Présidentielle 2019 et réseaux sociaux : résultats de la campagne 2.0

Les réseaux sociaux sont des plateformes ou des outils du 21e siècle où les citoyens se croisent pour s’exprimer, discuter et partager leurs idées. De nos jours, les gens passent un temps important sur ces réseaux sociaux ce qui fait de ce lieu un terrain de chasse des partis politiques pour convaincre les citoyens d’adopter leurs idées. Ainsi, des études ont déjà montré que les réseaux sociaux ont en particulier
une influence importante sur la décision de vote des jeunes électeurs.

Au Sénégal avec plusieurs millions d’internautes, peut-on nier l’impact des réseaux sociaux sur la vie économique, sociale et politique du pays ? Les Sénégalais, sont-ils influençables à travers l’occupation des réseaux sociaux ? Il est encore difficile de répondre à ces questions de manière factuelle, car pour y arriver, il sera intéressant de faire une vraie étude de terrain sur des cas concrets.

La présente étude est réalisée sur la page Facebook officielle des différents candidats à l’élection présidentielle du 24 février 2019. Parmi ces candidats, la page du président Macky Sall est la plus aimée par plus de 419 000 personnes, suivie de celle d’Ousmane Sonko avec plus de 151 000 abonnés. Les pages de Madické, Idrissa et Issa sont suivies respectivement par 87 000, 75 000, et 18 000 personnes.

La démarche, consiste à relever le nombre de personnes qui interagissent avec les publications de chaque candidat. Pour rappel, à chaque fois qu’une publication apparaît sur Facebook, l’internaute peut aimer (like), commenter (comment), partager (share) et l’option vue (view : comptabilise le nombre de personnes qui ont vu une vidéo). Ces différentes possibilités d’interaction permettent ainsi de savoir le nombre de personnes qui s’intéressent à une publication.

Nous avons tenté d’exploiter cette possibilité pour suivre les différents candidats depuis le début de la campagne. Ainsi, pour chaque publication du candidat entre le 03 et le 16 février 2019, nous exportons le nombre de like, de comments, de partage et de view (si la publication est une vidéo), ce qui nous a permis d’avoir des statistiques des publications des différents candidats pour pouvoir les analyser.

Ces données cumulées exportées ont montré que durant cette période, 3 631 698 facebookeurs ont visionné les vidéos des 5 candidats.
Par conséquent, on peut considérer comme taille de notre échantillon ce nombre de vues, pour en déduire les scores réalisés par chaque candidat sur les variables (like, comments, share, View).

Après dépouillement de ces données vidéos, les résultats sont représentés sur les figures 1 à 4. Comme on peut le remarquer sur ces figures, quelle que soit la variable considérée, Ousmane SONKO obtient plus de 70 % de l’audience (sur les données vidéos) et 46 % (sur les likes des images, voir Figure5). Ainsi, les postes d’Ousmane SONKO comparés à ceux de ses concurrents suscitent beaucoup plus l’intérêt des facebookeurs.

Au vu de ces résultats (77 % des vues, 88.6 % des likes, 93.17 % des commentaires et 85.1 % des partages), Ousmane SONKO est incontestablement le « chuchu » des facebookeurs en matière d’interactions. Chacune de ses sorties est largement suivie, commentée et partagé par ceux qui le suivent.

Ousmane Sonko a fini de bâtir une puissance de communication digitale politique (une première au Sénégal) et si tout ce beau monde qui s’intéresse à Sonko vote et fait voter pour lui, il pourra faire très mal à ses adversaires et entrée ainsi dans l’histoire politique du Sénégal.

Au cours de cette étude, nous avons fait plusieurs remarques concernant la campagne d’Ousmane SONKO. Il est pratiquement le seul candidat à faire des directes lors de chaque sortie. Ce qui lui permet d’interagir directement avec ses militants quels que soient l’heure et leur lieu de résidence. On se demandait même si Pastef n’a pas une équipe spéciale dédiée à la gestion de sa campagne sur les réseaux sociaux ?

L’autre remarque que nous avons faite est que le leader du PUR ne partage pratiquement pas de vidéo, la plupart de ses publications sont des images (photos). Ce qui lui confère une part de l’ordre de 10% sur les statistiques des likes des images (Figure 5).

Idrissa Seck fait son come-back, car il était quasiment absent sur Facebook en 2018 alors que l’interaction avec les internautes se construit sur le long terme.

Madické Niang, fait aussi pas mal de buzz sur Facebook, mais en dehors de sa page officielle, les internautes reprennent plusieurs de ses phrases de « chocs : Todj na radiax » .

Enfin, le Président Macky SALL malgré le nombre important de personne qui se sont abonnées à sa page, ses publications « attirent » moins de monde comparées à celles du leader de Pastef.

Il faut noter que Macky Sall a déjà théorisé en 2011 la puissance des réseaux sociaux en déclarant : « Il faut que le futur président de la République, quel qu’il soit, se dise qu’il y a une vigie populaire, une vigie citoyenne qui est là, qui va observer les faits et gestes du nouveau pouvoir, c’est ce que j’appelais la magie du clic à travers les réseaux sociaux qui fera face à la toute-puissance du fric et du flic. Donc quel que soit le président, il ne peut plus se permettre de faire ce qu’il veut ; les majorités aussi ne peuvent plus se permettre de faire ce qu’elles veulent ».

Sept ans après, on peut conclure en disant que Macky Sall a théorisé la magie du clic et Ousmane Sonko l’a concrétisé.