Le député de Bës du ñiakk est en phase avec le président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, qui a déploré, jeudi, l’absentéisme, le retard et le manque de rigueur de certains parlementaires lors du vote du budget des ministères. Cheikh Oumar Sy, qui constate que les députés viennent en salle selon les ministères qui les intéressent, propose la mise en place des sous-commissions pour inciter les députés à s’intéresser aux thématiques qui se posent à l’Hémicycle. Dans cette première partie de l’entretien, le camarade de Serigne Mansour Sy Djamil jette un regard critique sur l’institution parlementaire.
Le président de l’Assemblée nationale a décrié l’absentéisme et le retard de certains de vos collègues. Qu’en dites-vous ?
Je crois que le président de l’Assemblée nationale a en charge le fonctionnement de cette institution. Il faut rappeler qu‘il y a huit vice-présidents qui sont chargés, lors des sessions parlementaires, surtout des plénières, d’assurer l’intérim. S’il y a un président de séance, il faut avoir nécessairement deux vice-présidents dans la salle pour, au cas où le président de séance à un empêchement, que l’un puisse le remplacer. C’est ce que prévoit le Règlement intérieur. Et, c’est à ce moment là que certains parlementaires n’étaient pas sur place. Il y a certains qui ont voulu avoir des excuses. Et, d’autres n’ont pas eu, peut être, le temps de le faire ou ne se sont pas présentés. Dès fois, il faut relativiser dans ces cas de figures. Nous sommes en période de Magal, d’activités assez intenses. Donc, certains parlementaires se sont rendus dans leurs terroirs pour accueillir le Chef de l’Etat. Il s’avère aussi que pour certains ministères, des parlementaires font leurs travaux dans les commissions et ne sentent plus le besoin de revenir pour parler encore. Nous faisons trois séances, c’est-à-dire nous recevons les ministres en commission technique, des finances, avant d’aller à la plénière. Maintenant, il y a un temps limitatif en plénière. Si vous faites votre travail en commission, dés fois, vous venez en salle, vous vous rendez compte que vous avez des minutes assez limitées et vous vous dites : «Comme j’ai fait mon plaidoyer donc, ce n’est pas nécessaire que j’intervienne.» Dés fois aussi, il faut dire la vérité, pour certains ministères, les députés ne trouvent pas la nécessité d’être en salle. Et, ce jour-là, il y avait le ministère des Investissements et l’Apix. Aujourd’hui, le plaidoyer général au niveau des parlementaires, c’est que nous-mêmes nous sommes confondus entre l’Agence de l’Apix et le ministère à qui on donne les mêmes prérogatives. C’est un ministère qui n’a même pas d’investissements. Donc, c’est ce genre de problèmes que les députés posent en commission technique ou des finances. C’est pourquoi ils ne voient pas l’opportunité de revenir sur ce qu’ils ont déjà dit.
A vous entendre parler, on a l’impression que vous légitimez les actes de vos collègues.
Non, je ne légitime rien. Pour moi, il faut relativiser les choses en tenant compte du contexte. Et je ne suis pas là pour dire que je ne suis pas d’accord avec le président de l’Assemblée nationale parce qu’il a effectivement raison. Nous sommes payés pour travailler, surtout au niveau du vote budgétaire. Les députés ont l’obligation de venir pendant les séances pour faire leurs travaux. Maintenant, nous avons huit vice-présidents. Donc, il n’y a aucune excuse de ce côté-là parce qu’il n’est pas programmé pour que qu’ils soient absents. Nous-mêmes, les parlementaires, nous venons de Tivaoune, Thiès, Kédougou, etc. Dans le cadre des réformes sur le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, nous avons dit qu’il faut sanctionner. Effectivement, il y a des députés qui ont plus davantage que d’autres par rapport à leur fonction. Que ce soit des vice-présidents ou des secrétaires élus, ils ont l’obligation d’être là pendant les séances plénière. Nous qui sommes députés simples, nous nous retrouvons dans les commissions souvent, de même qu’en plénière. Mais, dans le contexte global, il ne faut pas jeter tout dans le même sac. Et, nous avons proposé qu’il y ait des sanctions pour que le travail parlementaire soit plus efficient et plus efficace même dans le cadre du fonctionnement normal de l’Assemblée nationale. Si vous allez en France, aux Etats-Unis, etc., vous verrez le même constat. Les députés viennent en salle selon les ministères qui les intéressent parce qu’ils n’ont pas une expertise dans tous les domaines du ministère concerné. Nous avons fait un marathon et nous n’avons pas d’assistance parlementaire. Parfois, nous avons deux ministres qui passent à la même heure. C’est ce qui fait que nous sommes obligés d’aller à la salle des commissions de finances, des lois.
