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Observation sur la décision du CRD statuant en commission litiges sur la saisine de la ville de Dakar demandant au CRD de mettre un terme à la procédure de passation de marché portant sur les travaux de reconstruction du marché Sandaga (Par Dr Papa Makha Diao)

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Observation sur la décision n° 059/2021/ARMP/CRD/DEF du 05 mai 2021 du Comité de Règlement des Différends statuant en commission litiges sur la saisine de la ville de Dakar demandant au CRD de mettre un terme à la procédure de passation de marché portant sur les travaux de reconstruction du marché Sandaga

Le Samedi 22 Mai 2021, un titre d’un quotidien de la place a attiré notre attention : Soham El Wardini traine la Mairie de Dakar-plateau devant l’ARMP. Pourquoi la ville de Dakar exige l’arrêt de la procédure de passation du marché ? Le « juge des marchés publics » se déclare incompétent ? Malheureusement, le contenu de cet article ne renseigne pas à suffisance sur les motivations du régulateur à fonder sa décision d’incompétence.

En examinant la loi n° 2013-10 du 28 décembre 2013 portant Code général des Collectivités Territoriales, modifiée (J.O.R.S n° 6765 du Samedi 28 Décembre 2013), il ne nous a pas été permis de saisir les compétences des deux communes en matière d’infrastructures concernant les marchés. Sur ce point, la loi précitée ne précise pas les compétences de la ville et de la commune. 

Ainsi, l’objet de cette brève réflexion n’est pas de revenir sur les compétences de la ville de Dakar et de la commune de Dakar Plateau. Mais, il s’agit plutôt d’analyser les raisons qui ont amené l’ARMP à se déclarer incompétente sur la saisine de la ville de Dakar de mettre un terme à la procédure de passation de marché portant sur les travaux de reconstruction du marché Sandaga. En cherchant sur le site de l’ARMP, nous sommes tombés sur la décision du CRD objet de l’analyse.

Dans son souhait d’obtenir de l’ARMP l’arrêt de la procédure de passation lancée par la Commune de Dakar Plateau pour les travaux de reconstruction du marché Sandaga, la ville Dakarsoutient qu’elle détient des droits réels et est propriétaire de l’infrastructure.

Pour sa part, le CRD de l’ARMP reconnait que même si la saisine est relative à une procédure de passation de marché, il reste que l’objet du litige ne porte pas sur une question de marché public.

Dans ses conclusions, le CRD de l’ARMP s’est déclaréincompétent pour connaitre un tel litige et observe que la résolution de la question posée qui porte sur des aspects non liés aux marchés publics est préjudicielle et le Comité de Règlement des Différends dont les missions sont précisées au niveau de l’article 22 du décret n° 2007-546 du 25 Avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l’ARMP n’a pas compétence pour en donne suite.

Il y’a deux choses qui, à notre avis, nous semble important dans le raisonnement du régulateur : le fait que l’ARMP estime que la saisine est relative à une procédure de passation de marché d’une part, et l’objet du litige qui ne porte pas sur une question de marché publics, d’autre part. 

S’agissant de la première situation, le régulateur s’accorde sur le fait que la saisine est relative à une procédure de passation de marché. Ainsi, cette saisine se justifie et s’analyse comme une intervention volontaire à une procédure de passation dont la ville n’est pas partie mais se sentant lésée par une telle démarche.  Ce, d’autant plus que l’article 20 décret n° 2007-546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l’Autorité de Régulation des Marchés publics (ARMP) (JORS N° 6349 du samedi 2 Juin 2007) dispose que le Comité de Règlement des Différends est chargé, entre autres, de recevoir les dénonciations des irrégularités constatées par les parties intéressées ou celles connues de toute autre personne avant, pendant et après la passation ou l’exécution des marchés publics et délégations de service public…

Ainsi donc, la demande de la ville de Dakar a un fondement réglementaire. Toutefois, il importe de relever que les conseils de la ville auraient dû demander à Mme le Maire de la ville de Dakar, de s’adresser au Président du Conseil de Régulation, d’une dénonciation de la procédure de passation. 

Pour ce qui concerne le deuxième point, il convient de noter que le CRD fait observer que l’objet du litige ne porte pas surune question de marché publics. Et, c’est là où ne nous sommes pas en phase avec l’ARMP. 

Le régulateur, en rendant cette décision d’incompétence, devait certainement se remémorer de sa décision n°127/10/ARMP/CRD du 15 septembre 2010 du Comité de Règlement des Différends (CRD) de l’Autorité de Régulation des Marchés publics (ARMP). 

Dans cette espèce, l’objet du litige portait sur le décret n°2010-632 du 28 mai 2010 instituant un système de contrôle et de tarification des communications téléphoniques internationales entrant au Sénégal. C’est à la suite de la prise du décret précité et sur dénonciation du 9 août 2010 de la SONATEL, que le CRD a ordonné la suspension de la procédure relative à la conclusion du contrat entre l’ARTP et la société Global VOICE avant de l’annuler au fond.

Si le CRD se permet d’avancer que l’objet du litige ne porte pas sur la procédure de passation de marché, il demeure qu’il se devait de prendre, au moins, des mesures conservatoires concourant à mettre purement et simplement en stand-by le contrat comme il l’avait fait dans l’affaire Global VOICE.

D’ailleurs, la Cour suprême l’avait conforté en estimant que la SONATEL a déposé le 10 janvier 2011 au Greffe de la Cour, un mémoire qui doit s’analyser comme une intervention volontaire. En matière d’excès de pouvoir, l’intervention est recevable dès lors que son auteur justifie d’un intérêt à intervenir (CS. Arrêt n° 20 du 12 Avril 12, A.R.T.P- État du Sénégal c/ ARMP, Inédit).

En se déclarant incompétent d’un litige qui ne porte pas sur une question de marché public, le CRD refuse par la même occasion de connaitre une affaire relative à une procédure de passation de marché. Or, c’est là l’une de ses missions principales. 

Également, il peut donner l’occasion à la Commune de Plateau d’exécuter le marché alors que l’infrastructure ne lui appartient pas selon la partie demanderesse. Certainement, l’affaire sera transférée devant le temple de Thémis alors qu’entre temps, le marché commencera un début d’exécution. Ce qui peut susciter encore d’autres contentieux.  

En tout état de cause, l’ARMP s’est beaucoup plus fondée sur l’application stricte du texte portant son organisation et son fonctionnement que sur sa mission principale à travers la dimension régulation. Or, celle-ci doit apparaitre comme le fait de régler, l’action de régler, de répondre aux préoccupations des acteurs intervenant dans le champ de la commande publique. 

Dr. Papa Makha DIAO

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