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Financement des partis politiques sur fonds publics: «un serpent de mer …»

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/Maintes fois agitée, jamais matérialisée au Sénégal, la problématique du financement des partis politiques sur fonds publics permettrait, selon bien d’acteurs politiques, de mettre de l’ordre dans le jeu politique. A condition que toutefois cette dotation soit réglementée, transparente et soutenue par… une volonté politique affirmée de l’Etat.

« Il est du devoir et de la responsabilité de l’Etat de financer la démocratie ». Voilà le maître mot du porte-parole de l’Apr/ Yakaar, Seydou Guèye , relativement à cette question du financement des partis politiques. Pour le « républicain », toute la classe politique sénégalaise est favorable au financement des partis, mais l’Etat rechigne à matérialiser ce vœu pour des raisons tout à fait obscures. De ce fait, dira le porte-parole de l’Apr/ Yakaar, le financement des partis politiques devient « un vieux serpent de mer qui ressort chaque fois à l’approche des échéances électorales ». Or, dans le même temps, « le Pds qui préside à la gestion du pays finance ses activités et celles de la mouvance présidentielle (Cap 21 et l’Alliance Sopi pour toujours) avec l’argent public sous des prétextes partisans ». Pour y remédier, Seydou Guèye invite à s’inspirer des modèles en cours dans les différents pays, aussi bien en Afrique que dans le reste du monde ». Cela donnerait d’ailleurs à la démocratie sénégalaise l’opportunité de grandir encore. Pour la bonne et simple raison que le financement des partis politiques permettrait à la fois d’assainir la vie publique et d’ancrer l’équité dans la compétition électorale.

Abondant dans la même perspective, le porte-parole du Ps Abdoulaye Wilane signifiera que le financement des formations politiques peut ouvrir la porte à un mouvement dynamique d’assainissement des mœurs politiques et de renforcement de la bonne gouvernance dans le jeu politique. Pour y arriver toutefois, note le maire de Kaffrine, il importe de mettre sur pied un dispositif méthodique de « codification et de normalisation » du financement des partis. «Ce serait là un excellent moyen pour éviter les financements occultes et les fonds obscurs dans le jeu politique… Il faut qu’on parvienne à définir la traçabilité des fonds qui seront alloués aux partis politiques si cette mesure venait à être effective…». Toute chose qui n’est toutefois pas sur le point de survenir, présage Wilane, avec un Etat et des libéraux qui manquent de « grandeur et de volonté politique » et qui semblent méconnaître que « la démocratie a un prix ».

L’Assemblée et la Cena favorables

La section Sénégal de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (Apf) a lancé, mercredi 7 juillet dernier, l’idée de faire bénéficier les partis politiques justifiant d’une représentation parlementaire du financement de fonds publics. « Il est évident que les opinions publiques de nos Pays accepteraient difficilement le financement sur les fonds publics des partis politiques, des syndicats et des organes de presse, si cette option n’était soumises à des règles contraignantes qui en fonderaient la légitimité, la crédibilité et l’acceptabilité. L’idée d’en faire bénéficier les partis politiques justifiant d’une représentation parlementaire pourrait être explorée comme base de discussion », lit-on dans la contribution des parlementaires sénégalais

La Commission électorale nationale autonome (CENA) de son côté, est favorable à l’idée de financement des partis. Elle propose que le ministère de l’Intérieur « élabore et propose » un système de financement des partis politiques, pour pallier certaines insuffisances des formations politiques, en rapport notamment avec le déroulement des élections.

Il était une fois, les recommandations du Médiateur

Médiateur du président de la République pour la définition d’un statut de l’opposition et du financement des partis politiques, le Pr El Hadj Mbodj avait, dans son rapport de mars 1999, mis l’accent sur la nécessité de recourir à l’aide publique. Pour lui, cela va renforcer la capacité d’action des partis et garantir la transparence financière du jeu politique.

Mais le constitutionnaliste est d’avis que le financement des partis politiques se fasse au prorata de la représentativité de chaque formation politique.

En effet, les ressources traditionnelles des partis politiques (cotisations, dons, etc) sont presque toujours insuffisantes, que le recours à l’aide publique devient alors une nécessité démocratique. « Le financement public doit tenir compte d’un double impératif : renforcer la capacité d’action des partis et garantir la transparence financière du jeu politique », déclare le médiateur. Ce dernier préconise que l’Etat soit la seule personne publique à octroyer les fonds publics aux formations politiques. Et que « le montant de la dotation allouée aux partis politiques devra faire l’objet d’une inscription dans la loi de finances de l’année ».

