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Arène Nationale et agressions en série: les résultats d’un entetement (Par Cheikh Bamba Dioum)

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Les sénégalais se souviennent des vifs débats « pour ou contre la construction de l’arène nationale » dans la zone exiguë du Technopole sise à Pikine. Aujourd’hui, la désolation totale des autorités mais surtout des populations devant la furie des agresseurs qui assiègent la zone à chaque combat, a fait la une des journaux et des réseaux sociaux, tous dépassés par l’ampleur des dégâts englobant : embouteillages monstres, vols en série, agressions physiques, en somme une insécurité totale malgré la présence renforcée des agents de la sécurité.

Pourtant, nous avions à temps, suffisamment alerté sur l’inopportunité et les dangers liés à l’édification de l’arène nationale dans un tel lieu. Mais, comme dit le proverbe wolof, « Tere mu të, bayyil mu giss ! ». Approximativement en français : « S’il s’entête devant l’interdit, laisse le subir les conséquences ! ». Nous ne pouvons trouver mieux que de reproduire ici une partie de cette contribution publiée en avril 2015 et qui n’avait pour objectif que d’analyser et d’alerter mais qui, au finish, ressemble à une prévision qui se réalise malgré tout.

« L’Arène nationale : oui pour le projet, non pour l’emplacement

Le débat sur la construction de l’Arène nationale à Pikine, même s’il n’a pas encore atteint les proportions de ceux du monument de la Renaissance, lui ressemble étrangement.

   Le Président Macky Sall a pris l’engagement de réaliser cet autre rêve de Maître Wade, une doléance longtemps défendue par les amateurs de lutte, à juste raison il faut le reconnaître.

Mais là aussi, ce projet bute sur le choix de son emplacement. Déjà, du temps de l’ancien président cité, un de ses ministres m’avait fait part de son intention de lui proposer la construction de l’Arène nationale à Pikine dans le cadre des grands projets qu’il fallait prévoir pour la banlieue. Je lui avais alors répondu que contrairement à ce que croient beaucoup d’observateurs vu les succès obtenus par les champions de lutte originaires de cette ville, ce projet est loin d’être une demande sociale pour ses habitants qui ont plus à craindre de ses méfaits qu’à espérer de ses avantages. J’avais trouvé Pikine trop étroit et plein de risques pour abriter un tel édifice. C’est ainsi que je lui suggérais en contrepartie l’université de la Banlieue que je trouvais plus appropriée, plus pertinente et sans aversion populaire. Il finit par transmettre les deux projets très appréciés par le patriarche  Wade.

Aujourd’hui que le Président Macky Sall et son équipe sont à deux doigts de réaliser ce projet à l’entrée de Pikine à proximité du Technopôle, mes craintes ressurgissent avec l’opposition non seulement des riverains mais aussi des environnementalistes et des techniciens, chacun mettant sur la table les raisons qui militent pour une délocalisation de l’Arène.

D’après Sud Quotidien du 17 mars 2015,le Rassemblement des entreprises du secteur des technologies de l’information et de la communication (RESTIC)  « met en garde contre les conséquences de la construction de l’arène sur ce site qui concentre des nœuds de raccordement et des dorsales en fibres optiques et nœuds d’accès qui contribuent à la distribution de la connectivité sur tout le territoire national ».

Tous ces arguments  méritent plus d’attention au lieu d’être tout bonnement évacués parce que la Chine a mis 24 milliards sur la table et qu’il faut absolument sortir de terre un grand projet pour la banlieue avec les échéances de 2017. Avec le déguerpissement des maraîchers qui occupaient les lieux, on sent la détermination de l’Etat à clore le débat et à passer à l’exécution forcée de son projet sans fournir d’explications convaincantes. 

Loin être un « Selbé Ndome », je peux répéter à l’actuel Président et aux Sénégalais ce que j’avais dit à l’époque à propos du Monument à savoir : si l’Arène est implanté dans le lieu prévu, l’encre coulera à flots, et les espérances électorales risquent d’être déçues à l’image d’un champion de lutte déchu malgré tous les pronostics favorables à lui.

