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De L’administration Publique Sénégalaise : Ce Qu’en Disent Les Conclusions Des Assises Nationales Et Les Recommandations De La Cnri

Date:

DES ASSISES NATIONALES

I.1. Des conclusions (pages 263, 264 et 265 de « Bilan et perspectives de refondation »)

I.2. L’Administration
« Les conditions de refondation et de redynamisation de l’administration publique doivent passer par la promotion du principe républicain d’une administration dont la neutralité, la transparence et la stabilité sont garanties par des structures, des procédures, des modes de recrutement, de carrière et de rémunération rationalisés et formalisés.
Ce type d’administration doit rendre un service public de qualité aux citoyens et aux usagers, y compris une information accessible par période et à la demande. Elle doit enfin répondre aux critères de l’égalité envers tous, se conformer à la déontologie et répondre de ses actes. A cette fin, il est urgent d’adopter les mesures suivantes :
Normaliser les recrutements civils et militaires, de même que les avancements selon les principes républicains de transparence, de mérite et d’équité ;
Réaligner les rémunérations de base selon les principes de diplôme et harmoniser raisonnablement le niveau des indemnités spécifiques de corps et normaliser les contrats spéciaux ;
Protéger l’Etat contre les ordres et décisions manifestement illégaux, en engageant aussi bien la responsabilité des autorités qui les ont donnés que celle des collaborateurs qui les ont exécutés ;
Etablir un système d’incompatibilité pour éviter l’implication partisane des hauts fonctionnaires dans la vie politique. La neutralité sera exigée des hauts fonctionnaires nommés à des directions nationales. Il leur est interdit d’utiliser les moyens de l’Etat au service d’un parti politique ou d’une coalition de partis ou d’intérêts communautaires ;
Définir, en concertation avec les citoyens et en s’inspirant des meilleurs pratiques mondiales, des mesures destinées à mettre un terme à la patrimonialisation des ressources (financières, matérielles, foncières, de valeurs mobilières et d’immeubles) ;
Renforcer notablement les capacités et les moyens humains et matériels de la police financière, au regard de la complexification des délits et crimes financiers, afin de faciliter les investigations nationales et internationales.
Qu’il soit d’ordre interne ou externe, à objet technique, administratif ou financier, le contrôle doit jouer pleinement son rôle, de manière effective et transparente, et ne pas constituer un instrument entre les mains des supérieurs hiérarchiques pouvant en user comme des armes contre des adversaires ou des outils de dissimulation , de mal gouvernance.
Ainsi les recommandations sont les suivantes :
Créer au sein du ministère des Finances un corps de contrôle financier compétent pour toutes les administrations avec un droit de suite sur l’utilisation des deniers publics partout où besoin sera :
Organiser un système de référence applicable aux contrôles techniques des administrations avec des carrières motivantes et évolutives ;
Transformer l’Inspection générale d’Etat en une Autorité indépendante chargée de la vérification générale de l’Etat aux plans administratif, financier, technique et de gestion et dont les rapports sont destinés systématiquement au Président de la République, au Premier ministre, au Parlement, à la Cour des Comptes et, le cas échéant , aux Cours et Tribunaux compétents et à la Cour de Discipline budgétaire. Cette Autorité dispose du pouvoir de s’autosaisir et d’ester en justice ;
Donner au Vérificateur général chargé de la coordination de ladite Autorité Indépendante un statut qui le rend inamovible pendant une période de sept ans non renouvelable ;
Renforcer le rôle, les missions et les moyens de la Cour des Comptes en tant qu’Institution judiciaire indépendante à compétence universelle sur l’exécution des lois de finances et les opérations des budgets des collectivités locales, des établissements publics, des entreprises publiques, des Agences et des Projets ;
Créer un organe public indépendant de lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite, avec un pouvoir d’auto-saisine et de saisine directe des tribunaux ainsi qu’un système de sanctions efficace, y compris la prise des mesures conservatoires ;
Rendre obligatoire la communication des rapports finaux de contrôle interne des administrations aux organes intermédiaires et aux organes supérieurs de contrôle de l’Etat, pour une bonne coordination et une harmonisation des organes attachés à cette fonction.

