L’euphorie de la victoire peut cacher beaucoup de choses, mais la problématique, l’état des lieux , l’évolution, le devenir de notre football, comme les critiques objectives á l’encontre de qui de droit se présenteront toujours avec acuité et continueront.
Que l’on se le tienne pour dit une bonne fois pour toute.
La vérité peut faire mal. Et pour bon nombre de sénégalais, au nom des sacro-saints principes du « mandou » et du « soutoura », elle ne doit pas heurter ni toucher leurs sensibilités ou celles de leur préférés parmi les acteurs du foot. Quid un ministre, un président de fédération, un sélectionneur ou un joueur.
C’est pourquoi l’objectivité dans la couverture des faits sportifs, plus qu’un sacerdoce ou une ligne de conduite doit être dénudé de tout sentimentalisme et chauvinisme béat. Critiquer objectivement c’est aussi être un avant-gardiste pour permettre de changer positivement le cours des choses.
Le Sénégal est champion d’Afrique aujourd’hui et les superlatifs fusent de partout pour magnifier, exalter, adouber et élever les uns et les autres. Les laudateurs de service font feu de tout bois. Au point d’en oublier l’anomalie d’un football qui jusqu’au soir du 6 Février 2022 était sans infrastructures digne de ce nom. Une fédération au sein de laquelle les cumuls et l’inamovibilité du fait d’un système électoral taillé sur mesure crée des manitous et des incontournables. Un football local qui n’existe que de nom où les clubs dit de l’élite (surtout les traditionnels issus de la réforme de 1968) sont la résultante d’un longue descente vers l’abîme du néant, d’une mort programmée. Tout étant de près ou de loin lié au manque d’expertise, de politiques innovatrices pour générer des ressources et remplir nos stades, de politiques de création des métiers de football autour du management de clubs , du maintien effectifs de nos maigres infrastructures, de la formation des cadres administratifs et techniques, de cadres de recherches en études de schémas tactiques afin d’ élever le niveau technique de nos joueurs, de nos compétitions locales etc…Juste á titre d’exemples.
La Confédération Africaine de Football est sur le point de codifier et de mettre en place la réforme de ses compétitions d’élite en clubs ( Ligue des Champions et Coupe de la CAF) qui seront remplacées par une Super League Africaine. Une véritable catastrophe pour les clubs sénégalais qui n’ont pas les profils, les critères et le standing pour faire partie des 24 élus de la future Super League Africaine.
Qu’en sera-t-il si un football national devient incapable de se mesurer régulièrement contre l’élite continentale et de profiter de la manne financière qui en découlera?
Même si elle fait des efforts, l’attention et l’action de la Fédération Sénégalaise de Football semblent être principalement orientées vers le devenir de l’équipe nationale. Á vu d’oeil, il y’a beaucoup á faire pour mettre notre football sur les rails de la compétitivité á tous les niveaux.
Cela passe par une hiérarchisation au niveau de l’élite locale, de la revalorisation de nos clubs dits traditionnels, du respect des cahiers de charges au sein d’une Ligue Pro comateuse, de la réforme de notre Direction Technique Nationale, de la formation des techniciens et surtout de leur recyclage, par l’instauration d’une politique nationale initiée et pilotée au niveau fédérale pour la vulgarisation et le développement continue de la petite catégorie. Secteur aujourd’hui dominé et complètement entre les mains des centres de formation privées á vocation plutôt mercantile.
Bref, être champion d’Afrique était un statut derrière lequel le Sénégal a couru pendant plus de 56 ans. Mais devenir compétitif et représentatif au niveau continental sauvera notre football local de la déchéance et de l’anonymat dans lequel il est plongé depuis deux décennies. Une anomalie qu’aucune coupe d’Afrique ne saurait cacher ou taire.