DEFICIT ALIMENTAIRE DANS LE PAYS
Les greniers déjà vides au Fouladou
Le déficit alimentaire se précise dans le pays. La Croix-Rouge sénégalaise confie que le déficit céréalier s’accentue dans les pays du Sahel et touche la grande majorité des régions du Sénégal qui doit faire face aux conséquences du mauvais hivernage 2011. A son avis, cette situation installe la crise alimentaire qui touche entre autres, les régions de Saint-Louis, Matam, Louga, Diourbel, Kaffrine, Sédhiou et Kédougou. L’accès aux trois repas quotidiens demeure un casse-tête dans le monde rural où la période de soudure est de plus en plus pressante. Sud Quotidien fait l’Etat des lieux par un tour d’horizon qui débute à Diourbel, le Fouladou et Sédhiou. Le temps est compté pour l’Etat qui est dans l’obligation d’intervenir rapidement avec son besoin urgent chiffré à 3,5 milliards de F Cfa pour des vivres de soudures, 15 milliards pour des semences, 15 milliards pour l’engrais et deux milliards pour de l’aliment de bétail.
Manger devient de plus en plus difficile pour certaines familles au Fouladou. De la ville au village, les conséquences de la mauvaise campagne agricole sont déjà perceptibles. Les greniers sont devenus vide et survivre relève de plus en plus d’exploit des responsables de famille.
La pudeur entoure toute information sur le déficit alimentaire déjà perceptible au Fouladou. Du Pakao au Sofagnama en passant par le Kamako, le Diéga ou Bissabor, les chefs de familles sont fortement préoccupés par le déficit alimentaire. Pour l’essentiel les habitants de la région puisent leur alimentation dans la production agricole. Pour cette dernière campagne agricole les récoltes ont été jugées très mauvaises. Une situation dont la cause est naturelle avec l’insuffisance des pluies et leur mauvaise répartition spatio-temporelle.
Les problèmes restent perceptibles sur le terrain malgré la difficulté d’obtenir des statistiques agricoles aidant à mesurer les dégâts. En effet, les greniers ne sont pas garnis. Les différends responsables de famille interrogés, comme Idrissa Baldé de Saré Goundo, l’expliquent : « la production de mil souna qui constitue l’essentiel de la nourriture va se terminer avant fin mai. Nous n’avons pas pu avoir du riz ni du maïs à cause de la pluie. Beaucoup de familles du village n’ont plus de mil. Les chefs de familles survivent en achetant, au quotidien, le riz au détail ». Chose difficile, ajoute t-il, « car nous n’avons aucune sources de revenu. Il y a des familles qui sont obligées de se limiter à un seul repas par jour. Nous n’avons pas encore la famine mais si rien n’est fait nous allons vers ça. Il n’y a pas de doute possible. »
Le prix des céréales est déjà estimé très cher par les femmes du Fouladou. Le kilogramme des variétés de mil sunnas est à 200 F Cfa à Kolda commune ,180 F Cfa à Bayoungou qui est l’un des louma spécialisé en céréale dans le département de Médina Yéro Foulah. Le prix du maïs est encore plus élevé car il oscille entre 205 à 240 F Cfa. La récolte du riz est pratiquement nul pour cette dernière campagne condamnée par de longue pause pluviométrique. La seule possibilité pour se ravitailler en riz, les magasins ou le kilogramme se négocie entre 325 à 500 F Cfa, selon la qualité du riz et la zone géographique.
Ismaëla fait parti des pères de famille qui sont obligés de jongler chaque jour pour survivre. « C’est la vie du pigeon que nous menons actuellement en recherchant la pitance au jour le jour pour tenir ». A l’en croire, « il m’arrive parfois de trouver deux kg pour assurer un repas mais certains jours je reviens bredouille à la maison où m’attendent habituellement mes trois enfants, mon épouses et mes neveux. Mais avec cette période des mangues, si nous n’avons pas trouvé de repas, nous nous contentons de manger ce fruit pour pouvoir tenir », a expliqué ce vieux ouvrier habitant Sinthiang Gadapara.
Ils sont nombreux ces pères de famille des centres urbains de Kolda ou autre commune rurale à se débrouiller au quotidien pour faire bouillir la marmite. Ce qui, d’ailleurs, leur plonge dans cette masse de compatriote qui n’ont pas la chance de choisir le menu à la maison. Ce qu’actuellement, au Fouladou, manger au quotidien est en passe de devenir une prouesse.
