fait qu’aujourd’hui j’ai une certaine expérience qui me permet de faire d’autres genres musicaux. Je tiens tout de même à ce que mon prochain album international soit fait ici à 80 %. Dans ‘’Back to Jolof’’, je me suis fait plaisir.
Vous répétez cette phrase depuis tout à l’heure. Est-ce à dire que dans vos autres albums, vous ne vous êtes pas fait plaisir ?
Non, ce n’est pas cela. C’est juste que c’est comme un trip, mais un trip jolof. Des fois, il m’arrivait d’en faire plusieurs en percussions sans même qu’il y ait des instruments à cordes. Quand tu prends plaisir à faire quelque chose, tu te laisses aller, peu importe le genre musical. Et dans cet album, il n’y a pas que du ‘’mbalax’’. Il y a de la différence dans les arrangements. Vous y trouverez du ‘’assiko’’, du blues, etc. Il y a vraiment une diversité de sonorités proposée ici.
Pensez-vous qu’il est possible de vendre à grande échelle la musique pop comme vous la faites au public sénégalais ?
Oui, mais au plan financier, c’est à voir. Eu égard à comment les gens adorent ce que je fais ici, si c’était dans un autre pays, je vivrais bien de ma musique. Je pourrais même faire plus d’actions sociales parce que ma musique me rapporterait beaucoup. Malheureusement, au Sénégal, les gens aiment la musique, mais ne dépensent pas pour la musique. Donc, que cela soit moi Elage Diouf ou d’autres artistes, il nous est difficile de vivre de notre art ici. Ce qui est très dommage, parce que quand on consomme de la musique, on doit savoir que c’est un travail pour celui qui l’a fait. Il faut se dire que si les artistes n’arrivent pas à s’en sortir, la musique n’avancera pas. On ne peut investir dans un secteur qui ne nous fait pas vivre. On ne peut toujours faire vivre la musique. Il faudrait qu’à un moment le contraire s’opère. C’est juste ce que je souhaite. Mon retour dépend de cela. Le public connaît et adore la musique. Il reste juste ce qui doit nous permettre à nous musiciens d’exister.
Pourquoi ce choix de passer plus de temps à l’étranger qu’ici ?
J’aimerais revenir au Sénégal et vivre de ma musique. Mais vous savez autant que moi que ce n’est pas facile de vivre de sa musique. Je fais des efforts et même des sacrifices pour être là. Sinon, je ne serais pas là à vous parler. J’aimerais que le public me soutienne en assistant à mes spectacles, en achetant mes Cd et en soutenant mes projets. C’est comme çà que je vais pouvoir survivre et être là, parce que là, avec les projets qu’on a ici, on n’a pas de commande, on n’a rien. On se bat pour que nos projets se réalisent. Je veux que les gens soient conscients de çà. Je ne sais pas combien de temps tout cela va durer, c’est-à-dire financer presque tout pour moi. Je ne sais pas pendant combien de temps je pourrai encore le faire.
Vous avez des textes généralement bien écrits avec des thèmes bien recherchés. Quelles sont vos sources d’inspiration ?
Je ne fais qu’observer ce qui m’entoure et m’en inspire. J’écris moi-même mes textes. Je suis l’actualité, même si je ne suis pas ici, je suis informé et je sais ce qui se passe. Je suis ce qui se passe au Sénégal comme si je devais après faire un rapport dessus. Je ne suis pas là, mais je suis là. Je suis vraiment connecté, même si j’avoue que je ne suis pas au courant de tout.
Pourquoi Elage Diouf et pas Elage Fall Diouf, comme vous vous appelez à l’état civil, puisqu’il y a déjà un footballeur célèbre qui s’appelle comme çà ?
(Il sourit) Ce n’était pas voulu vraiment. Je ne me concentre pas sur certains détails comme choisir un nom de scène. Chez moi, on m’appelle Elage Fall et pour les autres je suis Elage Diouf. Je ne sais pas comment c’est venu. C’est le destin. Tout le monde dit Elage et moi, je me demande pourquoi pas El’Hadji. Je n’ai pas eu le nom que j’aimerais avoir.
Avec enqueteplus.com
attention aux dossiers d’immigration avec changement de patronyme. très fréquent au Canada.
trafic exacerbé de faux documents sénégalais, anciens passeports revendus, faux extraits de naissance, faux casiers judiciaires….