«Alioune Badara Cisse a evolue en sectaire en creant des factions» Mamadou Kane dit Makane, Porte-parole de la Dse-Apr aux Etats Unis

Les sanctions infligées à Me Alioune Badara Cissé au sein de l’Alliance pour la République (Apr) sont largement justifiées aux yeux de Mamadou Kane dit Makane. Porte-parole de la Délégation des Sénégalais de l’extérieur (Dse) de l’Apr aux Etats Unis, Mamadou Kane aborde dans cette interview les remous notés chez les apéristes du pays de l’oncle de Sam, passe au peigne fin la coalition Benno Bokk Yakaar. Il ne manque pas de se prononcer aussi sur le départ de Youssou Ndour de la grande coalition de la majorité.

Comment se porte l’Apr aux Etats Unis ?  Ne va-t-elle pas un peu mal si on se fie à la récente sortie des femmes apéristes qui dénoncent des opérations de parachutage ?

L’Alliance pour la République (Apr)  ne se porte pas aussi mal qu’on le dit  aux Etats-Unis. A l’épreuve du pouvoir, les ambitions individuelles s’exacerbent et débordent malheureusement le cadre militant. Parachutage, il ne peut pas y en avoir pour l’instant puisqu’il n’y a pas encore de renouvellement. Il y aura la vente des cartes et une compétition démocratique devra départager ceux qui aspirent à un leadership.

Est-ce que la non-structuration du parti ne contribue pas à envenimer les relations entre responsables et à instaurer la guerre de positionnement au niveau de l’Apr ?

Oui, cela est plausible mais un parti c’est un corps vivant, évoluant avec ses contradictions. Nous évoluons dans des conditions qui nous sont spécifiques en tant que parti ayant emprunté cette voie imposée par les circonstances de l’époque  pour conquérir le pouvoir. La non-structuration peut devenir un inconvénient de gestion. Positionnements, querelles, cela prouve une vitalité du parti et une réalité qu’il est attractif ; pourvu que tout se passe dans les règles démocratiques pour départager ceux qui pensent qu’ils peuvent apporter un plus à la vie de l’organisation.

La diaspora a beaucoup pesé dans l’élection de Macky Sall à la tête du pays. En tant que membre de la diaspora, comment jugez-vous le bilan du Président Macky Sall ?

La diaspora a bien pesé dans l’élection du Président Macky Sall, vous avez raison de le dire. C’est notre fierté de voir une nouvelle orientation imprimée à la marche générale de notre pays. Nous sommes en phase d’élaboration d’une nouvelle éthique de gestion des affaires, avec comme  fondement la bonne gouvernance. Il n’y a rien de plus difficile, mais aussi de plus exaltant  que faire évoluer les mentalités et les comportements. Les résistances sont nombreuses, les conservatismes tout autant. Il y’a certes des insuffisances, mais le bilan est positif. Comme vous le savez, une crise mondiale depuis quelques années limite les possibilités pour un pays aux ressources limitées. Avancer à pas de géant est presque impossible. Profitons-en pour rendre hommage à cette diaspora qui a largement contribué aux efforts de développement.

Dans les domaines de la santé et la correction des inégalités sociales, des mesures louables sont initiées, notamment les bourses de sécurité familiale et la couverture santé pour les plus jeunes.

Dans un pays où l’Etat est considéré comme principal employeur, pourvoyeur d’honneurs et revenus, la principale correction devient l’éducation à une citoyenneté nouvelle, participative. Les populations jugeront leurs élus aux actions concrètes de développement. Un discours de vérité est exigé des élites, la démagogie est facilement repérable par les citoyens. Mais un pouvoir doit bien communiquer avec ses administrés, nos responsables doivent faire preuve d’ouverture et ne jamais perdre la connexion avec leurs bases. La jeunesse urbaine en manque de perspectives demeure la principale équation pour notre avenir, une attention particulière devra être accordée à ses exigences.

Beaucoup de voix au sein  de l’Apr considèrent que Benno Bokk Yakaar est une coalition électorale et par conséquent, elle n’a plus sa raison d’être. Etes-vous de cet avis ?

