Depuis quelques jours, le Sénégal découvre à quel point ses libertés sont en cage et sa stabilité sociale chahutée. Voici des années que, journellement, j’alerte contre cette menace. Elle est maintenant un phénomène social total, aurait dit Marcel Mauss.
L’accélération vient d’une série de facteurs explicatifs sur lesquels je ne souhaite pas m’étendre pour ne pas prendre position ni affliger qui que ce soit.
On sait simplement que les questions salaces, politiciennes, entre massages et infidélités, manipulations des consciences et des cœurs, sans compter les insultes et les arrestations à tout va ont fini par créer ce climat délétère irrespirable qui prévaut dans le pays.
Soyons honnêtes: personne ne doit s’attendre à mon absolution de l’acte (ou des actes!) léger d’un Ousmane Sonko qui n’avait rien à faire dans un salon de massage en plein couvre-feu.
Il n’est pas question non plus que je couvre les insulteurs de Pastef dont les méthodes excessives contre leurs contradicteurs ou pour imposer leurs vues et volontés étaient vouées à leur revenir en plein visage -sous la forme de cette traque et de ces arrestations dont font l’objet leurs membres.
Qu’ils redescendent donc sur terre, soient plus polis dans leur langage et se montrent plus humbles en participant au débat public qui ne doit pas unilatéralement aller que dans le sens de leurs croyances et projets de captation irréversible du pouvoir pour leur mentor malgré ses frasques qui commencent à être excessives et injustifiables.
Et qu’ils fassent, pour commencer, cette autocritique essentielle sur les causes des tourments de leur chef et de leurs militants arrêtés en se démarquant de cette propension à la victimisation ou à ce sentiment d’être sortis de la cuisse de Jupiter qui les caractérisent. En cela, à quelque chose, malheur peut, ici, plus oque jamais être bon.
De grâce, il faut cesser de prendre les gens pour des dupes. De lourdes fautes ont été commises. Viol ou pas viol, ce qui s’est passé dans cet obscur salon de massage est honteux et qui sait criminel. Et, de toute évidence, les explications jusqu’ici fournies ne les ont pas levées. Elles ont accentué le doute !
Cela dit, ce n’est pas parce que l’imprudence, les faiblesses et l’inexpérience, pour reprendre les mots précis et puissants de Maître Abdoulaye Wade, qui sait de quoi il parle, ont ferré dans un piège Sonko et co, qu’il est légitime qu’un État bandit en profite pour pousser ses pions criminels.
Dire d’un côté que le crime de Sonko, ou ce qui en tient lieu, relève de la justice et d’un conflit civil face à son accusatrice, puis déployer, dans le même souffle, la puissance publique pour traquer et arrêter, surtout semer la peur afin d’imposer un agenda, c’est profiter de fautes privées et personnelles pour forcer sur le pays des fautes et crimes politiques.
L’Etat a tort. Macky SALL a tort. Les forces de défense et sécurité ont tort. Puisqu’ils participent à un projet plus dangereux de prise en otage des libertés publiques et individuelles.
C’est une justice dévoyée et déséquilibrée qui se donne a voir dans le seul but de soutenir le rêve illégal d’un troisième mandat entretenu par un homme qui sent que sa seule survie dépend de sa pérennisation au pouvoir, y compris au moyen d’une dévolution anti-démocratique pour couvrir les mega-crimes judiciaires, économiques et politiques planant sur sa tête.
Pris par la propre peur née des actes qu’il a posés, notamment de tortures et de détentions arbitraires, dictatoriales, contre quiconque s’oppose à son césarisme, Macky SALL se retrouve paradoxalement à augmenter la montagne de fautes qu’il a déjà commises.
Il a fini par faire du Sénégal un pays où les libertés sont sous éteignoir. Dans une prison.
Que Sonko et sa bande ne méritent aucune circonstance atténuante pour avoir prêté le flanc est une chose; que nos libertés, patrimoine de tous les Sénégalais, en soient des victimes collatérales au service de criminels d’état, c’est encore plus grave.
Macky SALL, enlève ton coude et ton genou de nos libertés. Libère-les : c’est ce qui nous importe, avant et au delà du sort de Sonko ou de quelque homme politique, surtout mouillé dans des affaires louches.
Ce sont les fondamentaux de notre pays que tu massacres et ça nous ne l’accepterons jamais.
Ne touche pas à nos libertés. Enlève tes mains! Tu commences à trop faire, confirmant ainsi la culture du brigand politique qui irrigue tes veines.
Adama Gaye * est un opposant au régime de Macky SALL et en exil loin du Sénégal.
Ps: Pour le principe, au nom d’une clémence utile à l’apaisement des tensions, je souhaite que les membres de Pastef qui ont été arrêtés soient libérés mais qu’ils ne se mettent plus à bruler les biens d’autrui ou de l’état ni à insulter les gens pour imposer leurs vues. Il n’est pas question que l’insolence soit récompensée! C’est intolérable.