Le financement des partis politiques peut emprunter des formes variées. « Il peut être en nature à travers les moyens logistiques mis à la disposition des partis, la prise en charge directe de certaines activités des partis, les exonérations ou exemptions fiscales. Le financement peut être en numéraires sous forme d’une subvention accordée aux partis politiques en fonction de leur représentativité », lit-on dans le rapport de mars 1999.

La liberté d’organisation et de fonctionnement des partis étant sacrée, l’Etat doit se garder, suggère le Médiateur, de donner une affectation spéciale à la subvention qui leur est allouée.

C’est au nom de ce même principe de liberté que le financement doit être facultatif. « Un parti politique peut rejeter le principe du financement public. Il serait alors imprudent de l’imposer à tous », note El Hadji Mbodj.

Le Médiateur estime que la part du financement public doit être limitée pour préserver l’autonomie des partis. « Si les partis tirent l’essentiel de leurs ressources des fonds alloués par l’Etat, ils pourraient être tentés de se détourner des militants, sympathisants ou autres donateurs et, par-là même, de perdre toute motivation dans la quête de ressources financières privées », précise le rapport. Et qui ajoute : « L’égalité dont il est question ne doit pas être entendue au sens arithmétique du terme, mais tenir compte du poids électoral de chaque parti ».

En effet, l’objectif visé par le système des financements des partis est la moralisation de la vie politique. « Le financement public ne permet pas d’éradiquer le financement occulte mais peut dissuader les partis politiques de recourir à de telles pratiques », note le rapport.

Dans les rencontres sectorielles et plénières avec les partis, le Médiateur a pu recueillir certaines propositions concernant les conditions de financement.
Le document indique que certaines formations, lors des plénières, ont proposé l’exclusion des partis de la mouvance présidentielle du bénéfice du financement. D’autres, la prise en compte de l’ancienneté des partis.
Certains partis mettent l’accent sur le nombre de militants enregistrés pour être éligible au financement public.

Un vieux débat…

La question financement des partis politiques ne date pas d’aujourd’hui. L’on peut noter qu’en 1984, l’actuel président de la République, Me Abdoulaye Wade, alors opposant avait adressé une correspondance au président de l’Assemblée nationale de l’époque, pour faire adopter en plénière des lois sur le statut de l’opposition et le financement des partis politiques. Le pouvoir socialiste ne semblait pas très emballé par cette proposition. Il a fallu attendre près de 14 ans pour que le Chef de l’Eta t, Abdou Diouf prenne en charge la question du financement des partis.

C’est ainsi qu’il a nommé, en 1998, un médiateur chargé de réfléchir sur le statut de l’opposition et le financement des partis politiques, en la personne du constitutionnaliste, le Pr El Hadji Mbodji.
A un moment où aucun État africain n’avait une législation sur le statut de l’opposition. Il a travaillé en étroite intelligence avec beaucoup de partis politiques, en dehors du Pds, Pit, de la Ld/Mpt, de l’Urd, entre autres, qui l’ont boycotté.
Le Président Diouf n’a pas eu le temps de mettre en œuvre les recommandations du Médiateur. L’alternance est passée par là. Nous sommes en 2000. Le nouveau président de la République, Me Abdoulaye Wade n’a pas été tendre avec le Médiateur qui voulait le rencontrer et lui remettre le rapport.

Me Wade dit connaitre ce travail mieux que le Médiateur, mieux que le président Diouf . Il est prêt à recevoir le Pr El Hadj Mbodj, à condition de parler d’autre chose que du statut de l’opposition. « J’ai constaté qu’il y avait une mauvaise volonté de sa part de collaborer, de mettre en place le statut de l’opposition et le financement des partis politiques. Surtout que, maintenant, il a assez de manne financière pour fonctionner sans aucune assistance quelconque. Notamment par le recours à ses fonds secrets. Toujours est-il que je lui avais envoyé le rapport. Et je suis sûr et certain qu’il l’a lu, mais qu’il n’a pas tenu à donner suite à cela », dira le Pr El Hadji Mbodji. Et puis, plus rien.

En 2004 le débat est remis au goût du jour et cela après les révélations de la sur le scandale de la distribution des 600 kilos de riz aux chefs de parti de la mouvance présidentielle et une enveloppe de 400 000 francs. Mais, il n’y a jamais eu de projet de loi en ce sens.

La leçon de l’étranger

Le système de financement des partis politiques a été adopté par toutes les grandes démocraties du monde, à l’exception de la Suisse. Parmi ces pays, l’on peut citer le Japon, le Canada, la France, les Etats-Unis.
Le continent africain n’est pas en reste. Plus près de nous, le Mali a un système huilé de financement des partis politiques, de même que la République démocratique du Congo.

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