Maintenant, qu’est-ce qu’il faut faire pour rompre avec ce genre de pratiques ?
D’abord, il faut voir ce que les textes prévoient dans le but de les renforcer, de les appliquer. Et je crois que c’est une nécessité de voir qu’il y a une sanction derrière. Cela c’est dans le cadre réglementaire qu’il faut le faire. Il y a des commissions qui sont larges et les députés ont du mal à faire leur travail convenablement. Donc, il faut maintenant des sous-commissions. Vous prenez une commission comme le développement où vous avez 14 ministères. De ce point de vue, s’il y a des sous-commissions, chaque député va se sentir de plus en plus impliquer. Par exemple, nous avons le réseau pour la bonne gouvernance des ressources minérales et on a une cinquantaine de parlementaires qui travaillent avec nous. Donc, il ne s’agit pas de dire que les parlementaires ne veulent pas travailler. Ce qu’il faut faire, c’est de trouver des mécanismes qui poussent les parlementaires à s’intéresser aux thématiques et à vouloir plaider.
Moustapha Niasse a émis l’idée de registre pour que les députés émargent à leur arrivée à l’Assemblée nationale et à leur départ. Cette formule vous paraît-elle efficace ?
Oui, il a toute la légitimité d’émettre cette idée. Et cela peut être une solution dans la mesure où il a la police de l’Assemblée nationale. Il est appelé à prendre des mesures pour renforcer l’efficacité du travail parlementaire. Donc, sous ce rapport, il peut dire ce qu’il veut faire. Mais, dans le cadre général, ce qu’il faut, c’est de revoir le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale avec tous les collègues pour rendre le travail parlementaire plus efficace.
Avec le recul, comment qualifiez-vous cette 12ème législature ?
Bon! Vous savez, c’est problématique. La première chose à dire, c’est que nous avons été élus sous le signe de la rupture. Et il y avait un engagement fort au niveau des populations, après ce qui s’est passé sous le régime libéral de Me Abdoulaye Wade, d’avoir une Assemblée nationale plus efficace, plus efficiente et qui porte les doléances des populations. Il y a eu beaucoup de soubresauts depuis notre élection. Au Sénégal le député, c’est quelqu’un qu’on regarde de l’œil social, c’est-à-dire tout ce qui est baptême, organisation religieuse, manifestation sportive, etc., on le parraine. Bref, il y a ce bien matériel que les gens portent sur le député. L’autre problématique, c’est que le consensus du groupe n’a pas pu se faire comme nous souhaiterions que le Benno bokk yaakaar soit. Vous avez vu la dernière loi qu’on a votée en juin. Tout cela vient de la coordination interne qui devait être mieux renforcée pour permettre d’avoir une cohésion de groupe. Nous avons engagé des choses. Aujourd’hui, la traduction simultanée existe, de même que le diplôme en droit et pratique parlementaire qui est une première dans la sous-région, la bibliothèque de l’Assemblée nationale a été refaite. Globalement, il y a des lois qui ont été votées. Par contre, je dois signaler que tout n’est pas rose parce que l’exécutif à trop de pouvoirs sur l’Assemblée nationale.
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