Le procès de Charles Taylor pour crimes de guerre s’est achevé comme il avait commencé trois ans plus tôt: l’ancien président libérien accusé d’avoir armé la rébellion sanglante en Sierra Léone voisine a boycotté la dernière audience mardi, se disant victime de manoeuvres politiques et de poursuites injustifiées.
L’avocat britannique de Charles Taylor, Courtenay Griffiths, a claqué la porte du Tribunal spécial pour la Sierra Léone (TSSL) à Leidschendam (Pays-Bas) après le refus des juges d’accepter sa plaidoirie écrite, un document de 600 pages exposant le point de vue de la défense à l’issue de trois ans de témoignages devant le TSSL. Charles Taylor s’est rendu à l’audience mais a refusé de regagner la salle après une interruption de séance.
Il est improbable que le boycott ait un impact sur l’issue du procès. Les trois juges internationaux ont ordonné la poursuite de la procédure.
Charles Taylor est accusé d’avoir armé et soutenu les rebelles sierra-léonais du Front révolutionnaire uni (RUF) en échange de diamants illégalement extraits. Il a plaidé innocent des onze charges retenues contre lui pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, dont des charges de meurtre, torture et exploitation d’enfants-soldats.
La guerre civile de 1992-2002 a fait plus de 100.000 morts en Sierra Léone et donné lieu aux pires atrocités, notamment à des mutilations des bras et des jambes, du nez ou des lèvres. Charles Taylor a dirigé le Liberia en tant que président élu de 1997 à 2003 après s’être emparé du pouvoir par une guerre civile sanglante. C’est le premier procès d’un ancien chef de l’Etat africain devant un tribunal international chargé de juger les crimes de guerre.
Le tribunal a refusé la plaidoirie écrite de la défense parce qu’elle leur était soumise après la date-butoir du 14 janvier. La juge ougandaise Julia Sebutinde a toutefois estimé qu’on « privait (l’accusé) de son droit fondamental à se défendre ». Me Griffiths a soutenu qu’un retard de 20 jours n’était pas grand-chose « dans le contexte d’un procès qui a duré trois ans ». Il compte faire appel de ce rejet.
La procureure a pour sa part fustigé l’attitude de Charles Taylor, rappelant que le boycott de l’ouverture du procès par l’intéressé en juin 2007 avait entraîné un retard de six mois. « L’accusé n’est pas à une réception, il ne peut pas renvoyer son carton à la dernière minute. Il est l’accusé d’un procès criminel », a lancé Brenda Hollis.
« Charles Taylor, ce manipulateur intelligent et charismatique, a fait en sorte que ses forces par procuration (…) commettent ces crimes contre des victimes sans défense au Sierra Léone », a déclaré la procureure. « Toute cette souffrance, toutes ces atrocités, pour alimenter la cupidité et la soif de pouvoir de Charles Taylor. » AP
Charles Taylor boycotte la fin de son procès pour crimes de guerre
Date: