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Armée : le nouveau décret du président créée le « désordre »

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XALIMANEWS: Outre le décret 2019-855/PR du 08 Mai 2019 portant harmonisation de l’âge de la retraite dans l’armée, souligne le journal “Kritik” parcouru par leral.net, le Président Macky Sall a pris le décret N°2019856/PR/MFA du 08 mai 2019 fixant la hiérarchie et les conditions d’avancement des personnels militaires d’active des Armées, de la Gendarmerie et de la Brigade nationale des sapeurs-pompiers (BNSP).
Un décret qui a fini par installer un profond malaise dans toutes les catégories (Officiers, Sous-Officiers et Militaires du rang) parce qu’il acte le vieillissement des effectifs à cause de l’augmentation de la durée de séjour dans tous les grades. Chez les Officiers, de Lieutenant à Colonel, les premières manifestations de colère se font jour aussi bien dans l’armée (Terre, Air, Mer), dans la Gendarmerie nationale que dans la BNSP.

Pourtant, si le professionnalisme de l’armée sénégalaise est vanté dans toutes les Opérations extérieurs (Opex), c’est surtout grâce au dynamisme de ses ressources humaines du fait de sa jeunesse. D’ailleurs, les armées africaines sœurs n’hésitent jamais à s’inspirer du modèle sénégalais. Toutefois, ces mesures, planifiées à huis-clos par de hauts gradés – qui ont pourtant bénéficié des mesures d’avancement remises en cause -, dont le seul objectif était d’allonger l’âge de départ à la retraite des Généraux, ne feront que relever le niveau de vieillissement de l’armée.

Un décret à polémique

A l’analyse, la durée de stabilité cumulée entre le grade de Lieutenant et celui de Colonel, qui était fixé à 13 ans, passe désormais à 20 ans, soit sept ans de plus. En effet, le décret prévoit une durée de cinq ans par grade au minimum, avant que l’Officier ne prétende à une première proposition au grade supérieur, si l’on sait que les Officiers les plus brillants avancent en moyenne à la deuxième proposition. Soit six ans par grade.

Avec ce décret, l’avancement chez les Officiers se résume comme suit : Cinq ans au lieu de trois ans pour le passage de Lieutenant à Capitaine ; cinq ans au lieu de quatre ans pour le passage de Capitaine à Commandant et de Commandant à Lt-Colonel. Pis, pour le passage de Lt-Colonel à Colonel, la durée passe de deux à cinq ans, soit une allongement de trois ans. Si pour les autres grades, la moyenne est de 20% par grade d’une année, pour les Lt-Colonel, le pourcentage d’allongement est de 250%. Les jeunes Officiers parmi les plus brillants (Chef de Corps ou Commandant de Légion) se sentent particulièrement visés par une mesure injuste, dont le but, selon eux, est de porter un coup d’arrêt à leurs ambitions.

Pour la proposition au grade de Général de brigade, les Colonels devront revoir leur ambition à la baisse du fait de la durée de séjour dans leur grade, qui passe de trois à cinq ans. Soit une augmentation de 70%.

De 13 ans, le passage du grade de Lieutenant à celui de Colonel passe à 20 ans

Concernant les Sous-Officiers et les Militaires du rang, la durée de séjour dans le grade a simplement été multipliée par deux voire deux et demi. Ainsi, de Caporal à Caporal-Chef, le temps de séjour passe de six mois à un an. Chez les Sous-Officiers, la durée de séjour passe de trois à cinq ans, entre les grades de Sergent à Sergent-Chef et de deux à cinq
ans, de Sergent-Chef à Adjudant et d’Adjudant à Adjudant-Chef.

S’agissant de la grogne dans les rangs, elle est beaucoup plus prononcée que pour l’harmonisation de l’âge de la retraite, puisque pas moins de sept ans ont été rajoutés sur l’avancement. Conséquence ? Beaucoup d’officiers et de sous-officiers n’auront plus la possibilité de concourir aux diplômes les plus prestigieux : (Diplôme d’aptitude au grade d’Officiers (DAGO), Diplôme d’Etat-major (DEM) et Brevet de l’école supérieur de guerre (ESG), parce qu’ils seront tout simplement atteints par la limite d’âge.

In fine, pour les Officiers, si la moyenne d’âge pour être proposable au grade de Général de brigade était de cinquante ans, elle passe désormais à cinquante-cinq ans au minimum pour les Officiers issus du recrutement direct. Alors que pour les Officiers issus du recrutement professionnel, leur chance d’arriver au grade de Colonel est d’office hypothéquée.

