A l’Apr on rit aux éclats avec cette défection d’Idrissa Seck. Mais, le réveil pourrait être brutal chez les partisans de Macky, parce qu’Idy a en main de redoutables atouts.
Les militants de l’Alliance pour la République (Apr) se trompent ! Ils exultent de bonheur à l’idée de la sortie d’Idrissa Seck de la coalition Benno Bokk Yaakaar (Bby) et multiplient les petites phrases caustiques pour réduire à néant le divorce de l’ancien Premier ministre avec Bby. « Il est pressé », « Il ne sera jamais Président ! », voilà le genre d’attaques qui flambent des milieux apéristes. Le temps semble leur être favorable. Me Nafissatou Diop Cissé, disque dur du « Protocole de Rebeuss » a rompu avec Rewmi. C’est désormais une apériste. Mieux, elle s’est engagée dans la presse à produire un ouvrage sur ce fameux « Protocole de Rebeuss ». Non prévient-elle pour vilipender son ancien mentor. Mais qui est fou ? Un livre sur le « Protocole de Rebeus » peut-il à longueur de pages esquiver Idy ?
Seulement, tout cela ne devrait pourtant pas faire jaser. Me Abdoulaye Wade a, au cours de 26 ans d’opposition traversé des épreuves biens plus amères. Des défections à la pelle jusqu’à celle du pondéré Fara Ndiaye, alors député et n°2 du Pds, des accusations d’atteinte à la sûreté de l’Etat et des emprisonnements. En 2012, Wade a battu Diouf. En tout cas, tous savaient la séparation imminente et inéluctable. Le chef de l’Etat, Macky Sall a lui-même avoué que son allié cherchait depuis longtemps à couper les amarres. Il n’y a donc point de surprise. Par contre, comment ne pas être stupéfait, face au torrent de ridicule que les proches de Macky Sall cherchent, à tout prix, à couvrir le départ de Rewmi de Bby ? Le réveil risque d’être brutal pour les apéristes. Car, Mara semble bien, contrairement aux apparences, tenir de bonnes cartes en main.
1ère carte : Son verbe
C’est la meilleure des cartes politiques au Sénégal. Nombre de ténors de l’arène ont gravi les échelons dans leur parti ou dans l’administration au seul moyen de leur discours. Leur secret : manœuvrer le style emmiellé, corrosif, flamboyant ou persuasif. Le leader de l’Union pour le renouveau démocratique (Urd), Djibo Kâ en est un bon exemple. Il a galvanisé les foules, subjugué des Sénégalais par la force de son discours. Chaque fois qu’on « parle bien », on est, aux yeux de l’opinion un bon cadre politique. Le vrai baromètre, c’est la capacité à tenir un bon discours. L’ex-ministre de la Communication et des Télécommunications, Abou Lô a été surtout emporté par sa timidité. Ministre de la Communication, Lô s’est révélé au grand public comme un piètre communicateur.
Il ne pouvait pas si mal tomber. Car, nombre de ses prédécesseurs ont été de redoutables communicants. Moustapha Guirassy, Mamadou Diop Decroix, Aziz Sow, Djibo Kâ, Me Aïssata ont tous laissé à ce ministère une marque de fabrique bien singulière. La dame Awa Diop Mbacké aurait réussi sa consultation lors de la formation du gouvernement d’Aminata Touré si elle était un as de la parole. Dans ce registre, Idy est redoutable. Il navigue allègement dans la langue de Molière et Kocc Barma. Maître dans l’art des aphorismes, Idrissa Seck fait bon usage des versets coraniques. Son discours a toujours conquis le commun des Sénégalais.
2è carte : Un terrain vierge
Le leader de Rewmi arrive dans un champ de l’opposition désespérément amorphe. Le Parti démocratique sénégalais (Pds) est naturellement sur le pied de guerre. Mais, la traque des biens mal acquis, ciment de leur mobilisation ne galvanise personne. Les nouveaux partis comme celui de Pape Diop ou d’Abdoulaye Baldé, nés des flancs du Pds, peinent à grandir, à séduire et à gêner le pouvoir en place. Leurs leaders sont souvent convoqués par les enquêteurs. Tous les deux, piètres communicateurs, traînent le désavantage d’être accusés avoir trempé dans les biens mal acquis. Le maire de Ziguinchor, lui, a une mobilité très réduite. La dernière fois, il s’est vu interdit de voyage. Mamadou Diop Decroix d’Aj/Pads s’efforce de temps en temps de rappeler qu’il est bien dans l’opposition. Mais, sa « gesticulation » est pour l’heure médiatique.
