Moustapha Sourang : ’’Les rédacteurs n’ont pas l’exclusivité de l’interprétation de la Constitution’’
Le professeur Moustapha Sourang, ancien recteur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) et ancien doyen de la Faculté de droit de ladite université, a affirmé lundi que la candidature du président Wade à l’élection présidentielle de 2012 reste tout à fait valable au regard de la Constitution dont l’interprétation ne peut être exclusivement reconnue à ses seuls rédacteurs.
Moustapha Sourang se prononçait en tant qu’expert local lors du séminaire international sur la candidature du secrétaire général national du Parti démocratique sénégalais (PDS, pouvoir), d’Abdoulaye Wade, qui s’est ouvert ce matin à l’hôtel Méridien Président.
En interprétant l’article 104 de la Constitution, a expliqué l’ancien ministre de l’Enseignement supérieur, le constituant a ‘’ manifestement voulu exclure le mandat de 2000-2007 de son giron’’ contrairement à ce qu’avancent des rédacteurs du texte fondamental, comme le professeur Dema Sy ou Babacar Guèye.
‘’Une fois que le texte juridique est adopté, ce texte vous échappe en matière d’interprétation’’, a déclaré Moustapha Sourang qui dénie à ceux qui ont participé à la rédaction du texte ‘’l’exclusivité de son interprétation.
‘’Même ceux qui ont participé à la rédaction du texte ne peuvent avoir l’exclusivité de l’interprétation parce que le texte à une autonomie d’interprétation sur des aspects que même ceux qui l’ont rédigé ne pouvaient pas voir au moment de sa rédaction’’, a dit Moustapha Sourang convaincu de la légalité de la candidature de Abdoulaye Wade sous le regard du ‘’droit pur’’
‘’Les arguments de droit comparé qui reposent sur la sécurité juridique stipulent qu’un mandat en cours ne peut être concerné par des dispositions nouvelles sur la forme ou le fond, ces dernières ne s’appliquant que pour l’avenir’’, a avancé le professeur Moustapha Sourang pour qui ce principe s’applique même à des organisations privées pour le respect de la sécurité juridique.
‘’Même pour des organisations privées, un mandat en cours ne peut être raccourci par une nouvelle disposition fixant une limitation des mandats ou même leur durée, ceci pour une finalité de sécurité juridique’’, a dit Moustapha Sourang, parlant de technique de mise en œuvre délibéré à propos de l’article 104.
‘’L’article 104 est une technique de mise en œuvre différée, qui est appliqué dans beaucoup de dispositions. En principe, un texte s’applique dès sa publication au journal officiel, mais quand le constituant ou le législateur dit que ce texte n’est applicable qu’après un mandat, cela veut dire que la Constitution ne peut être applicable qu’après le premier mandat de 2000’’ soutient Moustapha Sourang.
‘’Il y a là des indications très claires que sur un plan purement juridique, l’éligibilité ne pose aucun problème’’, a-t-il conclu.
Candidature de Me Wade : le Conseil constitutionnel a la base légale pour se prononcer (professeur)
Dakar, 21 nov (APS) – Le Conseil constitutionnel du Sénégal a toute la latitude juridique de se prononcer sur la recevabilité ou non de la candidature du président Abdoulaye Wade, pour briguer un nouveau mandat, a conclu le Pr Jean Yves de Carra, dans son intervention lors du séminaire international ouvert lundi à Dakar, à l’initiative de la majorité.
Le Conseil constitutionnel du Sénégal, la seule juridiction habilitée à recevoir et à statuer sur les candidatures, est notamment attendu sur ce cas.
Les électeurs sénégalais sont convoqués le 26 février 2012 pour élire un président de la République. Le chef de l’Etat sortant, Abdoulaye Wade, est candidat à un nouveau mandat, mais sa candidature est contestée par l’opposition et la société civile.
Ces derniers, appuyés par des juristes sénégalais spécialisés en droit constitutionnel, invoquent une limitation constitutionnelle du nombre de mandats présidentiels à deux, alors que Me Wade en a une lecture différente, en sa faveur.
‘’Il n’y a pas de disposition constitutionnelle qui donne expressément mandat au Conseil constitutionnel de se prononcer la recevabilité ou non de la candidature de Abdoulaye Wade, mais il existe une disposition légale qui l’y oblige’’, a souligné le Pr de Carra.
‘’Même s’il n y a pas de disposition constitutionnelle qui la lui permet, le Conseil constitutionnel peut s’appuyer sur le Code électoral notamment l’article 116 qui lui permet de procéder à toute vérification qu’il juge utile pour s’assurer de la validité des candidatures’’, a rappelé le Pr de Carra.
‘’Le Conseil constitutionnel est donc compétent’’, a-t-il conclu avant d’inviter à faire trancher ce débat sur la limitation des mandats et son interprétation réelle, par le peuple lors d’un référendum.
‘’Le seul moyen de faire arbitrer cette question est de retourner à la source, c’est-à-dire, par élection faire arbitrer le débat par le peuple souverain’’, a préconisé le Directeur exécutif de l’Université Paris Sorbonne d’Abu-Dhabi.
ABK/SAB