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CONTRE-COURANT – Changer les hommes, changer d’approche. Par Ibrahima BAKHOUM

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Abdoulaye Wade en a fait les frais, Macky Sall en prend le chemin. L’impréparation face aux urgences du monde rural est devenue récurrente. Si les nouvelles autorités tremblent à la lecture des bulletins météorologiques tels que les feuillette Monsieur Météo, elles n’auront pas tort. Il n’est pas dit non plus, que l’on puisse leur en tenir rigueur.

Une soudure qui se signale un peu partout dans le monde rural et des nuages de plus en plus chargés d’eau interpellent le gouvernement, alors que l’équipe dirigée par le Premier ministre Abdoul Mbaye vient à peine de prendre fonctions. Et la voila déjà comptable d’une situation qu’elle n’a pas créée, le Sénégal vivant encore les déficits d’une saison mal arrosée en 2011. Quand l’aliment se raréfie parce que les réserves fourragères ont fini de livrer leurs dernières brindilles et que les milliards promis pour nourrir le bétail se font attendre, le pasteur n’a plus que sa foi pour prier le ciel d’ouvrir ses vannes. Pendant ce temps, le paysan pourrait être en train de faire la prière dans l’autre sens, parce qu’un démarrage précoce de l’hivernage lui causerait les soucis d’un producteur sans moyens de productions. Semences (d’arachide), engrais entre autres intrants agricoles attendent d’être distribués. Encore faudrait-il qu’ils soient disponibles en quantité et qualité, ce qui n’est pas évident. Se posent sur ce chapitre de la situation agraire, des difficultés de nature et origines diverses. Nous en reparlerons plus tard.

Au nombre des solutions à imaginer pour éviter à l’avenir, les errements passés et actuels dans la gestion des dossiers d’hivernage, la plus maîtrisable serait d’ordre législatif. L’enchainement des évènements post électoraux ne laisse pas suffisamment de temps au nouvel élu. Pour un scrutin qui débute en février et un deuxième tour ayant lieu dans la dernière semaine de mars, le temps d’imprégnation aux urgences de la charge s’en trouve réduit pour le nouveau Président de la République, qui prend fonction dès début avril, soit à quelques jours des premières pluies.
La grande Amérique a trouvé un formidable tampon institutionnel entre le jour de l’élection (à un tour) en novembre, et la passation de pouvoirs en janvier. Les conseillers entrant apprennent à connaître des dossiers auprès de leurs prédécesseurs.

Ainsi, il est possible de donner du contenu à la « continuité de l’Etat » régulièrement convoquée chez nous, mais mise à mal en 2000, année de la première alternance démocratique.

Il y a en outre, dans le système sénégalais, l’absence remarquée d’un maillon essentiel de la chaîne de transmission des pouvoirs et services. Le Secrétariat général semble devenu facultatif dans les ministères. De rigueur dans les années Léopold Senghor (pourtant avec Diouf comme Premier ministre pendant dix ans), la fonction a progressivement déserté les ministères au profit des directions de Cabinet. Jusqu’alors, les Secrétaires généraux étaient des Administrateurs civils, formés pour servir l’Etat incolore parce que non partisan. C’est progressivement que ces grands Commis ont été rendus « contournables », jusqu’à tomber dans l’oubli, déjà avant 2000.

Dans sa volonté de concrétiser une promesse maintes fois ressassée, de « donner le Pouvoir aux jeunes », l’Universitaire Abdoulaye Wade avait plutôt tendance à promouvoir des « homologues ». Mais la gestion de dossiers stratégiques à eux confiée devait obéir à des normes qui demandent plus que le nombre d’ouvrages avalés pour accéder au titre de Docteur ou Professeur agrégé. L’inexpérience de certains de ces universitaires avait d’ailleurs été progressivement mêlée à la « crasse » de sans grade intellectuel, pour donner le cocktail « d’incompétence » dont les différents cabinets sous Wade n’ont jamais pu se débarrasser de l’étiquette. Le directeur de Cabinet qui fait de plus en plus office de cheville ouvrière du département, est généralement recruté dans le cercle des « amis » et des militants du parti du ministre.

A un niveau supérieur, ce type de collaborateurs est dit « ministre-conseiller », ainsi qu’expliqué lundi par le Président Macky Sall. On pourrait s’intéresser à la provenance et aux critères du choix de ces messieurs et dames devant « préparer les dossiers » à soumettre au Chef de l’Etat. On constatera alors, que de « l’Espoir partagé » à l’esprit de Famille, la nuance tient sur la seule lettre dont l’absence dans l’orthographe de Bokk (Yaakaar) n’éloigne que légèrement du « Mbokk » tout aussi présent dans les combinaisons de celui qui dit mettre « tous les Sénégalais » au même niveau de considération. On ne perd rien pour attendre.

Conséquence logique de cette approche dans les nominations, quand le directeur de Cabinet du membre du gouvernement est recruté dans des conditions à l’appréciation du seul ministre, ses fonctions cessent avec la fin de mission de celui qui l’avait coopté. Et se pose l’équation du suivi diligent des dossiers, le successeur au poste ayant parfois besoin de temps, pour comprendre le département, puisque la mémoire vivante a été presque « effacée » par le précédent remaniement. Quand cela se passe au sommet de l’Etat ainsi qu’expérimenté au Palais de la République, se dégage une première explication des l« tâtonnements » dont on accuse le Pouvoir issu du vote du 25 mars dernier, après que le précédent en avait donné quelques succulentes illustrations, en 2000.

A l’impréparation des nouvelles autorités qui commencent à peine à lever les yeux pour scruter les nuages annonciateurs d’hivernage, s’ajoute la question de la qualité des semences, pour ce qui est de l’arachide. Même si l’adversité politique veut circonscrire les difficultés paysannes à la seule période 2000-2011, il faudra quand même remonter aux années 80 pour comprendre comment une race de « gros producteurs » véreux a contribué (sans être la seule cause) à affaiblir la qualité germinative de la graine d’arachide au Sénégal. On verra dans une prochaine chronique, comment c’est arrivé et pourquoi il importe de pousser (ou aider, c’est selon) le Président Macky Sall à respecter son engagement de ne pas créer une (nouvelle) race de privilégiés, dans la gestion des affaires publiques.

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