Aujourd’hui, seuls les riverains et quelques observateurs avertis, appréhendent le risque d’asphyxie et d’insécurité auquel la ville est exposée. Une fois l’Arène opérationnelle, la grande masse s’en apercevra et réagira de façon inattendue. La zone sise à Pikine dénommée Lobatt Fall par les uns et Technopôle par les autres  étant le centre névralgique pour sortir de Dakar ou pour y entrer,  en provenance  de ou en allant vers  Guédiawaye, Guinaw-Rails, Yeumbeul, Malika, Keur Massar, Rufisque et les autres régions, cette zone donc une fois sous l’emprise des grandes manifestations de lutte,  va être constamment bloquée, empêchant toute fluidité de circulation. La belle et nouvelle corniche de Pikine qui longe le Technopôle pour desservir Guédiawaye et la ville de Pikine elle-même, sera alors paralysée et perdra ses vertus tant chantées par les populations.  Les avantages loués de l’élargissement de l’autoroute Pikine Patte-d’oie à côté de l’autoroute à péage, seront anéantis pour céder la place à une anarchie indescriptible.

Mais le pire des conséquences d’une telle construction à cet endroit restera la généralisation de l’insécurité dans la banlieue. Tous ceux qui habitent la banlieue savent qu’à la fin de chaque manifestation de lutte au stade Demba Diop ou au stade Léopold Sédard Senghor, les bandes d’hooligans envahissent l’autoroute depuis la Patte d’oie pour déferler dans les rues de Pikine et Guédiawaye, qui pour saccager et manifester leur mécontentement suite à la défaite de leur idole, qui pour voler et agresser automobilistes et piétons. A voir leur nombre inquiétant qui peut défier n’importe quelle armée, l’on se rend compte que ces envahisseurs qui se donnent rendez-vous à cette occasion, doublent voire quadruplent la capacité du stade.

Pour garder les espérances de ceux qui défendent et portent un tel projet et éliminer les conséquences redoutées par ceux qui sont contre, je reste convaincu que la solution serait d’édifier l’Arène dans un endroit toujours de la banlieue mais qui ne présente pas les inconvénients de paralyser la circulation, de fermer l’entrée et la sortie de Dakar, et de jeter les populations à la merci d’une horde de jeunes désœuvrés ou de mauvais perdants. 

Sangalkam et Diamniadio disposent suffisamment d’espace à même de contenir sans préjudice les grandes foules et présentent l’avantage d’être plus ouverts aux amateurs de lutte des autres régions. En plus, construire l’Arène sur l’un de ces sites, découragerait ou éliminerait les malfaiteurs aguerris qui n’avaient point besoin de se déplacer loin pour exercer leur jeu favoris : le petit banditisme.  Ainsi il y aurait de fortes chances que seule la bonne graine que constituent les vrais amateurs de ce sport national, remplirait les gradins.

Ce serait l’opportunité pour les autorités d’assainir le règlement de notre sport roi en améliorant la tenue vestimentaire peu pudique de nos lutteurs, d’éviter les combats disproportionnés entre David et Goliath. Même si jusqu’ici, David s’en sort bien, il faut redouter le jour où le pire arrivera et qui sera un sacré coup pour notre sport national qui veut s’ouvrir et s’imposer sur le plan international. 

Ces cris de cœur ne sont pas de vains mots d’un riverain dont les intérêts sont directement menacés ou d’un simple partisan accroché à un objectif à court ou long terme mais viennent plutôt d’un natif de Pikine qui y a vécu plus d’un demi- siècle et qui milite pour l’intérêt général de la nation.

J’ose espérer que l’entêtement qui a emporté l’ancien père de la nation sera évité ici par le nouveau devenu le Maître du jeu par la volonté de Dieu ».

Voir l’article au complet : « Le Monument de la Renaissance, l’Arène nationale et la Maison du Hadj : ces édifices décriés ou oubliés ». 

            L’Université de la Banlieue et l’assainissement, les urgences de l’heure

Pour conclure cet article après ce rappel des faits, nous disons aux futurs maires qui s’activent pour les joutes des élections locales et par ricochet au Président de la République, que les combats prioritaires pour les banlieusards, sont l’édification d’une université de la banlieue et surtout l’assainissement des départements de Pikine, Guédiawaye, Keur-Massar et Rufisque, pour mettre fin au calvaire des inondations tout en mettant fin aux séries d’agressions dans les aires de jeu projets favoris de nos autorités.

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