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Etat d’urgence : malgré le vote du projet de loi n°46/2020, les pouvoirs du Parlement sont intacts

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La Constitution est la Loi fondamentale, la Charte suprême. Elle se trouve au sommet de la hiérarchie des normes. La hiérarchie des normes est « un classement hiérarchisé de l’ensemble des normes constituant le système juridique d’un Etat de droit ». En vertu de ce principe de droit, une norme d’un niveau inférieur doit être conforme à celle du niveau supérieur. Le respect des droits et libertés fondamentales des citoyens sénégalais est défini au niveau de l’article 67 alinéa 1er de la Constitution qui dispose que « la loi fixe les règles concernant les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ». 

L’état d’urgence est d’abord un état d’exception qui nécessite de prendre des mesures exceptionnelles pour faire face à une situation exceptionnelle. Les dispositions relatives à l’état d’urgence et à l’état de siège sont clairement définies à l’article 69 de la Constitution (Charte suprême). Ces dispositions prévoient d’une part, que lorsque l’état d’urgence ou l’état de siège, est décrété par le Président de la République, « L’Assemblée nationale se réunit alors de plein droit » ; et d’autre part que « Le décret proclamant l’état de siège ou l’état d’urgence cesse d’être en vigueur après douze (12) jours, à moins que l’Assemblée nationale, saisie par le Président de la République, n’en ait autorisé la prorogation ».  

Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, à ce jour, samedi 16 janvier 2021, les prérogatives de l’assemblée nationale relatives aux modalités de la prorogation de l’état d’urgence demeurent intactes. Malgré le vote par des députés godillots du projet de loi n°46/2020 modifiant la loi relative à l’état d’urgence et à l’état de siège, élargie aux catastrophes naturelles ou sanitaires, l’assemblée nationale conserve toutes ses prérogatives, car l’article 69 de la Constitution n’a fait l’objet d’aucune modification. En effet, la création d’un nouveau régime juridique qui prenne en compte les catastrophes naturelles et sanitaires dans la loi n°69-29 du 29 avril 1969 relative à l’état d’urgence et à l’état de siège est totalement inconnu par la Constitution. Le nouveau régime juridique inséré dans la loi sur l’état d’urgence n’est prévu nulle part au niveau de l’article 69 de la Constitution dont les dispositions portent sur l’état d’urgence et l’état de siège. La Constitution étant au sommet de la pyramide juridique en vertu du principe de la hiérarchie des normes ; l’ensemble des normes inférieures (ex les lois), doivent obligatoirement se conformer à ses dispositions. En conséquence, la loi scélérate votée par des députés zélés et soumis à l’exécutif qui prévoit un nouveau régime relatif à la « gestion des catastrophes naturelles ou sanitaires » est inconstitutionnelle

La prorogation de l’état d’urgence, et la dérogation au régime de droit commun portant temporairement atteinte aux droits et libertés constitutionnels relève des attributions de l’assemblée nationale. A ce jour donc, ce pouvoir de limitation qui appartient au législateur est intact. Macky Sall a fait modifié la loi de 1969 sur l’état d’urgence et l’état de siège. Mais, il n’a pas fait modifié la Constitution (étape préalable), et précisément l’article 69 qui prévoit clairement un régime de pouvoir partagé (le président décrète l’état d’urgence pour 12 jours ; passé ce délai, c’est l’assemblée en autorise la prorogation). Ce régime existe toujours actuellement dans la Constitution.

Juridiquement, et du point de vue de la Constitution (l’article 69 est inchangé à ce jour), seule l’assemblée nationale est habilitée à autoriser la prorogation de l’état d’urgence. 

Le vote de la loi « attribuant les pleins pouvoirs » n’y change strictement rien, puisque la Constitution (norme supérieure) prime sur la loi, et une loi (norme inférieure) contraire à la Constitution est Inconstitutionnelle.

Conformément à l’Article 74 de la Constitution, le Conseil constitutionnel peut être saisi d’un recours visant à faire déclarer une loi inconstitutionnelle, « par un nombre de députés au moins égal au dixième (1/10) des membres de l’Assemblée nationale, dans les six (06) jours francs qui suivent son adoption définitive ».

Un proverbe soutient et à juste titre que « la loi ne protège pas les idiots ».

Au Sénégal, l’état d’urgence qui a été proclamé le 05 janvier 2021 sur toute l’étendue des régions de Dakar et Thiès prend fin, le dimanche 17 janvier 2021. 

Il faut le marteler : tout décret pris par Macky Sall pour proroger l’état d’urgence ou restreindre les déplacements sera illégal et pourra faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir (cf article 74 de la loi organique n°2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême). En effet, ledit décret doit obligatoirement viser la Constitution avant de viser la loi n°69-29 du 29 avril 1969 relative à l’état d’urgence et à l’état de siège modifiée. La difficulté insurmontable pour Macky Sall est qu’il ne pourra pas viser la Constitution, puisque l’article 69 de la Constitution ne prévoit pas la création d’un nouveau régime qui prenne en compte les catastrophes naturelles et sanitaires dans la loi n°69-29 du 29 avril 1969 relative à l’état d’urgence et à l’état de siège (ce nouveau régime juridique qui relève du droit commun est inconnu par l’article 69 de la Constitution).

Que Macky Sall publie un décret, dont le 1er visa porte obligatoirement la mention « Vu la Constitution » ! Osera-t-il le faire, lui qui cherche à cacher toutes ses turpitudes ? 

Nous ne pouvons terminer notre analyse, sans une forte pensée à notre compatriote Boubacar Seye, Président de l’organisation dénommée « Horizon sans frontières », victime des agissements ignobles d’un régime hors la loi, moribond, violent, totalement incompétent et liberticide. 

Nous exigeons sa libération immédiate et tenons l’état sénégalais, et particulièrement Macky Sall, pour responsable de toute atteinte à son intégrité physique et morale.

Dans son « Discours sur la servitude volontaire », Etienne de la Boétie se demandait pourquoi certains hommes acceptaient volontiers de subir la tyrannie d’un homme alors qu’ils pourraient, refuser de s’y soumettre. 

Macky Sall est atteint du syndrome d’Hubris (maladie du pouvoir) : sa confrontation avec les sénégalais est inéluctable. C’est une question de temps : la somme des colères finira par le perdre.

Seybani SOUGOU – E-mail : [email protected]

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