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[DOSSIER] A la découverte de Ziguinchor

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La branche sénégalaise de l’Alliance Africaine des jeunes catholiques (Ymca) a tenu une session de formation à Ziguinchor sur les techniques de communication. Pendant quatre jours ( 14 au 17 février 2011), 17 jeunes filles ont été formées en écriture radio, presse écrite, de poésie et de manipulation de photo. Un atelier tenu sous la direction de professionnelles sénégalaises dont Khady Raissa Diedhiou de la Rts Ziguinchor (radio) et Denise Zarour Médang de Sud quotidien (presse écrite). Cette initiative a permis à Ymca de recueillir des récits, des reportages sur la vie quotidienne des populations dans les zones de conflits, mais aussi à travers des découvertes de certains sites de la commune de Ziguinchor.
Sud quotidien publie quelques articles écrits lors de cet atelier d’écriture en maintenant la signature des auteurs.

DECOUVERTE DE LA REGION DE ZIGUINCHOR

Une cité conviviale

Nous sommes le mercredi 16 février 2011, il est 13h passée de quelques minutes et je m’apprêtais à effectuer une promenade avec des copines dans les rues des quartiers Boudody et Escale de Ziguinchor. L’ambiance est joviale sous un soleil de plomb, en ce jour de férié, lendemain de Maouloud. Malgré la chaleur, on sent à fleur de peau la fraicheur du vent, sans doute une proximité du fleuve Casamance.

Les feuilles de cocotiers, qui longent la clôture de l’hôtel Kandiandoumagne, « dansent » sous l’effet du vent. Nous marchions à petit pas, soudain une odeur nauséabonde effleure nos narines, c’est celle d’une eau verdâtre qui vient des maisons des HLM Boudody et qui traversent la route qui mène au Marché au poisson.  Face à ce désagrément, nous avons bouché nos narines et hâté le pas. Juste en face de ces maisons en R+1, se trouve un atelier de menuiserie d’où vient un bruit assourdissant de scie à moteur qui coupe les planches.

A droite de la rue, l’école française François Rabelais avec sa magnifique peinture en vert et blanc, rend l’atmosphère plus gaie. Juste à coté, flotte le drapeau tricolore du Sénégal dans l’enceinte de la brigade de la gendarmerie.  Une parfaite cohabitation entre la France et le Sénégal qui sauvegarde les relations diplomatiques. Pendant que j’observais l’étendard national, un jeune homme marchait dans ma direction, serviette à la tête, sans doute pour se protéger des rayons du soleil. Il nous regarda avec une mine sympathique et nous salua. Tout au long de la promenade, j’ai lu à travers les visages et les regards des personnes que je rencontrais un sentiment de sympathie doublé de curiosité. Curieux de savoir ce que font de si élégantes jeunes filles sous ce soleil de 13h, arpentant les rues de Ziguinchor.

Nous continuâmes notre marche et passâmes devant la gouvernance, le trésor, la poste et la société générale des banques au Sénégal. Arrivée à la rue qui conduit à la CBAO (Compagnie Bancaire de l’Afrique de l’Ouest), les autres filles prirent un autre chemin qui mène au marché. Il ne restait plus que Rachelle, Jeanine et moi alors que le centre ville était toujours désert, loin des affluences des jours ouvrables.

Près de l’hôtel Ndaary, un vieux handicapé sur un fauteuil roulant m’interpelle. D’abord, j’ai cru qu’il me demandait de l’aumône, mais il me proposait plutôt de lui racheter sa boite de craie à 1500f Cfa, pour payer son billet de retour au village. Jeanine était loin devant, alors j’appelle Rachelle et lui explique la proposition du vieux, mais elle non plus n’avait pas cette somme. Alors je dis au vieux avec beaucoup de tact que je n’ai pas 1500f cfa, mais par contre je lui donne la seule pièce que j’avais dans mon portefeuille, 100f Cfa.
Tout à coup nous nous sommes rendus compte de l’heure qu’il faisait, toutes les trois avons emprunté la rue Javelier pour retourner à l’hôtel en passant devant l’imposant bâtiment du conseil régional, l’Etat major de la gendarmerie et rejoindre notre lieu de séjour.

Sawdiatou  Sadio

LA VIE D’UN ENFANT DE LA RUE

Entre espoir et désespoir

La mendicité est devenue monnaie courante à Ziguinchor. Une région située au Sud du Sénégal. Dans tous les coins de la ville, des enfants, des jeunes et vieillards sont dans les rues,  à la quête de l’aumône.   Un tour dans la cité, nous a permis de constater que la mendicité est une réalité dans la partie méridionale, jadis considérée comme le grenier du Sénégal.

