La rébellion libyenne a proclamé révolue l’ère de Mouammar Kadhafi après sa prise de contrôle de la majeure partie de Tripoli, la traque du dirigeant libyen s’intensifiant lundi et la communauté internationale se préparant à l’après-Kadhafi.
Plus de six mois après le début du soulèvement en Libye à la mi-février, la communauté internationale a estimé lundi que le régime libyen «touchait à sa fin», après le lancement samedi par les insurgés d’une offensive sur Tripoli.
Le président américain Barack Obama a exhorté le dirigeant libyen à annoncer «expressément» son départ après 42 ans au pouvoir
Avec l’ouverture d’une période d’incertitudes dans ce riche pays pétrolier, le patron de l’ONU Ban Ki-moon a convoqué un sommet sur la Libye cette semaine, le Groupe de contact se réunira jeudi à Istanbul et un sommet du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine est prévu vendredi à Addis Abeba.
De nombreuses capitales occidentales étaient préoccupées par l’incertitude concernant un possible avenir démocratique de la Libye, alors que des responsables arabes s’inquiètaient pour son intégrité territoriale.
Fidèle à sa réputation de pugnacité et défiant les appels de la communauté internationale et des rebelles à se rendre, M. Kadhafi s’accrochait toujours à ce qui lui reste de pouvoir. La Maison-Blanche a dit ne disposer d’aucune preuve de son départ de Tripoli et la rébellion a dit ignorer où il était.
Après avoir juré de continuer à résister, le leader libyen, selon une source diplomatique, se trouverait toujours dans sa résidence du quartier de Bab Al-Aziziya à Tripoli, devant laquelle de violents combats avaient eu lieu le matin avant de baisser d’intensité en soirée.
La rébellion avait annoncé avoir «arrêté» dimanche deux de ses fils, Mohamed et Saïf al-Islam.
Mais dans la nuit de lundi à mardi, un haut responsable des rebelles a indiqué que Mohamed avait réussi à s’échapper et à Tripoli, Saïf al-Islam, le deuxième fils du dirigeant âgé de 39 ans, s’est présenté devant des journalistes pour «démentir les mensonges».
Il a par ailleurs assuré que Tripoli était «sous le contrôle» du régime. «Tripoli est sous notre contrôle. Que tout le monde soit rassuré. Tout va bien à Tripoli», a indiqué Saïf al-Islam à des journalistes emmenés en voiture dans le périmètre de la résidence de Mouammar Kadhafi à Tripoli.
Il y était attendu par quelques dizaines de sympathisants qui brandissaient son portrait, celui de son père ainsi que des drapeaux libyens et a serré les mains qui se tendaient vers lui.
Les rebelles sont entrés dimanche pratiquement sans résistance de la part des forces pro-Kadhafi dans la capitale, où les habitants oscillent entre crainte et jubilation.
Ils ont atteint la place Verte, un lieu symbolique où les partisans du régime avaient l’habitude de se rassembler et que les insurgés ont rebaptisée «place des Martyrs». Une foule en liesse a dansé toute la nuit en agitant des drapeaux rouge, noir et vert, aux couleurs de la rébellion.
Des affrontements ont eu lieu lundi toute la journée dans plusieurs quartiers du centre-ville, ont indiqué des témoins en faisant état de la présence de tireurs embusqués pro-régime sur le toit d’immeubles. Les rebelles ont pris le contrôle des locaux de la télévision d’État, qui a cessé d’émettre.
Les rebelles attendent le renfort de milliers d’autres combattants venus d’autres régions du pays. Ils hésitent sur la manière d’avancer: rapidement à travers de grandes avenues exposés aux tirs des snipers, ou lentement à travers le labyrinthe de ruelles sans savoir qui les attend au tournant.
A Benghazi, les rebelles ont confirmé que «plusieurs navires sont arrivés» à Tripoli «depuis Misrata, avec à leur bord un grand nombre de combattants et de munitions».
Les rebelles de l’enclave côtière de Misrata ont annoncé pour leur part avoir intercepté lundi une colonne de militaires pro-Kadhafi venus de la ville de Syrte, bastion du régime et ville d’origine du dirigeant libyen.
Lundi, le chef du CNT a confirmé que la bataille pour Tripoli n’était pas encore terminée.
«L’époque de Kadhafi est révolue (…) mais nous ne pouvons pas dire que nous contrôlons Tripoli», a-t-il dit dans une conférence de presse à Benghazi, fief des rebelles dans l’Est.
Des affrontements se déroulent à «Bab al-Aziziya et certaines zones alentour ne sont toujours pas sous notre contrôle et par conséquent nous ne savons pas si Kadhafi se trouve là-bas», a-t-il ajouté. «Nous espérons que Mouammar Kadhafi sera capturé vivant pour qu’il puisse avoir un procès équitable».
Le département d’État a fait savoir que des proches du dirigeant libyen ont tenté de négocier avec l’administration américaine jusqu’au début de l’offensive rebelle contre Tripoli.
Mais «aucun d’entre eux n’était sérieux, parce qu’aucun» n’offrait en préalable le départ du pouvoir du colonel Kadhafi, a indiqué à la presse Victoria Nuland, la porte-parole du département d’Etat.
Ailleurs en Libye, des affrontements ont été signalés dans les villes d’Al-Aziziya (50 km au sud de Tripoli) et d’Al-Khoms, à mi-chemin entre la capitale et Misrata (est).
Plus à l’est, les pro-Kadhafi ont évacué la ligne de front de Brega et fui vers l’Ouest en direction de Syrte, ville d’origine et bastion du dirigeant libyen, selon la rébellion dont le chef a promis que les villes de Syrte et de Sebah «se soulèveront bientôt à leur tour».
Depuis le début de l’intervention de l’Alliance atlantique en Libye, fin mars, les États-Unis ont effectué 5316 sorties aériennes en Libye ce qui représente près de 27% des missions de l’Otan, selon le Pentagone.
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