Le clan Diack, autour de Lamine, ancien président de la Fédération internationale d’athlétisme, est au centre du système de corruption mis au jour par la justice française, selon Médiapart et Lyon Capitale, qui s’appuient jeudi sur le rapport encore secret d’une commission d’enquête de l’Agence mondiale antidopage.
« Extorsion de fonds de médaillés olympiques », « chantages envers des athlètes »: le rapport de la commission d’enquête indépendante initiée par l’Agence mondiale de lutte contre le dopage (AMA) est accablant, selon la lecture qu’en font jeudi Médiapart et Lyon Capitale.
La Fédération russe elle-même n’aurait pas hésité à faire chanter ses propres athlètes pour qu’ils payent de leur poche le silence de l’IAAF sur leurs pratiques douteuses.
Lamine Diack, 82 ans, qui a présidé aux destinées de l’athlétisme mondial pendant 15 ans jusqu’à l’été dernier, a été mis en examen lundi pour corruption passive et blanchiment aggravé.
Les faits sont liés à un système de camouflage de cas de dopage moyennant finances, révélé en décembre 2014 par la chaîne allemande ARD. La commission tripartite indépendante montée par l’Agence mondiale antidopage (AMA) travaille sur ce dossier depuis janvier et doit officiellement publier son rapport lundi à Genève.
« La corruption de la famille Diack est bien rodée, agencée à l’échelle internationale », affirme Médiapart, qui s’est donc déjà procuré ce rapport: « De Monaco, siège de l’IAAF, en passant par le Sénégal et la Russie, jusqu’à Singapour », écrit le site d’informations.
– Diack, père et fils –
Sont mis en cause Lamine Diack, mais également deux de ses fils, Pape Massata et Khalil, ainsi que son conseiller juridique, Habib Cissé, et l’ancien médecin en charge de la lutte contre le dopage au sein de l’IAAF, Gabriel Dollé. Des entraîneurs russes, intermédiaires pour le financement, sont également cités.
« Les enquêteurs indépendants de l’AMA tiennent tout de même à nuancer les accusations contre l’IAAF dans son ensemble, en louant +l’intégrité+ de plusieurs cadres de la Fédération internationale qui tireront la sonnette d’alarme, étonnés que des sportifs suspectés de dopage puissent continuer à courir, notamment lors des Jeux olympiques de Londres », écrit aussi le site, à la décharge cette fois de l’IAAF.
Selon Médiapart, la corruption a pris corps en 2011 avec l’arrivée dans l’entourage de Lamine Diack de deux conseillers spéciaux, deux compatriotes sénégalais.
« Le premier, Habib Cissé, avocat de formation, est désigné conseiller juridique auprès du président de l’IAAF. Le second, installé comme conseiller marketing, n’est autre que le propre fils de Lamine (NDLR: Pape Massata) (…). Les deux hommes vont curieusement récupérer la liste des athlètes suspectés de dopage par l’IAAF. L’avocat Habib Cissé va se rendre à plusieurs reprises à Moscou auprès des dirigeants de la Fédération russe d’athlétisme, et leur communiquer cette liste, hautement confidentielle ».
C’est le point de départ d’un vaste système occulte de corruption, où fédération russe et clan Diack font chanter des athlètes en leur promettant moyennant finances d’échapper aux contrôles antidopage, en modifiant par exemple les données de leur passeport biologique.
Selon Médiapart, « le rapport des enquêteurs de l’AMA parle de six sportifs russes » mais également de l’athlète turque Asli Alptekin.
Celle-ci refusera d’ailleurs de céder au chantage et tombera pour dopage plus tard, officiellement condamée à 8 ans de suspension en juillet dernier.
Outre Lamine Diack, mis en examen lundi, Habib Cissé (pour corruption passive seulement) et l’ancien médecin Gabriel Dollé ont également été mis en examen par la justice française. Les fils de l’ancien président, Pape Massata et Khalil, n’ont en revanche pas été mis en examen jusqu’à présent.
Avec AFP