Pour ce jeune garçon, âgé de 7ans, assis devant le portail d’un hôtel de la région, le visage crispé, portant des haillons, les pieds nus, tenant à la main un pot de tomate vide, guettant les passagers :  « chaque matin de bonne heure, je fais des kilomètres pour aller demander de l’aumône. Il me faut rapporter la somme de 300frs pour mon maître coranique.». Le calvaire de ces enfants talibés constitue le bonheur des maîtres coraniques qui prennent toutes les sommes collectées par ces talibés. Venus le plus souvent des pays voisins du Sénégal pour apprendre le coran, ces enfants sont exposés à toutes formes d’exploitations. «  Après le versement de la somme demandée, nous n’avons pas droit aux bonnes choses préparées chez notre marabout. Nous vivons des restes que l’on nous distribue au cours de notre passage dans les maisons pour demander de l’aumône. Il s’y ajoute que la nuit, c’est une petite chambre qui nous est réservée pour le repos » s’est désolé cet enfant qui n’a pas vu ses parents depuis très longtemps.

Originaire de la République de Guinée, ce garçon nous a renseigné que son père et sa mère sont en vie. Mais  cela fait trois (3) ans qu’il ne s’y est pas  rendu pour  les revoir. Ainsi dans un ton de désolation, il a lancé : « ma famille me manque beaucoup. Si j’avais la moindre possibilité d’y retourner, je le ferais. Car chez mon maître, je vis l’enfer.»

Aujourd’hui ce garçon, comme plusieurs de ses semblables, se souvient de son arrivée au Sénégal. Il explique les raisons de son départ de la maison familiale ou du discours tenu par ses géniteurs. «Quand je suis arrivé pour la première fois au Sénégal, j’avais peut être 3ans. Je passais tout mon temps à pleurer et à réclamer  ma mère. Je l’attendais avec espoir quelle vienne me chercher mais sans succès. Aujourd’hui, je me suis résigné en  voyant des enfants de mon âge, dans la même situation que moi. Jai compris que ma mère ne viendrait plus même si notre séparation est dure à supporter, elle se  doit de respecter la décision de son mari qui avait du mal à me supporter dans mon pays natal. Mes parents m’ont dit qu’ils m’amènent au Sénégal pour faire des études coraniques dans le but  de maitriser le livre Saint de l’Islam, d’apprendre l’humilité, l’endurance face aux épreuves de la vie et avoir une qualité d’un bon musulman» a-t-il souligné. Perdant tout espoir de revoir sa mère, il a renchéri en disant. « je suis convaincue que ma maman ne viendra jamais me chercher. Elle a fait un choix dans sa vie, celui de préserver son foyer en me sacrifiant car mon beau père l’a demandé de choisir entre son ménage et moi ».

Victimes de la négligence ou de l’ignorance de leurs parents, ces enfants vivent dans une précarité très avancée et sont souvent battus quand ils ne remplissent pas leur part du contrat. Celui du versement régulier d’une somme bien déterminée par le marabout.

Ephigénie Sambou

MARCHANTS AMBULANTS A ZIGUINCHOR

Les enfants sont les plus vulnérables

Les enfants sont de plus en plus présents dans la sphère des métiers à petit revenu. A Ziguinchor, ce phénomène est devenu presque normal.  Ces petites filles qui vendent des cacahuètes, du « nana » ( des feuilles aromatisées qu’on met dans le thé ou dans les jus de fruits),  sont âgées entre 7 et 10ans. Chaque jour, elles quittent leur  quartier  situé  à la périphérie de Ziguinchor. Elles sont  obligées de braver le soleil, parfois le froid pour arriver en ville qui est à 2km ou plus de leurs habitations pour y écouler leurs marchandises. Au marché Escale, un des  lieux de commerce de la ville de Ziguinchor les plus visités, c’est l’endroit que j’ai choisi pour  mon reportage.

Il est 10h et quelques minutes, dans un petit coin, pas très propre, sont assises deux petites filles mal habillées,  des plats contenant des sachets de cacahuètes sur leur tête. Elles sont des sœurs. L’une s’appelle Aminata et âgée de 9ans et l’autre Mariama, de 7ans. Elles  habitent toutes, le quartier de Lyndiane.   La première, la voix captivante, joli sourire,  elle mène une vie qui n’est pas de tout repos. Son plat de cacahuètes sur la tète, elle me raconta: «j’habite lyndiane. Nous venons chaque jour, ici, pour vendre  les cacahuètes de notre maman. On quitte chaque jour à 9 h la maison pour faire le chemin  ensemble avec d’autres filles qui habitent dans les parages. Dès fois, avant d’arriver au marché, on peut vendre entre 200frs et 500frs sur la route. Mais, en ville on vend plus, parce qu’il y’a plus de monde au marché escale».

Ces enfants ne sont pas  instruites.  Aminata, l’air fatigué, témoigne :  : «  je ne suis pas allée à l’école parce que mon père  a dit qu’il n’a pas les moyens de m’inscrire et de m’acheter les fournitures.  En plus, il y a les tenues exigées maintenant par les établissements. L’option de mon père  est de nous inscrire à l’école coranique, ma petite sœur et moi ainsi que mon jeune frère âgé seulement de 4 ans. Nous vivons dans une petite case modeste.  Mon père était cultivateur et ma mère est ménagère.   C’est avec le revenu de la vente des arachides, que ma mère utilise nous nourrit. Nous n’avons alors d’autre choix que d’aller vendre tous les jours, pour avoir de quoi manger à la maison. Mais, c’est vraiment trop dur, parce qu’il arrive  parfois  que de grandes personnes prennent notre marchandise sans nous payer et nous demandent de revenir le lendemain et elles ne nous payent jamais».

