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Analyse: Ces chefs d’Etat africains qui s’agrippent au pouvoir… (Par Aly Saleh)

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L’on n’arrête pas de se demander: sur le continent africain, pourquoi les dirigeants s’agrippent toujours au pouvoir jusqu’à la mort politiquement ou physiquement?
Et pourtant, aucun d’entre-eux n’est né Président mais cherche toujours s’éterniser au pouvoir.

Est ce par incertitude ou par crainte d’avoir à payer leurs forfaits commis avec l’immunité acquise grâce à leurs fonctions qu’ils veulent rester au pouvoir?

Au Sénégal, Le Président Léopold Sédar Senghor avait montré la voie à suivre dès 1981 en quittant volontairement le pouvoir et en laissant son premier ministre d’alors, Abdou Diouf, présider aux destinées du pays de la téranga.
Mais aujourdhui, tout laisse croire que ses pairs africains n’ont rien appris de la leçon.
Le berceau de l’humanité fait depuis plusieurs décennies avec cette notion de présidence à vie. Et jusque là, aucune explication n’est donnée pour justifier cette pratique.

En effet, depuis l’accession aux indépendantes en 1960 de 17 pays africains, nombreux sont les pays qui n’ont pas connu de réelles alternances à la tête des Etats.

Plusieurs générations africainess sont nées, ont vécu et ont même quitté ce monde, sous la présidence d’un seul homme.
L’exemple le plus marquant est celui du
Président de la Guinée équatoriale, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo au pouvoir depuis 1979.
Vous rendez-vous compte, 42 ans à la tête de son pays! Un record mondial qui n’est pas pourtant du goût de ses compatriotes Équato-guinéens.

Tel un livret de photos ou de dessins dont le personnage principal est resté gelé autour d’un décor en mouvement,
Paul Biya, Président du Cameroun depuis 1982 lui aussi a traversé des décennies à la tête de son pays, au point d’être aujourd’hui l’un des plus anciens dirigeants au pouvoir.

Certains Présidents africains ont cherché à s’accrocher au pouvoir, parfois par la force des armes alors que d’autres se sont privés d’organiser des élections sous des prétextes, économique, sécuritaire ou sanitaire, pour éviter une passation pacifique du pouvoir à un successeur.
Ou d’autres encore, pour berner la communauté internationale de plus en plus exigeante en termes de démocratie et de respect de la légalité, s’adonnent à des tripatouillages constitutionnels.

Dans les grandes démocraties comme aux Etats Unis, en quarante ans, six Présidents ont épuisé leurs mandats. Entre temps, le mur de Berlin est tombé, de nouveaux États sont nés, des espèces animales ont disparu…

Sur le continent, au détriment des sociétés civiles et des oppositions, de nombreuses tentatives de rallongement de mandat ont été tentées… Certaines ont réussi, d’autres se sont heurtées à la volonté de peuples sortis, au fil des générations, du fatalisme qui caractérisait leur rapport à la chose politique.

Pour les raisons d’une faim ou soif du pouvoir, ce phénomène récurrent en Afrique s’explique peut-être par une certaine peur d’être poursuivi à la fin de leurs règnes, ponctués de banditismes financiers et crimes de guerres pour la plupart.

C’est le cas pour Joseph Kabila, Président de la République Démocratique du Congo, désigné à la tête du pouvoir à la suite de l’assassinat de son père, Laurent Désiré Kabila, en janvier 2001, Joseph Kabila a été élu à la fin de la deuxième guerre du Congo entre 1998 et 2002 pour un premier mandat en 2006, puis réélu pour un second quinquennat en 2011.
Et comme la Constitution lui interdisait de se représenter en 2016, Joseph Kabila a ajourné à plusieurs reprises le scrutin présidentiel, profitant d’une clause dans la Constitution lui permettant de rester président jusqu’à l’élection d’un successeur.
Ainsi après de longues hésitations constitutionnelles, il a fini par renoncer au pouvoir, début 2019, au profit de son principal opposant Félix Tshisekedi.

Et pourtant, rester au pouvoir ne répond aucunement à un appât du gain, dans le cas de Kabila qui n’a cédé le pouvoir qu’après avoir obtenu des garanties de la part de son successeur, Felix Tshisekedi.
Pour dire qu’ils sont encore nombreux les exemples…

Tenez, élu en 2005, réélu en 2010, puis en 2015 au Burundi, Nkurunzinza a modifié la Constitution en mai 2018. Le mandat présidentiel dans son pays passe de cinq à sept ans et le verrou de la limite est fixé à deux mandats.
Ce nouvel amendement remet son compteur à zéro, ce qui lui permettrait de rester au pouvoir jusqu’en 2034.
Ainsi faisant, Nkurunziza a atisé une piste intéressante aux dirigeants voulant rester au pouvoir, soit de modifier la Constitution.

Et plus récemment, Alpha Condé, 83 ans, Président de la Guinée-Conakry, avait annoncé la tenue d’un référendum pour modifier la Constitution, de sorte qu’il puisse rester au pouvoir.
En effet, Alpha Condé, alors opposant historique, fut le premier Président Guinéen démocratiquement élu, en 2010, puis réélu en 2015, après des décennies de régimes autoritaires et militaires.
Et la rue n’a pas manqué de réagir à ses agissements.
Sa chute était prévisible.
Au pouvoir depuis onze ans, le très critiqué  depuis sa réélection contestée à un troisième mandat, Alpha Condé a également fait les frais d’un contexte régional propice à la prise de pouvoir par l’armée.
Dommage!

Et nous l’avons vu en Zambie, au Tchad, en Egypte, en Gambie voisine, en Tunisie…. la liste est non exhaustive.

Pour parer à cette gourmandise du pouvoir, les juridictions telles que l’Union africaine et la Cedeao ont instauré une directive limitant le nombre de mandats à deux car l’Afrique a également connu des tentatives avortées de troisième mandat.

Au Sénégal, pour le Président Macky Sall, la clause selon laquelle nul ne peut faire plus de deux mandats consécutifs a pour but de clore le débat sur la limitation du nombre de mandats.
Le successeur de Wade avait déclaré: « si réélu, je fais un deuxième mandat de 5 ans. Cela fera 7 plus 5….. Il faudra partir ».

Pareil pour Mahamadou Issoufou, arrivé au pouvoir par les urnes en 2011, puis réélu en 2016 pour un second mandat de cinq ans, le Président du Niger a assuré qu’il ne modifiera pas la Constitution du pays pour briguer un troisième mandat et il n’a pas hésité par rapport à ça. Il a montré qu ‘il est un démocrate convaincu en ne procédant pas aux pilages que l’on a coutume de voir sur le continent.
Et c’est, souvent le cas!
Faute d’alternance pacifique, il n’est pas rare que les populations se soulèvent en Afrique, générant souvent des morts et des blessés, sans compter le manque à gagner économique et social, du à l’instabilité.
Et ce genre de manœuvres, met en péril les progrès démocratiques sur le continent.

Pour rappel, à la tribune de l’Union africaine à Addis-Abeba, Barack Obama avait déclaré « Quand un dirigeant essaie de changer les règles au milieu de la partie, simplement pour rester en poste, il s’expose à l’instabilité et à la discorde ».

C’est pourquoi aujourdhui, il est grand temps que les constitutions africaines encouragent les Présidents à envier la vie hors palais ; en plus de donner des garanties de sécurité et d’immunité.
A défaut d’un tel compromis, la plupart d’anciens Présidents africains vont continuer à s’exiler par crainte d’avoir à payer leurs crimes commis.

Aly Saleh Journaliste/ Chroniqueur

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