XALIMANEWS : L’amnistie de l’ancien maire de la ville de Dakar, Khalifa Sall, et du fils de l’ancien président, Karim Wade constituerait un obstacle pour la candidature du président Macky Sall et sa victoire en 2024, tout comme pour son possible dauphin au sein de l’Apr ou de Bennoo Bokk Yaakaar. Le Docteur en communication politique, Momar Thiam, croit fermement que, si Khalifa Sall règle son problème d’éligibilité, il pourrait bien se faire soutenir par ses alliés de la présidentielle de 2019, à savoir Idrissa Seck de Rewmi, tout comme Malick Gakou du Grand parti. Cela, si bien évidemment, «on se base sur le respect de l’éthique, de la déontologie politique et de la parole donnée»,
Certains pensent que le combat qui vaille aujourd’hui pour Karim Wade et Khalifa Sall, c’est d’obtenir une loi d’amnistie. A votre avis, est-ce qu’une amnistie arrangerait le président Macky Sall ?
Il y a deux hypothèses. Si on se pose dans l’hypothèse selon laquelle le président Macky Sall ne se représentera pas en 2024, la question ne se pose pas si ça l’arrange ou pas que Karim Wade et Khalifa Sall soient amnistiés. Maintenant, si on retient l’hypothèse selon laquelle il y a des possibilités pour qu’il se représente parce que, semble-t-il, la Constitution lui permettrait cela d’autant plus que dans cette réforme de la Constitution, la partie où on parle du deuxième et troisième mandat, la formulation était très claire. On dit que le mandat en cours est hors de portée de la présente réforme. Ça veut dire que le mandat de 7 ans est hors de portée de la présente réforme. Donc, si on s’en tient à cette argumentation juridique et ce qui est écrit, cela veut dire que le mandat de 7 ans ne fait pas partie du décompte et que le premier mandat de 5 ans commence en 2019. Sous cette hypothèse, s’il y a amnistie de Karim Wade et de Khalifa Sall et qu’ils soient candidats, bien sûr, cela représenterait un obstacle à, non seulement la candidature éventuelle de Macky Sall, mais aussi à une victoire éventuelle en 2024.
Par rapport à la première hypothèse, celle où le président Macky Sall ne se présenterait pas, ne pensez-vous pas que l’amnistie serait un obstacle pour son possible dauphin ?
J’ose croire qu’en 2024, si le président Macky Sall ne se représente pas, à un an de l’échéance présidentielle, les prétendants à sa succession dans son camp se dévoileraient. On ne sait pas qui il sera. Si toutefois on est dans l’hypothèse d’un dauphinat, c’est-à-dire qu’il «parraine» un candidat issu de son rang, à partir de ce moment effectivement, il y aurait beaucoup à dire pour ce candidat, si Karim et Khalifa Sall sont amnistiés. Maintenant, il se trouve que Macky Sall a été élu, pas avec uniquement l’Apr qui est son appareil, mais aussi avec la coalition Benno Bokk Yaakaar. Qu’adviendrait la coalition en ce moment là ? Est-ce qu’elle va continuer dans la même dynamique de soutien d’un candidat issu de l’Apr ou est-ce que la coalition exigerait légitimement qu’il y ait une autre alternative issue du Parti socialiste, ou du moins de ce qu’il en reste, ou de l’Afp et que l’Apr serait amené à soutenir ce candidat-là ? Autant de questions qu’il faudra se poser à peut-être un an de l’échéance de 2024. Autant de questions que devrait se poser aussi le président de la République et notamment, je dirais plus d’ailleurs le patron de l’Apr qui est le président de la République, pour essayer de trouver la formule la mieux à même de le faire perdurer ou de faire perdurer son camp au pouvoir. Mais, il ne faut pas oublier qu’il peut y avoir des jeux d’alliance. Aujourd’hui, qui dit que ces retrouvailles entre Macky Sall et Abdoulaye Wade ne susciteraient pas demain une espèce d’alliance entre l’Apr et le Pds version Abdoulaye Wade ou Karim Wade, puisque la politique n’est pas une science exacte ?
Est-ce qu’une amnistie constituerait une menace aussi pour des opposants comme Idrissa Seck, Ousmane Sonko, Malick Gakou et autres ?
La reconfiguration de l’espace politique sénégalaise veut que demain, avec la sortie de Khalifa Sall, si toutefois il retrouve tous ses droits, que cette reconfiguration soit vue autrement en ce sens que Khalifa Sall appartient à une coalition, notamment à la présidentielle où vous avez Idrissa Seck, Malick Gakou. Ce qui s’est passé en 2019, Khalifa était en prison et ne pouvant pas être candidat, c’est Idrissa Seck qui a été mis sur orbite. Si on estime que ce gentlemen-agreement s’est fait sur la base d’éthique, de déontologie et de respect de la parole donnée, en 2024, il faut envisager que ce soit Khalifa Sall qui soit candidat et que Idrissa Seck et les autres puissent le soutenir. Je dis bien : si on se base sur le respect de l’éthique, de la déontologie politique et de la parole donnée, donc forcément Khalifa pourrait être candidat et soutenu par Idrissa Seck et Malick Gakou. A partir de ce moment-là, les jeux de coalition vont se redéfinir. Avant cela, vous avez les locales et les législatives. Je pense que l’opposition gagnerait à trouver des programmes alternatifs au niveau local pour pouvoir être majoritaire dans les différentes communes et avoir des maires, mais surtout pour les législatives pour tenter d’être majoritaire au niveau de l’hémicycle.