Mbao souffre de tout bord. Alors que sa mer ivre suffoque d’altéragènes provenant de la pollution industrielle, il faut admettre que la cirrhose du poumon vert de Dakar est causée principalement par une urbanisation anarchique galopante qui n’a pas fini d’impacter négativement sur l’environnement de manière générale. Paradoxalement malgré les maintes violations subies, on compte toujours sur la forêt de Mbao pour faire respirer la région de Dakar étant donné qu’elle demeure son plus grand massif forestier.
J’insiste ! Mbao souffre de tout bord. Ici, c’est au jour le jour que l’érosion côtière se vit. La mer avance et avale les terres habitées. Chaque habitant de Mbao, compte tenu de la forte expérience vécue, est capable de faire un pronostic sur l’avenir sombre de la localité. Prions pour que la tendance actuelle se renverse !
Penser au renversement d’une telle tendance est presque utopique compte tenu de la passivité, pour ne pas dire de l’indifférence, notoire de l’Etat face à ce désastre écologique qui fait tout de même le désarroi des populations. Avec des yeux hagards et impuissants elles voient leurs habitations tombées une à une sous l’assaut de la mer. Et ce spectacle se vit un peu partout de Yarakh à Bargny.
Mbao souffre aussi de la forte invasion de programmes d’habitations dites sociales. Des programmes publics et privés et qui ne sont sociaux que de nom. Par ailleurs malgré des coûts exorbitants aucune exigence environnementale n’est respectée généralement avec l’absence des services de l’Etat en charge de ces questions. Deux problèmes s’illustrent au moins. Le grignotage progressif de la forêt classée et la pollution de la nappe phréatique par l’absence de système d’assainissement adéquat. Les eaux usées et autres déchets domestiques empoisonnent la terre et la nappe, sans oubler les déchets des industries installées dans la localité.
La forêt de Mbao fait couler beaucoup d’encre. Classée depuis 1940 par le décret n°979/SEF du 07 mai, elle connait déjà quelques intrusions de l’Homme. Elle est passée par conséquent de 1000 à 700 ha. Une accélération de la dégradation est notée depuis un moment avec les différents projets de l’Etat qui la traverse mais aussi du fait de projets de particuliers notamment l’établissement de nouvelles cités, de nouveaux lotissements, de dépôts, de stations service etc. Cet état de fait a toujours suscité une indignation de certaines associations soucieuses de l’avenir de ladite forêt compte tenu de son importance. Mais leur alerte semble tomber dans l’oreille d’un sourd.
A l’heure où le bradage du littoral tient tout le monde en haleine le Ministre de l’Environnement Monsieur Abdou Karim SALL en phase avec le Maire de la Ville de PIKINE Abdoulaye THIMBO envisagerait une prochaine intrusion dans la forêt classée. Un décret serait en gestation !
Ce projet de déclassement de 10 ha pour des cimetières au profit de la Ville de Pikine est perçu par les populations de Mbao et par tous ceux qui sont conscients des enjeux écologiques du moment, comme la goutte d’eau qui risque de faire déborder le vase. Les gens avertis savent que ce projet de cimetières n’est que prétexte, un tremplin qui mène au véritable but (projet caché).
Pourquoi couper des arbres, éradiquer une couverture végétale, exposer des animaux, couper des chaînes de reproduction pour faire place à des cimetières d’autant plus que d’autres possibilités sont envisageables ? C’est la question que tout le monde se pose !
L’érection de cimetières dans la forêt classée serait une carte blanche pour la brader en toute impunité comme c’est le cas pour la bande des filaos de Guedjawaye. De 14 ha initialement annoncés par Le Président Macky SALL pour des cimetières et aménagements annexes, ils en sont maintenant à leur ultime but : le partage de terre entre privilégiés de la République.
« Un Homme averti en vaut deux. »
Désormais ce modus operandi est su. L’importance cruciale de la forêt pour l’écosystème de Mbao et de toute la région de Dakar généralement est, aussi, avérée. Alors ça serait une irresponsabilité partagée, et par l’Etat et les populations, de laisser poursuivre ce projet de déclassement « partielle » de la forêt.
Contre le bradage foncier, la résistance s’organise un peu partout de Mermoz à Guédjaway, de Malika à Mbao et dans quelques localités à l’intérieur du pays. Nous encourageons et adhérons car ce n’est pas le combat d’un collectif. C’est le combat de tout citoyen soucieux d’un environnement sain notamment de la qualité de vie des générations présente et futures.
Nous dirons à Monsieur le Ministre de tutelle que s’il devait avoir un camp, cela serait être le nôtre.
Abdou DIENE
MEA / (membre de la Plateforme Développement Durable de Mbao)
[email protected]