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Elections et crise universitaire : Un cocktail explosif

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Pas de rentrée 2011-2012 à la Faculté des Lettres de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), tant que les accords gouvernement-enseignants ne sont pas respectés. Ainsi en a décidé hier, la section Lettres-Ebad-Cesti du Syndicat autonome de l’enseignement supérieur (Saes). Cette menace qui survient dans une période pré-électorale a de quoi donner le blues.

La crise de l’énergie a fait des dégâts. Les émeutes dites de l’électricité du 27 juin sont là pour rappeler à tous que le Sénégal est assis sur une poudrière. Avant-hier, ce sont les transporteurs qui se sont radicalisés. Les propriétaires de véhicules ‘Tata’ ayant, en effet, menacé de débarrasser le bitume si le gouvernement ne se penche pas sérieusement sur leurs revendications sur fond de flambée du baril. Hier, ce sont les enseignants du supérieur qui ont donné de la voix pour avertir sur un possible blocage de la rentrée. Tout cela réuni rappelle de mauvais souvenirs dans la conscience collective. En effet, ce cocktail nous rappelle les années chaudes de 88 et 93, années électorales pour ceux qui l’auraient oublié. En 1988, la grève des étudiants a conduit à une ‘année blanche’ dont toute une génération paie encore la note. En 1993, autre année électorale, l’intrusion de la politique dans le campus a abouti à une invalidation de l’année académique. Aujourd’hui, à quelque cinq mois de la présidentielle, on n’est pas trop éloigné de ce scénario-catastrophe. Et tous les ingrédients sont réunis pour qu’il en soit ainsi. Les griefs pour le soutenir ne manquent pas : non respect des accords entre le gouvernement et les enseignants, 26 606 étudiants pour seulement 177 enseignants chercheurs titulaires, 11 861 nouveaux bacheliers en attente, insuffisance notoire des enseignants et de salles de cours… Attention danger ! Du très lourd pour la Faculté des Lettres et Sciences humaines de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad). La plus grande Faculté de la plus grande Université du Sénégal risque de s’écrouler si on n’y prend garde. Trop c’est trop ! C’est le cri d’alarme des enseignants de la section Lettres-Ebad-Cesti du Syndicat autonome des enseignants du supérieur (Saes). Hier, face à la presse au département d’anglais de ladite Faculté, ils ont annoncé qu’il n’y aurait pas de rentrée dans la Faculté des Lettres si les accords signés avec les autorités ne sont pas respectés. ‘Le Saes est catégorique là-dessus. On le dit à qui veut l’entendre et l’on ne badine pas. On va même sensibiliser les autres campus de Dakar. Parce qu’en réalité, ils ont tous les mêmes problèmes’, clame le secrétaire général de la Section Lettres-Ebad-Cesti du Saes, Yankhoba Seydi.

Cette décision de la Section Lettres-Ebad-Cesti du Saes fait suite à son assemblée générale, tenue jeudi dernier. Cela, après avoir constaté la non-application des accords signés avec le gouvernement. Accords paraphés à l’issue d’un mois de grève décrété l’année écoulée par le Saes au grand complet. Il s’agit notamment du recrutement conséquent d’enseignants-chercheurs, de personnel administratif, technique et de service, la réforme de la loi 81-59 du statut des universités et le règlement définitif de toutes les sommes dues. ‘La loi 89-59 réforme le titre des enseignants. Il devrait rentrer en vigueur à partir du 1er octobre dernier. Mais, jusqu’à ce jour, rien n’est fait. Idem pour la somme des gaps qui devait permettre de payer toutes les sommes dues ainsi que les prises en charge médicales’, explique Yankhoba Seydi. Ce à quoi il faut ajouter la question de l’insuffisance notoire d’enseignants. ‘Le nombre d’enseignants vacataires est de 185. Il dépasse les 177 enseignants titulaires. Alors que les normes recommandent 10 étudiants pour un enseignant’, informe notre interlocuteur. Une situation qui vient s’ajouter à la question vitale de la capacité d’accueil qui reste irrésolue. Au moment où 11 861 nouveaux bacheliers demandent à grossir le nombre de 26 606 étudiants de la Faculté construite pour n’accueillir que 700 pensionnaires. Alors que cette Faculté qui représente 53 % des effectifs universitaires est la moins lotie en termes de locaux. Quel paradoxe !

En effet, le nouveau bâtiment promis par le gouvernement n’est toujours pas réceptionné. Pourtant, le ministre Amadou Tidiane Bâ avait pris l’engagement de faire accélérer les travaux. ‘Nous sommes les seuls à faire cours partout. On sort même pour aller dans les établissements primaires environnants. C’est une honte. Ce n’est pas digne. C’est vraiment inacceptable’, regrette Yankhoba Seydi.

Autre souci, les heures complémentaires des enseignants ne sont pas versées. ‘La troisième tranche n’est pas encore versée alors que nous sommes déjà pratiquement à la rentrée. La rentrée est effective dans certaines Facultés comme celle de médecine’, dénonce le secrétaire général de la Section Lettres-Ebad-Cesti du Saes. L’un dans l’autre, on s’achemine vers une rentrée troublée… Si rentrée il y a !

LE SAES SUR LA SORTIE DU MINISTRE TIDIANE BA : ‘Les déclarations tenues lors du séminaire gouvernemental n’engagent que lui’

Les étudiants n’échouent plus à l’Université avec le nouveau système Licence-master-doctorat (Lmd). C’est signé le ministre de l’Enseignement supérieur, Amadou Tidiane Bâ. C’était lors du dernier séminaire gouvernemental sur le bilan de l’alternance. Faux ! rétorquent des enseignants de la section Lettres-Ebad-Cesti du Saes. Son secrétaire général, Yankhoba Seydi accuse : ‘Toutes les déclarations qu’il (le ministre) a tenues lors de ce séminaire n’engagent que lui. Parce que, rien de tout ce qu’il avait dit n’était vrai en réalité.’ Selon lui, la reforme est rentrée en vigueur à la Fac des Lettres que cette année. Le contraire des autres Facultés qui y sont depuis un ou deux ans. ‘Le baromètre pour vraiment mesurer la réussite de cette reforme, c’est la Faculté des Lettres. Parce que, depuis qu’elle y est, les nouveaux reformés n’ont pas encore leurs premiers résultats’, soutient Yankhoba Seydi. Le hic, c’est que jusqu’à ce jour, la deuxième session des examens, démarrée le 10 octobre dernier n’est pas encore terminée. ‘Quand est-ce que les corrections vont se faire ? Quand est-ce que les résultats définitifs vont sortir et à quand le début des enseignements’, s’interroge notre interlocuteur. Voilà, selon Yankhoba Seydi, des problèmes réels sur lesquels doivent se pencher les autorités.

Donald NDEBEKA

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