I.2 De la Charte de gouvernance démocratique
Ayant mesuré l’importance d’une administration publique républicaine, notamment pour un environnement propice au développement, à l’investissement, etc., nous nous engageons à promouvoir les mesures suivantes pour une refondation et une redynamisation de l’Administration publique :

Améliorer sensiblement la lisibilité des procédures pour le citoyen de base, en particulier en les exprimant dans les langues nationales ;
Établir un système d’incompatibilité pour éviter l’implication partisane des hauts fonctionnaires dans les activités politiques ;
Instituer l’appel à candidature pour certains postes de la haute fonction publique et du secteur parapublic ;
Consacrer un système légal et équitable d’accès à l’information, garanti par l’administration aux citoyens, aux acteurs politiques, économiques, sociaux et culturels ;
Créer un organe indépendant de lutte contre la corruption avec des pouvoirs de saisine directe des tribunaux et un système de répression efficace ;
Assurer l’octroi des marchés publics dans des conditions de parfaite équité et de transparence totale.

Des actions vigoureuses seront menées pour renforcer les capacités d’analyse dans l’administration centrale. Par ailleurs, des mesures fermes seront prises pour assurer une stabilité suffisante aux services et directions ministérielles et promouvoir la cohérence de l’action publique.
En outre, les corps de contrôle supérieurs sont indépendants de l’Exécutif et du Législatif; ils encadrent l’action publique, y compris les services rattachés à la Présidence de la République. Ils doivent jouer leur rôle de manière transparente. Le renforcement de l’efficacité des corps de contrôle fera partie des premières priorités du pouvoir central.

DE LA COMMISSION NATIONALE DE REFORME DES INSTITUTIONS CNRI

II.1. Des recommandations (page 33 du rapport)

Pour la CNRI, il faut redonner à l’Administration publique toute sa crédibilité et toute son autorité. Cela passe par une normalisation de sa structuration qui doit répondre aux normes d’organisation les plus généralement reconnues, des unités de base aux directions nationales ; elle passe également par un système de recrutement privilégiant la transparence et l’équité avec des dispositifs appropriés qui promeuvent la compétence et le mérite. Cela se réalise par le recours systématique à l’appel à candidature pour les hautes fonctions dans les secteurs public et parapublic et le recours au concours pour l’essentiel des postes inferieurs.
La CNRI réaffirme avec force que l’Administration publique doit être apolitique, neutre et impartiale. Elle est dédiée au service de l’intérêt général et ne doit être détournée de ses missions à des fins personnelles ou partisanes. Ses agents sont soumis à la loi et à un code de conduite qui les obligent à n’accepter, ni solliciter, directement ou indirectement, au Sénégal ou à l’étranger, aucun don, cadeau ou libéralité dans l’exercice de leurs fonctions. Ils ne peuvent non plus faire des dons et libéralités de bien mobiliers ou immobiliers appartenant à l’Etat ou à ses démembrements.
II.2. Avant-projet de Constitution de la CNRI