Une sorte d’opposition qui n’empêche guère de s’assoupir à poings fermés. Le leader de l’Urd, Djibo Kâ, résiste aussi dans les médias, mais tout le monde sait qu’il épuisé ses réserves. Son parti est saigné à blanc, lui-même commence à accuser le coup de la vieillesse. Evidemment, tant que Moustapha Niasse est sur le terrain, haut perché au parlement, Tanor encore à la tête du Parti socialiste (Ps), « Djibo » voudra poursuivre le combat. Qui pour gêner Idy ? Khalifa Sall, maire de Dakar ? Me Aïssata Tall Sall, maire de Matam ? Malick Gakou, n°2 de l’Alliance des forces de progrès (Afp) ? Tous les trois sont encore sous l’emprise des leaders de leur parti. Le temps file. Et personne ne sait encore l’attitude de ces personnalités en 2017. Si à l’orée de 2014, ils continuent à étouffer leur ambition politique au nom de la discipline de parti, le maire de Thiès aura alors les coudées franches. Et comme Wade en 2012, Macky Sall en 2012, Mara pourrait être seul face à Macky Sall.
3è carte : Les « feuilles mortes » du Pds
Il y a la discrète bataille entre l’Apr et Rewmi. L’enjeu : les gros poissons du Pds. La visite de Thierno Bocoum à Bara Gaye est à inscrire dans cette stratégie. Le salut d’Oumar Sarr adressé à Idy lors de la visite au Camp pénal n’a échappé à personne. Le climat se détend entre Rewmi et le Pds. Macky Sall aussi manœuvre toujours. D’ailleurs, élu président avec presque 66 %, il est conscient d’une chose : impossible de se passer des gros calibres du Pds. Face à la presse à Paris, le 9 juillet 2012, Macky a dit être ouvert en direction des militants du Pds décidés à venir travailler avec lui « pour asseoir un processus de développement cohérent du Sénégal ». Le tout est enrobé dans le concept de « compromis historique ». Une sorte de face théorique de la démarche et du débauchage tous azimuts de ces « fruits mûrs » prêts à céder du parti de Wade. L’enjeu, c’est l’après-Wade.
Cet « après-Wade » est là. Le Pds explose de toutes parts. Idy tout comme Macky en convoite des pans. Devenu président de la République, Macky Sall tient de bonnes cartes en main. Il peut entrer en contact avec qui il veut, faire miroiter des positions et assurer la continuité aux affaires. Des libéraux, surpris par la déroute du 25 mars, ne rêvent que d’être repêchés. Sa position a, cependant, quelques handicaps. Arrivé au pouvoir dans une ambiance où la citoyenneté n’a jamais été aussi affirmée, Macky ne peut alors recycler n’importe quel cacique au risque de s’exposer à la clameur de l’opinion. Autre obstacle, la traque des biens mal acquis engagés contre certains dignitaires ne lui attire pas que du bien. Au contraire ! Il essuie les attaques les plus virulentes tantôt portées par Me Ousmane Ngom, tantôt par Oumar Sarr, tête de liste du Pds aux dernières Législatives.
4è carte : Les déçus
Il y a une tendance de plus en plus marquée chez des frustrés de la mouvance présidentielle qui ne cachent plus leur intention de militer au Rewmi. Faute de maroquin, ces cadres rêvent de réaliser leur ambition dans une structure politique comme Rewmi. Nombre de ces hommes politiques commencent à voir en Idrissa Seck le futur président de la République. Parmi ces potentiels militants de Seck comptent sûrement une bonne partie de « Macky 2012 ». Cette coalition qui a cru le premier en Macky Sall rumine encore sa colère. Les camarades d’Ibrahima Sall qui voulaient à tout prix que Macky Sall se débarrasse de ses alliés de Bby n’ont pas eu gain de cause. Le dernier remaniement a certes fait la part belle aux apéristes, mais « Macky 2012 » continue de ronger ses freins. Nombre de partis de cette coalition pourrait bien se rapprocher d’Idrissa Seck.
