La réunion hier entre le Président Wade et les responsables de l’Alliance Sopi pour toujours, pour analyser et tirer les leçons des manifestations du 23 juin a pris l’allure d’une séance d’exorcisme pour panser la blessure infligée au régime obligé de remettre dans les tiroirs le projet de loi constitutionnelle. Un des participants à la réunion, ayant requis l’anonymat retrace la quintessence du face-à-face entre Wade et ses alliés.
L’OBJET DE LA RENCONTRE
«Le Président a reçu l’Ast comme il l’a fait avec le Pds pour dire qu’il a usé de son droit en déposant un projet de loi dont la finalité est de rendre plus démocratique la désignation du Vice-président. Il avait pensé, dit-il, que si le Président était élu en même temps que son Vice-président, cela conférerait davantage de légitimité à ce dernier. Cependant, il y avait une autre clause à savoir qu’au lieu de la majorité absolue de 51%, c’est maintenant 25% et cela n’a pas été compris. Le Président s’est félicité aussi que sa majorité ait accepté de voter le projet et de se ranger derrière lui. D’ailleurs, ils l’ont fait à l’unanimité en commission technique. En plénière, Wade ne se doutait pas que sa majorité allait voter. Cependant, celle-ci a attiré son attention sur le comportement de Bennoo, du mouvement Y’en a marre qui, pour le moment, ne se réclame d’aucun bord et d’autres qui n’étaient pas dans le champ politique. Alors sa majorité a fait appel à lui pour prendre une décision allant dans le sens de ramener la paix civile et sociale. Alors quand il en a eu les échos devant l’Assemblée, en bon responsable il a donné suite à l’appel de sa majorité, des chefs religieux ; et a retiré le projet.»
CONCERTATIONS PREALABLES ET TOURNURE
«Wade n’avait pas le temps. Même son parti n’a pas été consulté. C’est hier (samedi), qu’il l’a consulté, comme il l’a fait aujourd’hui (hier) avec l’Ast. Le Président ne nous a pas consultés parce qu’il ne pensait pas que les populations allaient rejeter le projet. Le Président était convaincu qu’il n’y avait pas de difficultés (…) Maintenant quand il a vu la tournure, il a décidé de retirer le projet, et il a jugé utile de s’expliquer avec son parti et ses alliés. Le Président était de bonne foi, sincère avec ses alliés. Au cours de la rencontre, il a voulu donner la parole à Decroix et à Iba Der pour faire l’analyse de la journée du 23. Des responsables de l’Ast lui ont fait remarquer qu’aucun parmi ces deux-là ne doit faire l’analyse à l’Ast. Ils ont été acteurs comme tout le monde. Ils ont dit qu’il revenait au président de l’Ast lui-même (Me Wade : ndlr) d’expliquer les tenants et les aboutissants du projet de loi qu’il a déposé à l’Assemblée en tant que président de la République. Puisque c’est lui qui a convoqué ; donc, c’est à lui d’exposer. Si le Pr Iba Der veut faire une analyse, ce sera au niveau de la Cap 21. Decroix est aussi membre de la Cap 21. Donc, c’est à lui, Wade, de dire ce qu’il attend surtout de l’Ast. Le Président a expliqué son choix par le fait que Decroix avait participé à la réunion du Pds, de même que Iba Der, en sa qualité de militant du Pds et de la Cap21. L’Ast a fait remarquer que ses membres n’étaient pas à cette réunion. Le Président, en grand démocrate, a donné raison à l’Ast.»
LES CAS DJIBO ET DECROIX
«On a parlé du comportement de Djibo Kâ et Diop Decroix, lors de la journée du jeudi, qui ont brandi la menace de démission. Les gens se sont indignés, car dans les situations les plus difficiles, le Président doit être soutenu. Djibo Kâ et Decroix ont expliqué qu’ils avaient conditionné leur démission au maintien du projet. Certains ont considéré que leur attitude est grave, car on a entendu Sidi Lamine Niasse les féliciter et louer leur patriotisme. Quand la radio a annoncé leur démission, certains députés au sein de l’Hémicycle n’en revenaient pas. Le choc était grand au point que certains ont piqué une crise. Ils se sont dit : «Regardez Djibo Kâ et Decroix, avec tout ce que le Président a fait pour eux, ils veulent profiter de la situation pour fuir leurs responsabilités ! » Des voix se sont élevées pour demander leur limogeage, le jour même, car en termes de fidélité, ce ne sont pas des exemples (…)
Pour l’heure, l’Ast n’a pas pris de décision par rapport à eux. Ses responsables se sont indigné de leur comportement pour dire que leur devoir face à toute décision politique du Président est de l’endosser, la soutenir et l’accompagner.»
RETRAIT DE LA CANDIDATURE DE WADE ET DEMISSION DU PM
«C’est de l’enfantillage ! Ce n’est pas la première fois que les gens le demandent. Wade a été démocratiquement élu ; son mandat se termine en 2012. Ce n’était pas tout le peuple qui était à la Place Soweto, mais une partie du peuple et même des vandales avec des casses de maisons, des voitures incendiées. En tout, pour l’Ast, son candidat a la possibilité de remporter l’élection en 2012 au 1er tour. La preuve, nous avons trouvé un candidat serein, détendu (…)
Pour le Premier ministre, il revient, selon l’Ast, à Wade d’en décider. C’est son directeur de campagne. Les membres de l’Ast ont dit que ce qui les intéresse, ce sont les comportements des leaders de partis membres de leur alliance. L’idée de gouvernement d’union nationale n’a pas été abordée.»
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