Article 9 : L’Administration publique est apolitique, neutre et impartiale. Elle est dédiée au service de l’intérêt général. Elle est placée sous le contrôle hiérarchique du Pouvoir exécutif et mise à la disposition des Pouvoirs législatif et judiciaire. Nul ne peut la détourner de ses missions à des fins personnelles ou partisanes. Les agents publics sont soumis à la loi et à un code de conduite qui réglemente strictement les situations de conflits d intérêt et d’incompatibilités, les activités politiques et celles à but lucratif autorisées et le traitement des informations en leur possession.
Article 10 : Les agents publics ne doivent ni accepter ni solliciter, directement ou indirectement, au Sénégal ou à l’étranger, aucun don, cadeau ou libéralité dans l’exercice de leurs fonctions.
Peuvent être tolérés des cadeaux symboliques en nature dont la valeur n’excède pas un montant fixé par la loi. Les cadeaux qui n’auront pas pu être déclinés pour des raisons culturelles ou diplomatiques majeures sont aussitôt déclarés et remis au service administratif en charge de la gestion du patrimoine de l’Etat.
Exception faite des actes symboliques à caractère manifestement d’intérêt général, les dons et libéralités de biens mobiliers ou immobiliers appartenant à l’Etat ou à ses démembrements, effectués par une autorité publique, sont interdits à peine de nullité. L’action en restitution ou en remboursement peut être introduite par tout organisme public chargé de la sauvegarde des biens publics ou par toute personne morale de droit privé ayant pour vocation la défense des intérêts matériels et moraux des citoyens.
Article 11 : L’égal accès aux emplois publics est garanti à tous. Les recrutements d’agents publics s’effectuent par des procédures publiques de concours ouverts et transparents à l’exception des membres des cabinets du Président de la République, du Premier Ministre, des ministres et du Président de l’Assemblée nationale dont le nombre est fixé par décret.
Les fonctions de direction de services nationaux sont pourvues, avant nomination officielle, par la désignation des postulants à partir des résultats de procédures internes transparentes et équitables. Les fonctions de direction des organismes du secteur parapublic et des Autorités Indépendantes sont pourvues, avant nomination officielle, par la désignation des postulants à partir des résultats d’un appel à candidature organisé conformément à la loi. »
Ainsi la position des Assises nationales et celle de la Commission nationale de reforme des Institutions sont limpides, claires et nettes. Elles indiquent la voie à suivre pour une administration publique de qualité équitable fonctionnant dans une stricte neutralité dans l’offre de ses services aux citoyens que nous sommes.
Mais quel visage présente l’administration publique aujourd’hui ? Quel traitement lui applique le pouvoir en place ? Répond-elle réellement aux normes habituelles d’une véritable administration publique ? Est-elle une administration apolitique, neutre et impartiale ? légal accès aux emplois publics est-il garanti à tous ? Ses missions ne sont-elles pas détournées à des fins personnelles ou partisanes ? Ses recrutements se font-ils par des procédures publiques de concours ouverts et transparents ?
A toutes ces questions les propos du Médiateur de la République, Monsieur Alioune Badara CISSE, peuvent constituer une bonne réponse.
Ces propos du médiateur de la République ont été repris dans les colonnes du quotidien l’Observateur du Samedi 14 Dimanche 15 avril 2018 à la page 3 en ces termes : « S’IL Y A TROP DE BLOCAGE C’EST PARCEQU’IL Y A TROP DE POLITIQUE DANS L’ADMINISTRATION. BEAUCOUP DE CORPS QUI ETAIENT ETRANGERS AU JEU POLITIQUE S’ADONNENT AUJOURD’HUI Á LA POLITIQUE. C’EST COMME SI ON LES AVAIT PAYÉS POUR LE FAIRE. ON LEUR DIT, Á L’APPROCHE D’ÉLÉCTIONS MAJEURES: « JE NE VEUX PAS VOUS VOIR Á DAKAR, ALLEZ BATTRE CAMPAGNE ET NE REVENEZ QUE LORSQUE VOUS AVEZ GAGNÉ VOTRE LOCALITÉ. » ET IL AJOUTE: « LA SITUATION D’IMPUNITÉ DEVIENT AUJOURD’HUI UNE RÉALITÉ. ELLE FAIT QUE CERTAINS PARMI NOUS PENSENT QU’ILS SONT DES CITOYENS Á PART ENTIÈRE. »
Aujourd’hui tous les directeurs généraux des services centraux de l’Etat et tous les présidents de Conseil d’administration des sociétés nationales sont des responsables du parti au pouvoir et essaiment à travers le pays pour animer le parti qui est sans structure. Il serait d’ailleurs intéressant de pouvoir parcourir les feuilles de présence des réunions du Secrétariat exécutif national de ce parti. Les 99,99% des présents seraient à n’en pas douter des DG et des PCA.
C’est à cause de cela que le silence de mort observé par les partisans des Assises nationales qui ont choisi de « gouverner ensemble » avec ce pouvoir qui a pris l’administration en otage est honteux et plus que condamnable. C’’est une transhumance qui ne dit pas son nom, une transhumance programmatique.
Et les futurs candidats à l’élection présidentielle du 24 Février 2019, quelles seront leurs relations avec les conclusions des Assises nationales ? La vigilance exige un examen à la loupe des différents programmes qui seront présentés aux choix des électeurs.
Les conclusions des Assises nationales et les recommandations de la CNRI constituent, à l’étape actuelle de l’évolution de notre société, la ligne de démarcation nette entre les partisans de la continuité et ceux qui militent pour une véritable rupture entrainant une réelle alternative crédible et durable.

Dakar, le 24 Avril 2018

Alla KANE
Inspecteur des Impôts et
des Domaines à la retraite

1 COMMENTAIRE

  1. les assises avaient fait du bon travail quand même. on s’en rend compte un peu tard. il est dommage que la volonté d’un seul individu, mal intentionne, ait empêché la mise en oeuvre de ces recommandations.

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