Je ne suis pas économiste. Je ne m’aventure donc jamais dans le débat sur la monnaie du point de vue technique. Quoique les échanges entre pro et anti CFA me passionnent. Pour des raisons politiques et de bons sens historique. Mais aussi parce que j’aspire à une écriture autonome de l’avenir de l’Afrique par nos enfants. Une cohabitation forcée de six siècles mériterait, tout de même, une pause évaluation pour mesurer le chemin parcouru. Sinon, après 60 ans d’indépendance, il serait largement temps de se demander si « ce que l’on a gagné vaut ce que l’on a perdu » comme s’interroge si justement l’auteur de l’aventure ambiguë, Cheikh Hamidou KANE. Je parle évidemment de notre relation singulière avec la France et, plus précisément, de sa mainmise sur les principaux leviers économiques et financiers de nos pays. Je le répète, c’est la posture politique, nationaliste et panafricaniste qui s’interroge ici. Clairement.
Et c’est l’occasion pour moi d’interpeller, solennellement tous les cadres économiques et financiers du Continent africain et de la diaspora autour des questions suivantes :
– Ne disposons-nous pas, au niveau de l’UEMOA et de la CEMAC, de ressources humaines suffisamment qualifiées pour mettre en place et conduire une politique économique et monétaire en toute indépendance ?
Parlons de l’UEMOA qui vient d’enclencher, quoique l’on puisse en penser sur le fond, une démarche du CFA vers l’ECO. Si l’on considère les discours officiels antérieurs, des mythes ont été définitivement désacralisés. Et c’est une très bonne amorce pour la suite. Nous avons une Banque Centrale qui rassemble des profils pointus et spécialisés. Des hommes et des femmes qui ont fréquenté les meilleures établissements scolaires et universitaires au Monde. Ils ont acquis une expérience de la gestion communautaire de notre économie et de notre monnaie. S’il advenait que la décision politique de battre une monnaie ouest africaine en Afrique soit prise, indépendamment de la France, ces élites seraient-elles capables de relever les défis techniques ?
Ces questions sont devenues incontournables, car les jeunes africains vont continuer à donner de la voix sur ces sujets qui font partie des éléments constitutifs d’une identité nationale. Alors il revient aux têtes pleines de ce Continent, aux cadres supérieurs bardés de diplômes prestigieux, de nous dire s’il est, oui ou non, au dessus de leurs forces de conduire, avec rigueur, le développement économique de l’UEMOA et de la CEMAC.
Ôtez-nous du doute ! Afin que les combats à venir puissent s’adosser, avec espérance et confiance, sur des compétences disponibles et engagées !
Amadou Tidiane WONE