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Ahmed Khalifa Niasse ou l’éternel perturbateur de l’ordre établi. (Mohamed Dia)

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Pour mieux comprendre Ahmed Khalifa Niasse aujourd’hui, il faut le comprendre hier. Il a toujours été contre l’ordre établi et est prêt à tout pour le déstabiliser.

Ayant radicalisé sa position, Ahmed Khalifa Niasse avait appelé le peuple sénégalais à faire un coup d’état contre le gouvernement de Senghor et d’établir immédiatement un Etat islamique au Sénégal. Certains disaient que l’Arabie Saoudite était le principal contributeur de son mouvement et d’autres disaient que la Libye aidait financièrement sa cause. Seule la République islamique d’Iran avait refusé d’aider sa cause, car ils disaient ne pas croire à l’exportation de leur philosophie politique.

Il séjournait hors de nos frontières, car les rumeurs, créés par le gouvernement, disaient qu’il avait détourné les fonds destinés à la construction d’un centre islamique à Kaolack et qu’il avait aussi des ennuis avec Air France. Malgré tout cela, le Sénégal demandait son extradition pour qu’il puisse y être jugé pour détournement de fonds. Le gouvernement pensant qu’il séjournait dans les pays du Moyen-Orient.

Ahmed était toujours à l’assaut pour une République islamique, même si le gouvernement ne trouvait pas cela très significatif ni dangereux. Vu que son influence à Kaolack était limitée, il fallait quand même que le gouvernement fasse attention aux jeunes universitaires qui voulaient substituer un nouveau système de pouvoir autoritaire, car le marxisme avait échoué en Afrique. C’est le danger qui guettait le Sénégal qui tentait encore de maintenir une société ouverte et démocratique.

Son ascension politique a commencé durant l’élection présidentielle de 1978 en organisant des rassemblements politiques pour le président Senghor. Comme il n’arrivait pas à mobiliser assez de militants, il a changé sa stratégie et il établit sa base personnelle parmi les universitaires. Il voulait que les jeunes soient conscients des lacunes de l’Etat laïc et aussi de la pertinence de la tradition coranique à notre société.

Pour prouver son point, en avril 1979, il commence à publier un journal islamique appelé « Allahou Akbar » en français et en arabe. Il a reçu un important soutien financier et prouvait se payer les services des rédacteurs en chef brillants. Le président Senghor avait affirmé que l’ancien ministre des Finances destitué, Babacar Ba et la Libye étaient derrière Ahmed. Le ton devenait de plus en plus strident et il avait annoncé la formation d’un parti islamique.

Il dérangeait beaucoup le gouvernement sénégalais et son mouvement commençait à montrer une certaine force, car il disait qu’il avait plus de 300 000 membres, un chiffre que le gouvernement réfutait. En plus de cela, il organisait des camps de vacances et il était devenu très populaire parmi les étudiants, en particulier ceux qui étudiaient la langue arabe. Le gouvernement s’est même infiltré dans la réunion d’étudiants en langue arabe à l’université de Dakar pour mieux comprendre la cause.

Le gouvernement sénégalais voulait empêcher Ahmed de sortie du territoire sénégalais en levant son visa de sortie, mais il avait quand même réussi à se procurer un nouveau passeport et le chef des passeports fut limogé et le gouvernement a aussi demandé à tous les ambassadeurs des pays arabes musulmans de ne pas délivrer de visa pour Ahmed. Il a quand même réussi à organiser un vol spécial à la Mecque pour ses disciples et à son retour, le gouvernement avait interdit l’atterrissage de l’avion et la dernière édition d' »Allahou Akbar » fut saisie.

Le mouvement d’Ahmed était contre la loi et le président Senghor ne pouvait pas autoriser la formation d’un parti politique en violation de la Constitution, qui ne permettait que le quadripartisme. Ahmed avait imprimé beaucoup de documents pour la création de son parti islamique, mais le gouvernement avait tout saisi et contrôlait les mouvements de ses militants. Il a profité de la sècheresse des années 70 pour multiplier ses appels à l’unité islamique, à une dévotion religieuse plus profonde et à l’application des normes islamiques. Beaucoup de Sénégalais répondirent à cet appel et le gouvernement n’avait pas trop de réponses face à l’austérité économique due à la faible récolte.

Le gouvernement n’avait pas trop peur d’Ahmed, mais plutôt de son idéologie, car il avait peur que quelqu’un de plus charismatique prenne le relai du mouvement, menant avec succès un défi populaire à l’ordre actuel. Il avait aussi peur que le mouvement se transforme en un mouvement radical dans le milieu rural et surtout que les gauchistes puissent faire cause commune avec les radicaux islamiques pour mettre en place une base populaire pouvant menacer la stabilité du pays.

Ahmed ne voulait pas d’Etat laïc, et il disait que la laïcité posait un danger à notre société et il répétait partout que le gouvernement n’avait point le droit de lui refuser la formation d’un parti islamique et il a soutenu que le ministre de l’Intérieur Jean Collin, ne pouvait pas en parler, car il n’était pas musulman. Il fallait selon le camp d’Ahmed, de se débarrasser de l’illusion que le leader idéal devait être blanc, mulâtre et ou d’avoir fait ses études en France.

En créant un parti islamique, Ahmed allait menaçait les confréries établies au Sénégal et une concurrence intrinsèque entre elles. Le gouvernement craignait que les autres confréries ne viennent perturber le milieu politique, car dès qu’une confrérie devient militante, les autres suivront et cette cohésion entre les confréries n’arrangeaient pas le gouvernement. La concurrence confrérique arrange le gouvernement, car il pourra mieux régner.

On peut tout reprocher à Ahmed sauf d’être persévérant dans sa manière de lutter contre l’ordre établi.

Ahmed, unissons et cessons de diviser !

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