Mariama, quant à elle, m’a dit  que  leur père avait un grand champ dans le village de Bourofaye. A cause du conflit, ils se sont réfugiés à Ziguinchor. « Je me rappelle, nous allions là-bas pour cueillir les fruits, mes frères et moi.  Il y’avait toutes sortes d’agrumes à savoir  des mangues, des oranges, des papayes, des mandarines entre autres pour les vendre au marché.  Nous étions très heureux  au village, mais un jour et pour toujours, les rebelles nous ont chassé et nous ont obligés à aller et à rester à Ziguinchor ou la misère est vraiment ressentie. Pour subvenir à nos besoins, il nous faut marcher chaque jour des kilomètres pour aller vendre les produits après les avoir achetés. »

Mame Fatou Dramé

BALLADE  EN PLEIN CENTRE VILLE.

Ziguinchor agonise

Le  mercredi 16 février 2011 correspond au troisième  jour de notre formation, organisée par Ymca. Après une série d’ateliers sur les techniques d’écritures, basée sur l’éveil, je me suis intéressée au quartier Boudody, non loin de l’hôtel Kadiandoumagne pour la pratique. Ainsi, en parcourant les différentes artères de la ville, je me suis rendue compte que Ziguinchor agonise. Le commerce, la voirie, entre autres, connaissent une régression très avancée. Au centre ville et plus précisément au quartier Escale, une vendeuse d’objets d’arts, présente sur les lieux depuis belle lurette, a renseigné que ce n’est pas facile. Elle avait plus de clientèle que maintenant car le pays était visité par les touristes. Ce qui n’est plus le cas. Une situation qui, selon elle, découle de la crise qui y sévit depuis plus de 25ans. Quelques mètres  après, se trouve le quartier de Boudody. En m’y promenant,  j’ai remarqué que ces habitants n’ont pas de fosses septiques. Ce qui fait que les eaux coulent dans les ruelles. Une situation favorable au développement des mouches, des moustiques qui entrainent des maladies. Non seulement ces écoulements sentent mauvais mais ils ne sont pas agréables à voir dans un quartier  qui se situe au centre ville  et qui fait courir les étrangers. Il s’y ajoute que  les caniveaux sont à ciel ouvert et à la merci des ordures. Hormis cet état de fait, c’est un quartier où il fait bon vivre. C’est le calme la nuit, les habitations  sont plus ou moins bien faites.

A coté de ce quartier, se trouve la gouvernance.  Un lieu historique  qui, vers les années 1980 fut le théâtre de confrontation entre l’armée sénégalaise et les forces du maquis. A l’intérieur de la cour, des arbres sans feuilles, une ancienne construction délabrée, des machines pour la culture, des tracteurs, ornent le décor. Juste en face de la gouvernance, se trouve une place publique, mal entretenue. Ce site bien décoré, aurait offert à la Région un beau visage.  Malgré tout, il demeure un lieu paisible, fréquenté par les populations. Les oiseaux en ont aussi fait leur site favori.  On les entend chanter comme dans la campagne.

A la rue du général De Gaule, l’éclairage public est souvent allumé en plein jour. Plus loin au marché de l’Escale, une vendeuse d’oranges  qui exerce ce métier depuis un an et demi, a soutenu : « je ne trouve pas mieux à faire que ça. J’ai quitté ma maison  et mes champs à cause du conflit  que nous vivons tous. Je suis désespérée. Voilà, pourquoi  je fais  ce petit commerce pour subvenir à mes besoins ». Et de renchérir :  « depuis plus de 25 ans, les hommes sont à la quête d’une solution pour une fin définitive de la crise.   Si aujourd’hui, la résolution venait des femmes, elles seront honorées ».

Pas plus  loin d’elle, se trouve une grande boutique dans laquelle  il y a des produits alimentaires. Elle est occupée par un Mauritanien qui est au Sénégal  depuis 2005. Ce dernier pensait qu’il  ferait plus  d’économie en venant s’installer à Ziguinchor et c’est le cas. Il  affirme: « J’ai de la clientèle et même beaucoup, elle augmente surtout pendant les périodes de fêtes ». Parlant de la situation de la région et plus particulièrement de la crise, ce monsieur a laissé entendre: « je n’ai aucune idée de ce qui se passe à ce propos. Tout mon souhait, c’est qu’on arrive un jour à résoudre ce problème ».   A 13h30, devant un restaurant, l’odeur de l’une des plats les plus cuisinés de la région attire mon attention. C’est le caldou  (poisson à la sauce blanche)

Julienne Toupane.

sudonline.sn

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