La caricature est devenue l’une des atrocités les plus choquantes de ce siècle, et ceci depuis qu’elle a dans sa ligne de mire le cercle tant symbolique que gracieux de la religion. La raison est simple : le sens étymologique du mot renvoie au fait de « charger de façon exagérée. » Ce qui ne saurait être toléré par tout croyant fort de son appartenance à une religion, qu’elle soit musulmane, chrétienne ou autre, tout simplement parce qu’on fait référence par extension à un rajout. Et après la fameuse aventure Charlie Hebdo, ce fut au tour du premier Site d’actualité d’Afrique d’entrer en scène. Un geste de trop qui, malgré la présentation d’excuses, mérite une analyse approfondie.
Les caricaturistes prônent un attachement à la liberté d’expression, principe souvent bafoué par des censures. L’islam, elle, dénonce une sorte de « vérité aux sources mensongères ». Seydina Alioune, vaillant compagnon du Prophète Mouhamad (psl), s’interrogeait sur le fait qu’une politique politicienne puisse servir de base à une idéologie aux apparences à la fois logique et conforme aux réalités communément admises. S’il est vrai que se battre pour la préservation d’une quelconque liberté est nécessaire, il n’en demeure pas moins que cette liberté s’apparente aujourd’hui à un carrefour où se retrouvent toutes les formes d’attaques aux croyances religieuses. La communauté mouride vient d’en avoir la description avec cette «goutte de trop qui a fait déborder le vase. »
Dans un article publié sur le site officiel de Jeune Afrique le dimanche 31 janvier 2016, l’on souligne une confession de l’auteur faisant fie d’un «regard du lecteur complétement en déphasage avec l’intention de l’auteur.» Des propos qui illustrent parfaitement le fait que les concernés évoluent sous le joug d’une crise de perception et qui justifie une confession caricaturiste parce que portant un élan à la fois critique et peint d’un obscurantisme inquiétant. Une caricature ciblant une personnalité religieuse quelconque ne saurait en aucun cas être perçue comme légale encore moins dotée de sens par un adepte. N’est-ce pas là une incohérence puisqu’il s’agit d’une religion qui spécule sur le respect de son prochain ? Et le philosophe Descartes de préciser dans son ouvrage intitulé les passions : «La dérision ou moquerie est une sorte de joie mêlée de haine ». Par ailleurs, l’auteur en question revient sur une citation léguée par le Prophète de l’islam : « Lorsque l’un de vous se met en colère, qu’il se taise !», comme pour évoquer un verbiage constaté ca et la en guise de réaction. Il s’en va dire qu’il méconnait sans nul doute l’autre assertion du Prophète (psl) qui soutient que le silence est un allié sûr dont il faut connaitre le mécanisme. Le Général de Gaule nous enseigne que le silence renforce l’autorité. Mais il faut soulever une équivoque : Une telle situation devrait servir à réfléchir sur les éléments nécessaires au dialogue, pierre angulaire de la restauration de l’harmonie. Le mot « douceur », évoqué donc par l’auteur, ne saurait donc donné un sens à une telle situation.
L’autre forme de caricature a dénoncé est bien de chez nous. S’il est vrai que la plume contribue assez souvent à l’horreur médiatique, il faut soutenir que les conceptions religieuses peintes par l’intelligentsia sénégalaise amplifient la confusion. Le sens donné à la responsabilité d’un guide religieux a été travesti. Elle est synonyme d’inertie, d’effacement et de détention d’opinion passive. Quoi de plus ridicule que de vouloir limiter à un cercle restreint une autorité mue par le désir de contribuer à la continuité de la mission d’un homme à la fois Chef Militaire, Chef Politique, Guide Religieux et Grand Mystique, notamment le Prophéte de l’islam? La passivité a toujours rebuté cette religion qui compte aujourd’hui plus d’un milliard d’adeptes. L’islam est tremplin et conscience, elle est cette barque qui prévaut aux destinées de la Oumma. Un guide religieux, quel que soit sa confrérie d’appartenance, ne doit donc en aucun cas voir sa responsabilité être assujettie à une neutralité dans les prises de décision, d’autant plus qu’après 56 ans d’indépendance, la confusion règne toujours. Et si les acteurs de Jeune Afrique redéfinissaient leur mission, et ceci en l’associant à une tache o que noble d’informer tout en peignant les valeurs propres au continent noir ? Et si les intellectuels sénégalais réfléchissaient sur la vraie mission de ceux dont les prédécesseurs se sont battus contre l’oppresseur blanc pour qu’ils puissent, aujourd’hui, vénérer la religion qui compte le plus d’adeptes au pays de la téranga en l’occurrence l’islam ? « Serigne Si », comme on aime à les appeler, qu’il s’agisse du cercle du Mouridisme, du Tidjanisme, des Layenes ou encore de la Qadriya , sont les seuls à mêmes de rétablir l’équilibre social, encore faut-il qu’on leur tende l’oreille. Ce que, malheureusement, l’opinion publique ne fait pas. C’est en période d’instabilité politique ou sociale qu’elle revendique le fait que « les marabouts doivent parler ! » On ne fait pas d’un otage une personne dont les prédispositions morales et intellectuelles surpassent de loin les questions les plus complexes que la conscience publique puisse poser. Tout ceci justifie la noblesse du combat de l’auteur français Jean Francois Kahn : Troquer l’horreur médiatique contre l’honneur médiatique .
CHEIKH A.T.NDIAYE