DIOURBEL AU BORD DE LA DISSETTE
Les paysans réclament une assistance en vivres et en semences de qualité
La situation alimentaire au niveau de la région de Diourbel est trop préoccupante. Les paysans ne disposent pas d’un taux de couverture alimentaire qui puisse leur permettre de dépasser hui mois. Dans la région de Diourbel, le bilan alimentaire se situe entre trois à sept mois selon les enquêtes sur le processus d’accompagnement des exploitations familiales menées par la Fédération des organisations non gouvernementales du Sénégal (Fongs).
Le coordonnateur de la Fongs, Ibrahima Paul Thiao estime qu’« il faut régler la disponibilité des céréales pour stabiliser les prix. Il ne faut pas laisser les paysans entre les mains des spéculateurs appelés souvent bana bana ». Pour ce faire, a précisé M. Thiao, « il urge de renforcer le stock de maïs pour permettre aux paysans d’économiser leurs récoltes de mil. » Et d’ajouter : « il faut impérativement une assistance en vivres de soudure sans laquelle il sera difficile pour les paysans de mener les travaux champêtres. La zone Nord du département de Bambey (Gawane, Ngogom, Lambaye, Baba Garage, Dinguiraye et Keur Samba Kane), les départements de Diourbel et de Mbacké sont plus touchés par cette situation où il est difficile pour les ménages d’assurer correctement les trois repas par jour. Les paysans sont entrain de brader leurs petits ruminants pour pouvoir faire face à cette situation ».
La production céréalière de cette année ne peut pas satisfaire les besoins alimentaires des populations. Le président du conseil rural de Baba garage a confié que la situation alimentaire qui prévaut dans sa communauté rurale est celle qu’on constate dans le tout département de Bambey. « Elle est très inquiétante. Les pluies n’ont pas été au rendez vous durant la dernière campagne agricole influant négativement ainsi sur les rendements vivriers. Nous vivons une situation exceptionnelle. On ne parvient plus à assurer correctement les trois repas quotidiens car la base de l’alimentation dans la communauté rurale est le mil. On n’en n’a pas récolté beaucoup à cause de la faible pluviométrie».
Modou Ndiaye demande aux autorités étatiques d’assister les populations en vivres de soudure pour leur permettre de pouvoir tenir durant l’hivernage. « Nous demandons au gouvernement de venir en aide aux populations mais aussi et éleveurs qui ont besoin d’assurer la survie de leur bétail. Le cheptel commence à avoir des difficultés liées au manque d’aliments ». Avant de tirer la sonnette d’alarme : «La famine menace le monde rural. Les prix des céréales ont sensiblement augmenté au niveau du marché local. Le kilogramme de mil se vend entre 200 et 225 F Cfa et le maïs se négocie à 260 F Cfa le kilogramme. Le tapis herbacé a connu une dégradation. A cela vient s’ajouter les pluies hors saisons enregistrées en fin mars dans le pays ».
La dernière situation du système d’information agricole dans les marchés hebdomadaires de Bambey Sérère, Keur Ibra Yacine, Ndindy et Touba confirment une hausse des tendances du prix des céréales. Dans la même foulée, le vice-président du Conseil rural de Ndindy, Ousmane Niang a déclaré que « la situation alimentaire est trop alarmante au niveau de toute la communauté rurale. Les greniers sont quasi vides. Une assistance des populations est nécessaire. La campagne agricole a été catastrophique car on a connu de très mauvaises récoltes ».
De sources proches du Commissariat à la sécurité alimentaire de Diourbel, la dernière enquête du comité du système d’alerte précoce menée au mois de janvier n’avait relevé une situation critique. Toute fois, la réalité est la production céréalière est très faible par rapport aux besoins alimentaires des populations. Ces dernières lancent un cri de détresse au gouvernement afin qu’il les assiste pour leur permettre de se nourrir et de sauver leur bétail. Une baisse des prix des petits ruminants les caprins et les ovins a été notée ces derniers jours à cause des difficultés liées au manque d’aliment de bétail que rencontrent les éleveurs. Un sésame dont le prix a presque atteint des niveaux insupportables pour des populations suffisamment affaiblies. Le sac de foin se négocie à 2000 F Cfa et le kilogramme de l’aliment se chiffre à 200 F Cfa.
sud quotidien