Dans un Etat démocratique, on ne peut pas façonner une administration pour servir un homme fût-il président de la république. Depuis son accession au pouvoir, l’exécutif n’a jamais rien fait qui puisse affaiblir sa mainmise sur les médias d’Etat. Malgré les critiques, il peigne son nombril avec le peigne de l’indifférence.
Il est arrivé au pouvoir avec un angélisme coupable « la patrie avant le parti ». La réalité est tout autre, c’est plutôt « le parti avant la patrie » car il est parvenu à tailler toutes les administrations en un bloc monolithique pour servir ses intérêts électoralistes (Ciré Dia le DG de la Poste à la retraite, maintenu dans ses fonctions et militant APR, Aboubacar Sédikh Bèye DG du Port autonome de Dakar et responsable APR, Cheikhou Oumar Hann DG du COUD et responsable APR, Mamadou Mamour Diallo, le Directeur national des Domaines par ailleurs responsable APR , Abdou Karim Sall, DG ARTP et responsable APR), tout ce beau monde est au service d’un homme, bien que nous soyons en République.
Venons-en à ceux qui, par leur travail, aident en principe les citoyens à se faire une opinion.
Tous les observateurs peuvent attester que rien ne peut être associé à la RTS qui puisse être interprété comme négatif à l’égard du régime de Macky Sall, de son parti (APR) ou de sa coalition (Benno Bokk Yakaar), et qu’au contraire sa ligne éditoriale, ses innombrables reportages sont indiscutablement favorables et viennent en appui au régime de Macky Sall. Ses couvertures journalistiques souvent déguisées en reportages relayés dans un but partisan, le quotidien national le Soleil n’est pas en reste avec des articles de presse à la gloire de Macky et de son parti.
Macky n’a pas hésité de gratifier les journalistes non affranchis de généreux subsides, en leur réservant des postes de Direction (Racine Talla, Directeur RTS et militant de l’Alliance pour la République (APR), Yakham Mbaye, Directeur du quotidien national le Soleil et militant de l’Alliance Pour la République (APR) ou des fonctions prestigieuses (Babacar Diagne directeur du CNRA).
Comment voulez-vous qu’un organe de régulation (CNRA) présidé par Babacar Diagne puisse être crédible en raison de son passé ?
Malgré l’alternance de 2000, les pouvoirs publics n’ont pas rompu cette alliance opportune qui s’est construite avec les médias d’Etat notamment (la RTS et le Soleil) ont préféré maintenir une relation de connivence sans la moindre habileté qui se perpétue depuis des décennies entre les médias d’Etat et le pouvoir.
Les médias d’Etat héritiers de ceux qui, des décennies avant, n’ont même pas essayé de changer le cours des événements.
Il est à noter que la RTS et le quotidien national le Soleil sont payés avec nos impôts. Que l’on soit pour l’Alliance pour la République (APR) ou pour l’opposition, on aurait normalement le droit d’avoir un traitement impartial de l’accès aux médias de la République.
En pensant orienter sans doute le vote des sénégalais à l’occasion d’une élection présidentielle de 2019, la RTS produit l’effet inverse, surtout que le contexte économique et social s’y prête notamment la légèreté avec laquelle le pouvoir de Macky préserve nos ressources naturelles.
La RTS ne cesse de nous présenter des reportages censés magnifier les actions du gouvernement en nous martelant ou en nous bourrant le crâne sur les bienfaits des actions du gouvernement ou plus spécialement la vision du Président.
Comment des journalistes peuvent -ils s’écarter de leur métier qui est d’informer et en même temps se livrer à des opérations de manipulation du peuple ?
Quand la principale chaîne de télévision d’Etat réussit à nous montrer le Président ou les membres du gouvernement durant plus de la moitié du temps d’un journal télévisé ou d’un reportage et exerce l’omerta sur l’actualité politique de l’opposition, cela démontre une fois de plus la partialité de nos médias officiels, c’est juste pathétique.
L’ascension irrésistible d’un homme jeune, talentueux, symbole d’un homme politique de type nouveau Ousmane Sonko, porté par un slogan explicite : le patriotisme, n’a pourtant pas bénéficié une couverture télévisuelle ni d’articles de la presse dite officielle lors de la présentation de son livre « SOLUTION ».
Il faut que les médias publics deviennent des services d’information publics et non un service de lecture des bulletins d’information du pouvoir. Les jeunes journalistes doivent s’affranchir du pouvoir politique car les anciens journalistes ont trop intériorisé les dispositions non écrites de l’ex-ORTS qui continuent d’entacher leur crédibilité et leur niveau de soumission au pouvoir. Certains sont d’ailleurs les dépositaires de cette allégeance au pouvoir politique. Il est temps que les anciens journalistes comprennent maintenant que l’époque de l’ORTS est révolue et que le quotidien national Le soleil « brille » pour tous et sur tous.
Aujourd’hui, les médias privés essayent d’aider ceux du public à s’affranchir mais le combat n’est pas aussi simple.
Les médias privés ont conquis leur liberté par la crédibilité et la qualité de l’information et surtout par leur audace face au pouvoir politique depuis des années. Ils en sont l’illustration parfaite surtout que leurs journalistes ont un talent immense et certains continuent d’en faire les frais.
L’enjeu de cette campagne sera basé sur la transparence dans la gestion des affaires de l’État ainsi que le thème saillant qui lui est attaché : la gestion en bon père de famille des ressources naturelles du pays.
Le Sénégal est engagé dans une indispensable recherche d’alternance politique. A beau tenter de manipuler, le peuple parviendra à se ressaisir.
En marge du Forum de Paris sur la paix, Macky Sall a osé signer la déclaration « l’initiative pour l’information et la démocratie ».
Les signataires soulignent qu’il y a lieu de reconnaître « que les individus ont un droit, non seulement à une information indépendante et plurielle, mais aussi à une information fiable, condition indispensable pour qu’ils se forgent librement une opinion et participent valablement au débat démocratique ».
Ces entreprises de communication officielles ont développé une propagande politique utilisant tous les moyens de communication pour promouvoir l’action du régime de Macky Sall. Malgré tout, Macky Sall accorde peu d’intérêt aux médias Sénégalais, toutes ses déclarations sont réservées aux médias étrangers, la dernière en date (interview à France 24).
Cet homme est fasciné par l’occident, principalement la France.
La grande mobilisation des citoyens sur les réseaux sociaux est un véritable rempart contre l’absence de traitement médiatique réservé à l’opposition par la RTS et le quotidien national le Soleil.
Les réseaux sociaux décrites comme subversives ont fini par embarrasser l’exécutif qui tente de légiférer pour restreindre la liberté d’expression. Ce sera peine perdue.
Abdourahmane Keita
Sociologue