XALIMANEWS- Il était une sorte de tendon pour les plus solides et une lumière pour les faibles. Amadou Guèye Ngom était un bel esprit au service du peuple. Sa plume, reconnaissable entre mille, a séché son ancre un 17 janvier 2010.
Au moment où la rédaction de Xalima lui rend hommage, d’aucuns se souviennent certainement de sa tendre passion pour les lettres ainsi que son sens pointu de la réflexion en tout genre. Ce qui lui a valu d’ailleurs d’avoir été un proche et respecté du Président Senghor. Amadou Guèye Ngom était un fin animateur de la vie sociale au Sénégal qui accédait à tous les salons. Toutefois, il n’avait pas sa langue dans sa poche et sa parole, comme un souffle salvateur, était accueillie au plus haut sommet. Humble et très prévenant, le journaliste avait des amis dans toutes les couches sociales. Son âme d’artiste était mise en avant et l’écrivain était tout aussi habitué aux honneurs dans ce domaine. Mais jusqu’aux derniers temps de sa vie, « le critique social » avait préféré donné une orientation commune à son écriture ainsi qu’à sa pensée comme pour répondre à un serment des plus précieux.
Dix ans après, amis et parents se souviennent de lui comme une référence dans le domaine de la réflexion et de la pensée exclusive pour l’humain et par l’humain. Et c’est dans un contexte social tendu qu’Amadou Guèye Ngom est ressuscité dans son « Point de presse », un point d’histoire qui n’échappe à personne.
Texte publié le 03 décembre 2008
Point de presse !
On nous distrait, on nous empale debout, assis, couché. On nous entube à coups de turbines, de milliards, d’inaugurations en tout genre. Une presse peu exigeante et sans analyse s’empiffre de ragots, des bourdes, frasques et péripéties de la racaille politique. Des supputations sur les chances de tel ou tel lascar au perchoir de l’Assemblée nationale ou de la Mairie de Dakar épuisent inutilement encre et papier. Pour cette presse-là, investigation, analyse et synthèse sont assimilables aux travaux d’Hercule.
La Une ? Comme d’habitude… Juste un autre fait divers que la presse relate, sans trop se poser des questions. Disons, sans se mouiller.
Mort d’enfant ? Tu parles ! Vas plutôt couvrir les messes funèbres de l’Assemblée nationales, les frasques des hurluberlus d’un soir de gala. Vas voir ce que mijote le Roi des Arènes, ce qui se trame au comité du foot ball. -Trouves-moi, le nom de la cinquième épouse du marabout des Assises nationales, lui demande son directeur de publication.
Comme d’habitude, on a vite fait d’oublier la mort de la fillette victime d’un crotale en pleine banlieue dakaroise puis trimbalée de dispensaire en centre de santé jusqu’à ce que mort s’en suive. S’est-on soucié de savoir quelles structures médicales s’en sont lavées les mains, faute de sérum. Comment se fait- il qu’aucun journaliste n’ait voulu creuser un peu plus, en se demandant ce qu’un crotale avait à roder dans nos banlieues, comme si la politique vipérine ne suffisait pas aux nuisances environnementales. Pourquoi ces farfelus n’ont-ils pas identifié les badigeonneurs de mercurochrome coupables de non-assistance à personne en danger ? Pour sûr, l’inquiétude questionneuse ne donnera jamais la migraine aux pigistes bien plus soucieux de raconter les retrouvailles de deux canailles de la pègre politique, d’épier lequel des pugilistes de la Génération du Concret délivrera le premier ou dernier coup bas à son rival.
Ce qui fait dire au professeur Diouf que la presse sénégalaise est un torchon.
-Prof, désolé de vous contredire, cette presse-là sert de papier d’emballage aux boutiquiers de banlieue.
Amadou Guèye Ngom
Critique social