Plus grave, les Officiers de la gendarmerie recrutés sur titre à partir de trente ans (Ingénieur, Etudiants de 3ème cycle etc.), sont condamnés au même sort. En effet, ces derniers n’auront pas le temps d’être Colonel parce qu’ils seront frappés par la limite d’âge de la retraite. Le comble est que, pour une première fois dans une armée si professionnelle et républicaine que le Sénégal, nous allons assister à l’épisode où le Général de Corps d’Armée partira à la retraite en même temps qu’un Commandant. De la même manière, le Sous-Officier du grade d’Adjudant partira à la retraite à cinquante-huit ans, soit deux ans seulement avant un Général de Corps d’Armée.

Un coup d’arrêt à l’ambition des jeunes Officiers

Si le manque d’attractivité à l’origine de la saignée persistante au niveau de toutes les catégories vers des structures plus attractives était brandi comme argument pour une révision des textes sur l’avancement, c’est l’effet inverse qui risque, sans nul doute, de se produire parce que beaucoup d’Officiers menacent de « déserter » les rangs.

En témoigne le nombre de candidatures annoncées lors du dernier concours des Intendants militaires organisé, il y a deux mois, où le Commandement a dû contraindre illégalement, des pilotes de l’Armée de l’Air, brevetés de l’Ecole supérieur de guerre, et d’autres officiers d’autres armes à ne pas y participer.

D’après nos interlocuteurs, ces mesures, au lieu de doper les troupes, vont davantage décourager les jeunes officiers, surtout que leurs ainés désertent les rangs pour les organismes internationaux. Et des exemples ne manquent pas à l’instar du brillant Colonel Moussa Diop Mboup, major dans tous les concours militaires, qui a rejoint la Banque mondiale. Idem pour le Commandant Samba Fall, breveté
de l’Ecole supérieure de guerre, qui a intégré les Nations-Unies. Et tutti quanti !

Un vieillissement des troupes

Last but not least, l’application de cette mesure prévue pour le 1er janvier 2020 – conformément à l’article 49 portant sur les dispositions transitoires -, va d’office créer des injustices criardes au sein de mêmes camarades de promotion qui, pour trois mois de différence dans le passage au même grade, auront un décalage de quatre ans d’intervalle. En d’autres termes, un Lt-Colonel qui est passé le 1er janvier 2018 peut prétendre à l’avancement au grade de Colonel le 1er janvier 2020, après deux ans seulement. Au moment où son camarade promu au grade de Lt-Colonel le 1er Avril 2018 ne pourra, du fait du décret à polémique, prétendre au grade de Colonel qu’en 2024.

Toujours aux chapitres des incohérences du texte, les rédacteurs du décret étaient tellement obnubilés par la hausse de l’âge de la retraite des Généraux, qu’ils ont omis un élément essentiel : La planification des ressources humaines. Sur ce point, les sources du journal prédisent une catastrophe dans l’avancement, particulièrement au grade de Colonel au tableau d’avancement de 2023, car l’armée risque de ne trouver aucun Officier proposable à ce grade après avoir fait avancer les Officiers supérieurs
éligibles. Un constat aux antipodes de l’esprit de l’avancement dans la catégorie des Officiers supérieurs où l’avancement au choix reste le seul et unique critère d’éligibilité.

Dès lors, il ne fait point de doute que des propositions qui ont induit le Président en erreur, se sont inspirés sur certaines grandes armées dont le Maroc, qui l’applique avec un passage systématique de tous les personnels au grade supérieur après une durée constante de cinq ans. À l’inverse, le jeu de l’avancement dans les forces armées sénégalaises est assujetti à un échelonnement suivant des quotas par grade, créant un écart pouvant aller jusqu’à trois ans pour une même catégorie.

Par conséquent, la durée de stabilité qui a été déclinée antérieurement et qui est de vingt-cinq ans entre le grade de Lieutenant et le grade de Général peut aller jusqu’à trente ans, voire trente-cinq ans. La question qui se pose est de savoir comment est-ce qu’un Lieutenant sorti d’école avec une moyenne d’âge de trente ans, pourrait prétendre au grade de Général quand la limite d’âge est fixée à soixante ans ? Hélas, « ce décret ne se justifie nullement et ses rédacteurs se sont lourdement trompés », murmurent des Officiers.

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