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Coronavirus et philanthropie au Sénégal. (Par Alassane K. Kitane)

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Qui a défini la philanthropie comme une générosité désintéressée à l’égard de
ses semblables ? Dans notre pays en tout cas, cette définition n’est plus
fonctionnelle. L’État, le personnel politique, les people, bref tout le monde
profite de la pandémie pour polir ou vendre son image. C’est le comble de la
société de spectacle et de l’égoïsme devenu pathologique. Mais ce qui est
paradoxal dans cette affaire, c’est moins le comportement des individus que les
choix du gouvernement : une remise fiscale est promise aux donateurs !
Pourquoi ne pas l’appeler une avance sur fiscalité ? Tout porte à croire que c’est
un gouvernement qui a des problèmes de trésorerie, et qui cherche de façon
informelle ou perfide à anticiper sur ses recettes budgétaires pour se donner une
bouffée d’oxygène dans cette situation de crise. Ces entreprises qui donnent de
l’argent à la télé sont donc doublement gagnantes : elles ont la publicité et la
remise fiscale. Promettre une remise fiscale à ce stade de la lutte nous semble
impertinent et même dangereux, car on ne sait pas combien de temps va durer.
On ne sait pas non plus quelles sont les entreprises qui vont en pâtir le plus. Il y
a apparemment un parfum de précipitation dans la communication du
gouvernement (car beaucoup de décisions prises dans ce sens relèvent de la
communication politique). Le corona a donc le mérite de nous révéler la vraie
situation de notre pays. Y a-t-il dans ce pays un fonds de gestion des calamités
comme c’est le cas dans beaucoup de pays ? A-t-on les structures de santé que
mérite notre peuple ? Combien d’hôpitaux on aurait pu construire avec l’argent
qui a financé le TER ?
Ce qui est plus choquant, c’est qu’un ministre a osé dire que la qualité de notre
système de santé a permis de faire face à la pandémie ! Il a même insinué que
c’est grâce à la vision du Président que la pandémie n’a pas fait de ravage chez
nous. J’imagine que les autres pays africains ont dû nous emprunter nuitamment
notre président pour, eux aussi, éviter le chaos qui sévit dans les pays du nord !
Voilà comment on construit des mythes pour dissoudre la réalité. On ne mesure
pas la performance d’un système de santé par une pandémie dont l’impact dans
notre pays est forcément affaibli par des paramètres autres que ceux définis par
la médecine moderne. Notre système de santé n’est pas plus performant que
celui de l’Italie, il faut arrêter de baratiner le peuple pour faire une récupération
politique de cette affaire. Tout le monde a rangé les armes pour vous laisser
travailler dans la quiétude, alors ayez la décence de ne pas exploiter nos peurs et
angoisses pour redorer votre blason !
La santé et la performance d’un système sanitaire sont évaluées par la
satisfaction qu’il procure aux citoyens. Un système de santé doit être évalué par
la qualité de sa gestion des maladies normales ; or sur ce point, il suffit de faire

un détour dans n’importe quel hôpital public de l’intérieur du pays pour se
rendre compte que notre État a failli à ses obligations. Par la grâce de Dieu ne
nous parlez plus de CMU et autre pacotille de politique publique. Notre peuple,
en ce moment, n’a pas besoin de charognards politiques, il a plutôt a besoin
d’actes qui parlent d’eux-mêmes.
Alassane K. KITANE

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