5è carte : Les inondations, l’emploi des jeunes, le prix des denrées, l’université
C’est un cocktail explosif. L’ancien Premier ministre Abdoul Mbaye a fini par laisser des plumes aux inondations. Le pouvoir semble-t-il, lui reproche, entre autres, d’avoir dit aux victimes des eaux de pluie l’impossibilité pour l’Etat de les tirer d’affaire tout de suite. Au sujet de l’emploi des jeunes, le Pm a eu aussi sa petite phrase de vérité qui, sans doute, a dû déplaire Macky Sall. D’ici à la fin de son mandat (2017 ?), personne n’ose parier que la promesse de 500. 000 emplois promis au cours de la campagne sera réalisée. Le recrutement de 5500 agents dans la fonction publique tarde à se matérialiser. Le ministère de la Fonction publique, maître d’œuvre, hésite sûrement à sortir les listes. Mansour Sy redoute, à l’évidence, la réprobation de l’opinion. Des milliers de jeunes avaient déposé et rongent encore leurs freins. Au sujet de la baisse du prix, l’Etat a fini par abandonner le débat sur la baisse acculé par la dure vérité du marché. Le sujet qui fait le plus frémir est l’université. Les frais d’inscription portés à 25 000 FCFA sont rejetés par des étudiants. Ils ont même annoncé déjà leur volonté d’en découdre avec les pouvoirs publics.
6è carte : Le temps
Qu’on l’avoue ou pas, Idrissa Seck s’est engagé dans l’opposition radicale au bon moment. Il a au moins trois ans pour sillonner le pays, réorganiser son parti et cultiver les bonnes amitiés. En 2012, l’atout principal de Macky Sall s’est révélé être le temps. Juste après son divorce avec le Pds, en 2008, Macky a créé l’Apr, puis s’est jeté sur le terrain. Il n’a même pas pris le temps de structurer son parti. Mara a normalement le temps de faire le tour du Sénégal pour essayer de réactiver son parti. Fort d’une dizaine de députés, il a suffisamment de moyens pour s’adonner à la politique.
7è carte : La stigmatisation
Les Sénégalais, on le sait, savent se mettre spontanément du côté des faibles. Macky Sall a tiré largement profit de la manière dont Wade s’est séparé de lui. Une sorte d’émotion collective s’est bâtie autour de sa personne lorsque, à tout prix, le chantre du Sopi a tenu à le sanctionner pour avoir « fait convoquer » Karim Wade au Parlement. Cette même « folie » s’est emparée des proches de Macky Sall. Des attaques virulentes s’abattent sur le maire de Thiès. Nombre de ces critiques sont, tout de même fondées. Mais à force de les marteler, les apéristes finiront par agacer l’opinion.
seneplus.com
Tu racontes des connereies car c’est justement le verbe qui est le défaut de Idy qui n’a pas compris que les sénégalais ont changé et ne croient plus au verbiage .
Ensuite Idy est ethnocentriste et régionaliste qui n’a pas de base réelle dans le pays.
quel beau texte , suivie d’une analyse du contexte implacable . l’auteur connait très bien le terrain politique de ce pays !! Félicitations , c’est un plaisir de vous lire . qu’on le veuille ou non idrissa est le meilleur de cette piteuse classe politique sans boussole . qui peut croire aux incantations d’un maky sall surpris par l’exercice du pouvoir , n’ayant jamais habité la fonction , ne serait ce que dans son rêve le plus fou . les apéristes seront surpris par leur descente aux enfers lors des prochaines joutes électorales !!! ils vont récolter les résultats de leur mauvaise prestation à la tête de l’État . le mentor , grand corrupteur devant l’éternel ne fait que distribuer l’argent du contribuable à l’achat des consciences pour sa cause , l’intimidation des potentiels concurrents , soit ils rallient sa cause ou deviennent des ennemis à combattre ; voilà son crédo , l’amateur sait qu’il n’a jamais bénéficié de la sympathie populaire et est en chute libre même chez ceux qui lui avaient manifesté le peu de crédit : c’est le plus impopulaire des hommes politiques de ce pays , tout sondage confondu . le texte qui nous a été proposé par senplus est des plus éloquents alors félicitations et bonne continuation .