L’hystérie, la détermination, par moments l’insolence, la violence verbale et physique de l’impressionnante foule qui a déferlé aux alentours de l’Assemblée nationale et dans les grandes artères de Dakar sont autant d’ingrédients qui ont donné du fil à retordre aux forces de l’Ordre, dans la journée du jeudi noir. Souvent sans concertation, de façon spontanée, les gens sont sortis pour hurler « non » à l’énième tripatouillage de la Constitution, destiné à imposer l’impopulaire « ticket » President-Vice-Président au peuple sénégalais.
Alors qu’on s’attendait à une confrontation inéluctable avec les masses, les policiers et les gendarmes sont restés zen, même s’il y a eu des dérapages çà et là. Qu’est-ce qui explique cela ? Le commissaire central de Dakar, Harona Sy, qui a bien manœuvré au cours des échauffourées, n’est pas étonné de l’issue des manifestations, parce qu’un travail préparatoire a été fait en amont : « selon qu’elle est interdite ou autorisée, les préparations à une manifestation sont différentes. Dans le deuxième cas de figure, comme jeudi, c’était plus difficile, parce qu’il faut faire face aux gens à qui l’on a permis de manifester. Bien entendu, il y a eu une préparation psychologique spéciale qui nous a permis d’avoir la situation sous contrôle ». Pour y arriver, il fallait reconnaître les têtes de file, leur parler, les raisonner, s’organiser pour qu’il n’y ait pas de blessés ni de morts. Seuls deux voleurs ont été gardés à vue.
Si les gens ne se montraient pas particulièrement violents, on les laissait vaquer à leurs occupations. « Mais quand il s’agit d’une manifestation non autorisée, là c’est la confrontation », précise le commissaire Central.
Du côté de la gendarmerie qui a compté deux blessés dans ses rangs, l’on souhaite garder l’anonymat. La préparation psychologique se fait dans tous les événements de cette envergure. D’autant que la couleur a été donnée par les uns et les autres et l’on savait que ce ne serait pas une promenade de santé, précise-t-on. La consigne qui a été donnée était de ne pas systématiquement arrêter les manifestants, mais plutôt de disperser la foule. Faisant sans doute allusion au meurtre de Malick Bâ, abattu à Sangalkam, notre interlocuteur reconnaît que « c’est vrai que des bavures peuvent avoir lieu de temps en temps, mais les gendarmes sont restés les mêmes, calmes et républicains ».
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