Benno Bokk Yakaar est une coalition de coalitions, elle subit par conséquent beaucoup de chocs d’ambitions contradictoires, c’est normal. Le Président Macky Sall est conscient de la nécessité pour tous les fils de ce pays  d’unir les intelligences et les énergies pour faire reculer la pauvreté et donner les chances au Sénégal de sortir du cercle infernal des conflits électoraux. Si toutes les composantes de BBY s’investissaient autour du Président, il nous serait facile de faire des bonds en avant. Malheureusement tout le monde n’est pas au même degré d’engagement. La cohésion est fondamentale dans une œuvre de renouveau national, la cacophonie politicienne est néfaste dans notre cas. Bby est certes un acquis qui peut être amélioré.

Après Idrissa Seck, Youssou Ndour a quitté Benno Bokk Yakaar. Quel commentaire cela suscite-t-il de votre part ?

Deux cas différents ! Idrissa y était sans y croire ; Youssou a quitté par dépit de ce manque de cohésion dont je vous ai parlé. Chaque entité a la totale liberté de ses convictions, nous le respectons.

D’aucuns soutiennent que Macky Sall est derrière le départ de Youssou Ndour, dans le dessein de faire disparaître Benno Bokk Yakaar qui ne fait plus son affaire. Qu’en pensez-vous ?

Tel que je le connais, le Président Macky Sall ne conçoit pas la politique comme une affaire de ruse et tricherie. Youssou Ndour est assez majeur pour une  autonomie d’action et de pensée.

Comment analysez-vous la décision de Macky Sall de démettre Me Alioune Badara Cissé de son poste de coordonnateur national de l’Apr et de l’exclure de toutes les instances de direction du parti ?

La décision de démettre Me Alioune Badara Cissé de la direction du Parti émane d’une instance régulière et non du Président Macky Sall tout court. C’est le lieu de remettre à l’endroit quelques idées qui me tiennent à cœur. Je me sens offusqué à chaque fois que j’entends un responsable clamer un mérite exclusif dans les succès de l’Apr et l’élection du Président Macky Sall. Une œuvre collective ne peut être revendiquée par des individualités sans causer des frustrations. Votre première question avait trait au rôle de la diaspora. Voilà, nous ne sommes pas d’ailleurs, mais d’ici. C’est ici nos racines, ailleurs nous ne sommes que des ambassadeurs. Nous avons autant contribué au changement que n’importe qui. Maintenant, il ne peut pas y avoir de parti performant sans une relative discipline de groupe. Il se trouve malheureusement que le camarade Alioune Badara Cissé, comme il le reconnaît lui-même, a navigué longtemps à contre-courant des instances du parti. La direction n’avait pas d’autre choix que remettre de l’ordre, sinon ce serait l’anarchie au sommet et un affaiblissement du leadership de Macky Sall qui, du reste, est le seul à avoir été élu par un Congrès.  Un parti, c’est des règles, un code, une éthique. Il a foulé aux pieds la discipline de parti et les règles de la République. Il a évolué en sectaire en créant des factions. Lors d’un de ses déplacements aux Etats Unis, Abc s’est présenté comme le géniteur de l’Apr ; c’est un mot trop lourd qui avait beaucoup choqué des gens comme moi. Il n’avait pas le droit de se considérer comme le géniteur de l’Apr. Nous sommes tous sur un pied d’égalité. De plus, il s’est illustré par une attitude scissionniste, se permettant de s’attaquer aux alliés de Benno Bokk Yakaar. Il ne venait plus aux réunions du parti,  alors qu’il occupait un poste aussi influent que la coordination. Ce qui est le plus choquant, c’est qu’il s’immisce dans des dossiers judiciaires en demandant au président de la République de libérer des personnes qui ont maille à partir avec la justice. C’est non seulement choquant, mais aussi cela relève d’une provocation intolérable.  Tout cela justifie qu’il soit écarté des instances du parti.

Maintenant, c’est toujours avec regret que nous voyons un camarade se retrouver en marge de notre cause commune, mais nous souhaitons qu’il fasse preuve de responsabilité et de lucidité afin de continuer avec nous la belle aventure de redressement national autour du Président Macky Sall.